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Regard sur 2023

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En 2023, la BCE a affermi les progrès réalisés dans sa lutte contre l’inflation dans la zone euro. En début d’année, l’inflation globale était toujours proche de son niveau record. Les effets négatifs des chocs antérieurs d’offre et de demande s’atténuaient mais continuaient de tirer les prix vers le haut. Deux évolutions importantes ont toutefois ouvert la voie à un net recul de l’inflation au cours de l’année.

Premièrement, les effets des chocs passés ont commencé à s’estomper. Les prix de l’énergie, qui avaient fortement augmenté en raison de la guerre injustifiée menée par la Russie contre l’Ukraine, ont chuté et la dissipation des goulets d’étranglement mondiaux au niveau de l’offre s’est poursuivie. La seule baisse des prix de l’énergie explique pour moitié le ralentissement de l’inflation en 2023. Deuxièmement, la BCE a continué de resserrer sa politique monétaire et favorisé ainsi un nouveau repli de l’inflation, en freinant la demande. Au total, de janvier à septembre, nous avons relevé les taux d’intérêt directeurs de 200 points de base supplémentaires.

Ces décisions monétaires, sur fond d’environnement très incertain, sont restées guidées par une approche s’appuyant sur les données. Pour évaluer précisément jusqu’à quel niveau il convenait de porter les taux d’intérêt, nous avons utilisé trois critères : les perspectives d’inflation, la dynamique de l’inflation sous-jacente et la force de la transmission de la politique monétaire. À partir de septembre, nous avons constaté une amélioration des perspectives d’inflation et une transmission puissante de la politique monétaire. Toutefois, l’inflation sous-jacente restait élevée et les tensions d’origine interne sur les prix étaient fortes.

Sur la base de ces éléments, nous avons décidé que les taux d’intérêt directeurs de la BCE avaient atteint des niveaux qui, maintenus pendant une durée suffisamment longue, contribueraient fortement au retour au plus tôt de l’inflation vers notre objectif. Nous nous sommes donc engagés à conserver les taux directeurs à ces niveaux aussi longtemps que nécessaire, tout en continuant à suivre une approche fondée sur les données, selon les mêmes critères, pour déterminer de manière appropriée le degré et la durée de cette orientation restrictive.

Nous avons en parallèle accéléré la normalisation du bilan de l’Eurosystème afin qu’il demeure conforme à notre orientation globale. Il s’est contracté de plus de 1 000 milliards d’euros en 2023, en grande partie du fait de l’arrivée à échéance et des remboursements anticipés d’emprunts contractés dans le cadre de nos opérations ciblées de refinancement à plus long terme. Nous avons également cessé en cours d’année les réinvestissements au titre de notre programme d’achats d’actifs. Et, en décembre, nous avons annoncé la suppression progressive des réinvestissements dans le cadre du programme d’achats d’urgence face à la pandémie.

Alors que nous consolidions les progrès dans la lutte contre l’inflation, nous avons poursuivi nos travaux visant à prendre en compte les risques liés au climat dans le cadre de nos missions. En mars, nous avons publié les premières déclarations financières en matière de climat concernant les avoirs en titres du secteur des entreprises détenus par l’Eurosystème. L’intensité en carbone de nos réinvestissements d’actifs d’entreprises a diminué d’environ deux tiers au cours des douze mois à compter d’octobre 2022, date à laquelle nous avons commencé à les orienter vers des émetteurs présentant de meilleures performances climatiques.

Des progrès considérables ont été réalisés dans un autre domaine crucial pour nos travaux : les paiements. Nous avons en effet lancé notre nouveau système de paiement de gros T2 en mars. Celui-ci contribue à l’harmonisation et à l’efficacité des marchés financiers européens, grâce à l’introduction d’un nouveau système de règlement brut en temps réel, qui remplace le système TARGET2 opérationnel depuis 2007, et à la simplification de la gestion de la liquidité de la monnaie de banque centrale.

Nous avons également entamé la phase préparatoire du projet d’euro numérique en novembre. Cette nouvelle étape, qui fait suite à une phase d’étude fructueuse de deux ans, permettra de jeter les bases de l’éventuelle émission d’un euro numérique. Un euro numérique coexisterait avec les espèces, sans s’y substituer. Les billets et pièces demeurent le moyen de paiement le plus fréquemment utilisé par les habitants de la zone euro, dont une nette majorité considère qu’il est important de pouvoir payer en espèces.

C’est en partie pour cette raison que la BCE prépare une nouvelle série de billets en euros, le symbole le plus tangible et le plus visible de l’unité européenne. Sur la base des résultats de deux enquêtes publiques réalisées à l’été 2023, le Conseil des gouverneurs a sélectionné deux thèmes potentiels pour cette nouvelle série : « La culture européenne » et « Fleuves et oiseaux ». La BCE devrait décider des graphismes définitifs en 2026, après que les Européens auront exprimé leurs préférences sur une liste de dessins possibles.

Au cours d’une année qui a marqué le vingt-cinquième anniversaire de la BCE, nous avons célébré l’arrivée de la Croatie dans la zone euro. L’adoption de l’euro par la Croatie, en janvier, a porté à vingt le nombre de pays constituant la zone euro, soit près du double de ceux qui avaient participé à l’introduction de la monnaie unique. L’expansion de la zone euro reflète l’attractivité durable de notre union monétaire dans un monde de plus en plus imprévisible. En 2023, le soutien populaire en faveur de l’euro est resté proche de ses niveaux records.

Il n’aurait pas été possible de parcourir tout ce chemin sans les efforts constants et le dévouement des agents de la BCE au service de notre mission : le maintien de la stabilité des prix pour les habitants de la zone euro. C’est un honneur de les diriger et de présider aux destinées de cette institution.

Francfort-sur-le-Main, avril 2024

Christine Lagarde

Présidente

L’année en chiffres

Le marché du travail de la zone euro a bien résisté

L’inflation s’est fortement ralentie dans la zone euro

Le taux de chômage de la zone euro s’est établi à 6,5 % en moyenne en 2023, revenant de 6,6 % en janvier à 6,5 % en mars et restant globalement stable sur le reste de l’année.

L’inflation totale dans la zone euro s’est établie à 2,9 % en décembre 2023, contre 9,2 % en décembre 2022. Le ralentissement a été de plus en plus généralisé à l’ensemble des composantes.



La BCE a continué de relever ses taux d’intérêt directeurs

La résilience des banques de la zone euro s’est encore renforcée

La BCE a relevé ses taux directeurs de 200 points de base supplémentaires en 2023, portant le taux de la facilité de dépôt à 4 %. Le resserrement de la politique monétaire s’est transmis vigoureusement à l’économie.

Le ratio de fonds propres de base de catégorie 1 (CET1) des banques de la zone euro s’est établi à 15,6 % au troisième trimestre, soit un taux proche de son plus haut niveau depuis le début de la supervision bancaire européenne et reflétant une rentabilité plus élevée et une réduction des risques dans les portefeuilles des banques.



Préférences en matière de paiement

Nouveaux indicateurs statistiques de la BCE relatifs au changement climatique

60 % des citoyens de la zone euro considèrent qu’il est important d’avoir la possibilité de payer en espèces. Dans le même temps, un peu plus de la moitié des consommateurs de la zone euro préfèrent payer par carte ou autres modes de paiement électroniques,

La BCE a publié trois nouvelles séries d’indicateurs statistiques relatifs à la finance durable, aux émissions de carbone et aux risques physiques dans le cadre de son plan d’action plus large pour le climat.



25e anniversaire de la Banque centrale européenne

Décarbonation des portefeuilles du secteur privé

En 2023, la BCE a célébré son 25e anniversaire avec le message « La valeur de l’unité », lui permettant de souligner le succès de la monnaie unique et ses avantages pour les citoyens européens.

L’intensité carbone des investissements a diminué de plus de 65 % au cours des 12 mois qui ont suivi le début des réinvestissements orientés en octobre 2022.

1 Nette diminution de l’inflation à mesure que le resserrement de la politique monétaire continue de se transmettre fortement

En 2023, l’économie mondiale a mieux résisté que prévu initialement, en poursuivant sa croissance à un rythme modéré. Cela s’explique principalement par la croissance économique dans les économies de marché émergentes et aux États-Unis, tandis que la plupart des autres économies avancées ont été plus fortement affectées par des conditions de financement restrictives et la forte incertitude géopolitique. L’inflation mondiale a nettement diminué en raison de la baisse des prix des matières premières énergétiques, tandis que les tensions sous-jacentes sur les prix sont restées élevées. L’euro s’est renforcé en termes effectifs nominaux et vis-à-vis du dollar américain.

Dans la zone euro, la croissance économique s’est affaiblie en 2023. Le secteur industriel a été particulièrement affecté par le durcissement des conditions de financement, le coût élevé des intrants et l’atonie de la demande mondiale, tandis que dans un premier temps le secteur des services a encore pu bénéficier des effets prolongés de la réouverture de l’économie après la pandémie. Alors que le resserrement des taux d’intérêt de la BCE se transmettait vigoureusement à l’activité économique, le marché du travail a relativement bien résisté. Les gouvernements de la zone euro ont continué de réduire progressivement les mesures de soutien adoptées en réponse à la pandémie, aux chocs sur les prix de l’énergie et sur l’inflation, annulant en partie l’assouplissement budgétaire antérieur. L’inflation totale a fortement diminué dans la zone euro, en particulier grâce à la variation des prix de l’énergie devenue négative avec la dissipation des fortes hausses des prix de l’énergie enregistrées en 2022. L’inflation sous-jacente a également commencé à se modérer, soutenant un processus désinflationniste général et reflétant la dissipation de l’impact des chocs passés et les effets croissants du resserrement de la politique monétaire. Toutefois, les tensions d’origine interne sur les prix ont remplacé les tensions extérieures en tant que principaux déterminants de l’inflation, car le marché du travail a favorisé une forte évolution des salaires nominaux, les travailleurs cherchant une compensation pour les pertes de pouvoir d’achat liées à l’inflation passée.

1.1 Expansion de l’activité économique mondiale à un rythme modéré et baisse de l’inflation totale

La croissance économique mondiale a été modérée face au resserrement de la politique monétaire et à une incertitude élevée

L’économie mondiale a poursuivi sa croissance à un rythme modéré en 2023, la croissance restant globalement inchangée à 3,5 % par rapport à 2022 (graphique 1.1) [1]. Bien que modérée en comparaison historique, la croissance a été plus élevée que prévu en début d’année, favorisée par un marché du travail dynamique et une demande soutenue de services malgré la poursuite du resserrement de la politique monétaire [2]. L’économie mondiale a été principalement tirée par l’activité dans les économies de marché émergentes et aux États-Unis, tandis que dans la plupart des autres économies avancées, les conditions de financement restrictives et les effets persistants des facteurs géopolitiques sur les prix de l’énergie ont pesé plus fortement sur la demande. Aux États-Unis, l’économie a mieux résisté que prévu dans un contexte de demande intérieure robuste et de marché du travail dynamique. Les turbulences dans le secteur financier aux États‑Unis au début de l’année n’ont pas eu d’impact macroéconomique important. En Chine, un nouvel effondrement du secteur de l’immobilier résidentiel, ainsi qu’une faible demande intérieure et extérieure, ont mis un terme au rebond économique du début d’année qui faisait suite à l’assouplissement en décembre 2022 des mesures très restrictives liées à la pandémie. Néanmoins, l’économie chinoise a atteint l’objectif de croissance de 5 % environ fixé par le gouvernement.

Graphique 1.1

PIB mondial et sa composition

a) Croissance du PIB mondial en volume

b) Composition de la croissance mondiale

(variations annuelles en pourcentage)

(contributions en points de pourcentage)

Sources : BCE, calculs des services de la BCE et projections macroéconomiques établies par les services de la BCE, mars 2024
Notes : « PIB mondial » exclut la zone euro. La moyenne pré-pandémique concerne la période allant de 2012 à 2019. Les valeurs pour 2023 sont des estimations sur la base des données disponibles et des projections macroéconomiques de mars 2024 établies par les services de la BCE.

La dynamique du commerce mondial s’est affaiblie en raison de la normalisation des profils de consommation après la pandémie

Le commerce mondial a été faible en 2023, la croissance des importations s’étant ralentie, à 1,2 %, soit un taux de croissance nettement inférieur à celui de 5,5 % enregistré l’année précédente et à la moyenne pré-pandémique de 3,1 % [3]. Le ralentissement a reflété trois tendances majeures. Premièrement, la demande mondiale s’est réorientée des biens vers les services avec la suppression définitive des restrictions liées à la pandémie. Deuxièmement, la part dans la demande intérieure de la consommation, généralement moins dépendante des échanges que l’investissement, a augmenté. Enfin, les économies de marché émergentes, dans lesquelles les échanges réagissent moins aux variations de l’activité économique, ont apporté une contribution plus importante à l’activité mondiale en 2023. Malgré l’accroissement des barrières commerciales et des résultats d’enquêtes auprès des entreprises suggérant une possible relocalisation des chaînes de valeur, les signes d’une fragmentation des flux commerciaux agrégés sont restés limités jusqu’à présent.

L’inflation a diminué, mais les tensions sous-jacentes sur les prix restent élevées

L’inflation annuelle totale mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) dans l’ensemble des pays membres de l’OCDE, à l’exception de la Turquie, a diminué par rapport aux niveaux élevés observés en 2023, sous l’effet de la diminution des prix de l’énergie. Elle s’est ralentie à 3,9 % en décembre, et sur l’ensemble de l’année 2023, elle s’est établie à 5,3 %, contre 7,3 % en 2022 (graphique 1.2, partie a). L’inflation hors énergie et produits alimentaires s’est également ralentie, mais dans une bien moindre mesure, indiquant que les tensions sous-jacentes sur les prix demeurent fortes et généralisées. Cela a été particulièrement visible dans les économies avancées, où les tensions sur les marchés du travail ont contribué aux taux de croissance élevés des salaires, rendant la hausse des prix des services plus persistante (graphique 1.2, partie b).

Graphique 1.2

Taux d’inflation totale et d’inflation core dans l’OCDE

a) Inflation totale et ses composantes principales

b) Inflation dans les grandes économies

(variations annuelles en pourcentage, données mensuelles)

(variations annuelles en pourcentage, données mensuelles)

Sources : Sources nationales via Haver Analytics, OCDE et calculs des services de la BCE.
Notes : ZE : zone euro. L’inflation dans les pays de l’OCDE exclut la Turquie et est calculée sur la base des IPC nationaux et des pondérations des dépenses de consommation finales privées annuelles exprimées en termes de parité de pouvoir d’achat. L’inflation core exclut l’énergie et les produits alimentaires. Les dernières observations se rapportent à décembre 2023.

Les prix des matières premières énergétiques ont diminué car la faiblesse de la demande a contrebalancé les contraintes d’offre

Les prix des matières premières ont diminué tout au long de 2023 en raison d’une baisse de la demande. Les prix du pétrole ont baissé de 4 %, la faiblesse de la demande de pétrole provenant des économies avancées contrebalançant la hausse de la demande qui a suivi l’assouplissement des mesures de confinement en Chine. Par ailleurs, la faible demande de pétrole a plus que contrebalancé les effets des réductions de l’offre par le groupe OPEP+ ainsi que les risques sur l’offre exercés par des facteurs géopolitiques incluant les sanctions imposées à la Russie et le conflit au Moyen-Orient. La baisse des prix du gaz en Europe a été nettement plus importante, les prix du gaz ayant poursuivi la baisse amorcée fin 2022 et ayant été réduits de 58 % supplémentaires au cours de 2023. La consommation de gaz en Europe est restée inférieure aux normes historiques en raison d’une baisse de la demande industrielle, de la réduction de la consommation de gaz réalisée par les ménages et de conditions météorologiques clémentes au cours des mois d’hiver. La stabilité de l’offre de gaz naturel liquéfié (GNL) a également permis aux pays européens de commencer la saison de chauffage avec des stocks de gaz pleins. Malgré une plus grande stabilité du marché européen du gaz par rapport à l’année précédente, les risques en matière d’approvisionnement, tels que les grèves dans les terminaux de GNL en Australie, ont continué d’engendrer des périodes de forte volatilité des prix, illustrant la sensibilité du marché européen du gaz durant la transition vers l’abandon des importations de gaz russe.

L’euro s’est renforcé en termes effectifs nominaux et vis-à-vis du dollar américain

L’euro s’est renforcé en termes effectifs nominaux (+3,9 %) et vis-à-vis du dollar américain (+3,4 %) sur la base des données de fin d’année, dans un contexte de fluctuations intra-annuelles notables. La dynamique des taux de change a été principalement influencée par l’évolution des anticipations de marché résultant des changements apportés aux politiques monétaires et de perspectives économiques volatiles. Soutenu initialement au cours du premier semestre de l’année par l’amélioration des conditions macroéconomiques dans la zone euro et par un rythme plus rapide de resserrement de la politique monétaire, l’euro a commencé mi-juillet à se déprécier vis-à-vis du dollar américain. Le raffermissement du dollar, qui a été généralisé, a été attribué à des surprises positives en matière de données économiques et aux anticipations par les marchés d’une orientation de politique monétaire plus stricte pendant plus longtemps aux États-Unis. Une réévaluation de l’orientation vers la fin de l’année, dans un contexte de baisse des taux d’inflation, a entraîné une nouvelle appréciation de l’euro. Parmi les devises des principaux partenaires commerciaux, l’euro s’est nettement renforcé vis-à-vis de la livre turque, du rouble russe, du yen japonais et de la couronne norvégienne. Toutefois, il s’est affaibli par rapport à la livre sterling, au franc suisse et au zloty polonais.

Parmi les principaux risques pesant sur les perspectives de croissance économique mondiale fin 2023, on comptait une nouvelle aggravation des tensions géopolitiques, un ralentissement plus prononcé de l’économie chinoise et des tensions inflationnistes plus persistantes qui nécessiteraient un resserrement plus fort qu’anticipé de la politique monétaire. La matérialisation de ces risques réduirait l’activité économique mondiale. De plus, les marchés mondiaux des matières premières sont demeurés très sensibles aux risques en matière d’approvisionnement, ce qui pourrait alimenter l’inflation et peser sur la croissance mondiale dans l’année à venir.

1.2 L’activité économique stagne dans la zone euro

La croissance de la zone euro s’est affaiblie, les effets de la hausse des taux d’intérêt se généralisant

Le PIB en volume de la zone euro a augmenté de 0,4 % en 2023, après une hausse de 3,4 % en 2022 (graphique 1.3). La croissance a reflété des contributions positives de la demande intérieure et des exportations nettes. La variation des stocks a exercé un effet modérateur. À la fin de l’année, la production dans la zone euro se situait 3,0 % au-dessus de son niveau d’avant la pandémie (au dernier trimestre 2019) et 1,4 % au-dessus de son niveau au premier trimestre 2022, lors de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Le ralentissement de la croissance en 2023 était largement imputable aux répercussions économiques de la guerre, qui a eu des effets variables selon les pays, reflétant leurs différentes structures économiques. Si le secteur industriel a été particulièrement touché par le resserrement de la politique monétaire, le niveau élevé des prix de l’énergie et l’affaiblissement de la demande mondiale, le secteur des services a relativement bien résisté, continuant de bénéficier des effets de la réouverture de l’économie à la suite de la pandémie. Toutefois, la faiblesse de la croissance s’est généralisée vers la fin de l’année, l’incidence de la hausse des taux d’intérêt se transmettant aux différents secteurs parallèlement aux effets de contagion du secteur industriel fragile vers les services.

Graphique 1.3

PIB en volume de la zone euro

(variations annuelles en pourcentage ; contributions en points de pourcentage)

Source : Eurostat.
Note : Les dernières observations se rapportent à 2023.

Les dépenses de consommation étaient davantage orientées vers les services que vers les biens

La croissance de la consommation privée s’est nettement ralentie en 2023. Elle a stagné au premier semestre de l’année, la baisse continue des dépenses de biens – mesurée par le volume du commerce de détail (graphique 1.4) – contrebalançant la demande toujours positive de services. Au troisième trimestre, la consommation privée a augmenté, portée par la consommation de services des ménages qui a elle-même bénéficié des effets de réouverture persistants, et par le rebond des dépenses en biens durables. Les dépenses totales en biens (y compris les biens semi-durables et non durables) ont continué de se contracter dans un contexte de durcissement des conditions de financement. Globalement, les dépenses des ménages ont augmenté de 0,5 % en 2023. En 2023, les dépenses des ménages ont été soutenues dans une certaine mesure par le revenu disponible réel, la progression des salaires nominaux s’accélérant, l’inflation se ralentissant progressivement et la croissance de l’emploi restant résiliente. Néanmoins, la transmission du durcissement des conditions de financement à l’économie réelle semble avoir pesé sur les dépenses des ménages, l’épargne demeurant importante.

Graphique 1.4

Production et commerce de détail dans la zone euro

(indice : juin 2022 = 100)

Sources : Eurostat et calculs de la BCE.
Notes : Le commerce de détail est mesuré en termes réels. Les dernières observations se rapportent à décembre 2023 pour la production dans les services et à janvier 2024 pour le reste.

L’investissement a été freiné par le durcissement des conditions de financement

La croissance de l’investissement hors construction (qui constitue une approximation de l’investissement privé hors immobilier résidentiel) s’est ralentie tout au long de l’année 2023 [4]. Alors que le premier trimestre 2023 a été marqué par une croissance vigoureuse liée à l’atténuation des goulets d’étranglement au niveau de l’offre, les taux d’augmentation trimestriels ont progressivement diminué et l’investissement a reculé au quatrième trimestre avec la baisse de la demande intérieure et extérieure, la résorption des arriérés de commande, le fléchissement des bénéfices des entreprises et le durcissement des conditions de financement. L’incertitude suscitée par la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine et par le conflit au Moyen-Orient, entre autres facteurs, est également susceptible d’avoir réduit les incitations à l’investissement pour les entreprises. Néanmoins, l’abondance des bénéfices et des réserves de liquidité ainsi qu’une baisse de l’endettement ont, en moyenne, renforcé les bilans des entreprises ces dernières années et, parallèlement aux financements au titre du programme Next Generation EU (NGEU) visant à soutenir les investissements dans les domaines de la numérisation et du climat, ont contribué à une certaine résilience de l’investissement par rapport à d’autres composantes des dépenses. Globalement, l’investissement hors construction a augmenté de 2,9 % en 2023.

Dans l’ensemble, les investissements dans la construction ont continué de fléchir en 2023. Cela s’explique principalement par la baisse de l’investissement dans la construction résidentielle résultant des coûts élevés de construction, de la hausse continue des taux d’intérêt appliqués aux prêts hypothécaires et du durcissement des critères d’octroi de crédit, ce qui a compliqué l’accès au financement des ménages et pesé sur la demande de biens immobiliers résidentiels. D’autres domaines du secteur de la construction, tels que le génie civil, ont été plus résistants, soutenus par les investissements dans des infrastructures publiques. Fin 2023, l’investissement dans la construction était supérieur de 2,1 % à son niveau d’avant la pandémie, affichant une baisse de 0,6 % pour l’ensemble de l’année.

Le solde des échanges de biens dans la zone euro est redevenu excédentaire en 2023, face à la baisse des prix de l’énergie importée. La croissance des exportations est restée atone, dans un contexte de demande extérieure faible. Les exportations de produits manufacturés ont été soutenues par l’atténuation des goulets d’étranglement au niveau de l’offre, tandis que les effets persistants du choc sur l’offre d’énergie et l’appréciation de l’euro en termes effectifs ont contribué à la faiblesse des exportations. La faible performance des exportations s’est étendue aux exportations de services au second semestre, le soutien apporté par la demande latente après la réouverture de l’économie mondiale se dissipant. Avec l’affaiblissement de la demande intérieure, les importations dans la zone euro ont également reculé, sous l’effet de la diminution des importations de biens intermédiaires, liée aux déstockages effectués par les entreprises et à la baisse des importations d’énergie. Dans l’ensemble, la contribution des échanges à la croissance du PIB de la zone euro a été légèrement positive en 2023.

Marché du travail

Le marché du travail de la zone euro a continué de bien résister dans l’ensemble en 2023, bien que ses évolutions et les indicateurs tirés d’enquêtes à la fin de l’année aient signalé un fléchissement. Le taux de chômage s’est établi en moyenne à 6,5 % en 2023 ; il a reculé de 6,6 % en janvier à 6,5 % en mars, pour rester globalement stable à ce niveau pendant le reste de l’année (graphique 1.5). L’emploi total et le nombre total d’heures travaillées se sont bien maintenus malgré la stagnation de l’économie, augmentant respectivement de 1,4 % et 1,6 % en 2023. Le nombre moyen d’heures travaillées n’a augmenté que de 0,2 % en 2023, et au quatrième trimestre 2023, il est revenu à un niveau inférieur de 1,3 % à celui observé avant la pandémie, probablement en raison de facteurs tels que la rétention de main-d’œuvre (c’est-à-dire que les entreprises maintiennent plus d’effectifs que nécessaire en période de ralentissement économique) et une hausse des congés maladie. Le taux d’activité de la tranche d’âge des 15-74 ans a augmenté pour atteindre 65,7 % au quatrième trimestre 2023, soit 1,1 point de pourcentage au-dessus de son niveau d’avant la pandémie. Au second semestre, la demande de main-d’œuvre a montré des signes d’assouplissement, le taux de vacance d’emploi restant élevé mais diminuant progressivement après le pic atteint au deuxième trimestre 2022. Dans l’ensemble, alors que la transmission à l’économie des hausses des taux d’intérêt décidées par la BCE est restée vigoureuse, l’emploi total et le marché du travail de la zone euro (qui font partie des objectifs de l’Union européenne auxquels la BCE peut contribuer sans préjudice du maintien de la stabilité des prix) sont demeurés relativement résilients.

Graphique 1.5

Marché du travail

(échelle de gauche : variations trimestrielles en pourcentage ; échelle de droite : en pourcentage)

Sources : Eurostat et calculs de la BCE.
Note : Les dernières observations se rapportent à janvier 2024 pour le taux de chômage et au quatrième trimestre 2023 pour l’emploi et pour le nombre d’heures travaillées.

1.3 Les mesures de politique budgétaire dans un environnement macroéconomique difficile

Le ratio de déficit budgétaire de la zone euro a diminué, les gouvernements ayant commencé à réduire progressivement les mesures de soutien discrétionnaires

Le ratio de déficit des administrations publiques de la zone euro a continué de diminuer en 2023, suivant une trajectoire amorcée au plus fort de la pandémie (graphique 1.6) [5]. Le resserrement progressif de la politique budgétaire se reflète également dans l’orientation budgétaire, qui s’est légèrement durcie en 2023 pour la troisième année consécutive [6]. Toutefois, à peine un peu plus du tiers de l’assouplissement observé en 2020 s’est inversé jusqu’à présent (graphique 1.6). Cela signifie que le solde budgétaire corrigé du cycle reste très inférieur à son niveau d’avant la pandémie, en raison des mesures durables adoptées dans le contexte de la pandémie en 2020 et des mesures de soutien liées à l’énergie mises en œuvre à partir de 2022.

Graphique 1.6

Solde des administrations publiques et orientation budgétaire de la zone euro

(en pourcentage du PIB)

Sources : Projections macroéconomiques pour la zone euro établies par les services de l’Eurosystème, décembre 2023 et calculs de la BCE.
Note : La mesure de l’orientation budgétaire est ajustée du côté des recettes depuis 2021 en déduisant les subventions octroyées au titre de la facilité pour la reprise et la résilience du programme NGEU, ces recettes n’ayant pas d’effet de resserrement macroéconomique.

Un nouveau durcissement de l’orientation budgétaire serait approprié

Du point de vue de fin 2023, trouver la meilleure façon d’inverser l’expansion cumulée des quatre dernières années (graphique 1.7) et de réduire les ratios de dette constituera un défi pour les autorités budgétaires, en particulier parce que les évolutions démographiques, les transitions écologique et numérique ainsi que l’environnement géopolitique nécessiteront à l’avenir une marge de manœuvre budgétaire. Les budgets publics pour 2024 indiquaient la poursuite du cycle de durcissement budgétaire au niveau de la zone euro. Cette évolution reflète en grande partie le retrait des mesures budgétaires discrétionnaires qui avaient été adoptées en réponse aux chocs énergétique et d’inflation. Selon les estimations, ces mesures représentaient plus de 1 % du PIB en 2023, mais seule une faible partie d’entre elles devait rester active en 2024. Toutefois, certaines des mesures expansionnistes adoptées par les gouvernements pendant la pandémie semblaient devoir s’inscrire dans la durée, et, sur la base des budgets 2024, ne devraient pas être désactivées à brève échéance. C’est le cas pour l’augmentation des transferts et des subventions mais aussi, dans une certaine mesure, pour les réductions de l’impôt.

Graphique 1.7

Décomposition de l’orientation budgétaire et des mesures discrétionnaires de la zone euro

(en pourcentage du PIB)

Sources : Projections macroéconomiques pour la zone euro établies par les services de l’Eurosystème, décembre 2023  et calculs de la BCE.
Notes : La mesure de l’orientation budgétaire est ajustée du côté des recettes depuis 2021 en déduisant les subventions octroyées au titre de la facilité pour la reprise et la résilience du programme NGEU, ces recettes n’ayant pas d’effet de resserrement macroéconomique. « Autres mesures » se rapporte principalement aux mesures adoptées pendant la pandémie et à leur retrait ultérieur.

Un nouveau durcissement de l’orientation budgétaire semble également approprié du point de vue de la politique monétaire. La crise énergétique s’étant largement atténuée, les gouvernements devraient continuer de retirer les mesures de soutien correspondantes, ce qui est essentiel pour éviter d’accentuer les tensions inflationnistes à moyen terme. Sans cela, une politique monétaire plus stricte serait nécessaire. Outre le retrait progressif des mesures liées à la pandémie et à l’énergie, les pouvoirs publics devraient plus généralement progresser vers des situations budgétaires plus solides afin de garantir que les finances publiques s’inscrivent sur une trajectoire durable.

L’UE a besoin d’un cadre solide et crédible pour la coordination des politiques économiques et budgétaires

Il demeure essentiel de disposer d’un cadre communautaire solide pour la coordination et la surveillance des politiques économiques et budgétaires. À la suite de débats approfondis, le Conseil de l’Union européenne a adopté en 2023 une réforme du cadre de gouvernance économique de l’UE, qui a ouvert la voie à un trilogue entre la Commission européenne, le Conseil de l’UE et le Parlement européen. 2024 sera une année de transition importante vers sa mise en œuvre [7].

1.4 L’inflation totale s’est fortement ralentie tout au long de l’année

L’inflation totale dans la zone euro, mesurée par l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH), est revenue à 2,9 % en décembre 2023, une baisse de 6,3 points de pourcentage par rapport à son niveau de décembre 2022. Elle a affiché une baisse régulière tout au long de l’année, le processus désinflationniste se faisant également sentir dans l’inflation sous-jacente au fil des mois. En novembre, l’inflation totale a atteint un point bas temporaire de 2,4 %, son niveau le plus bas depuis plus de deux ans (nettement inférieur à son pic de 10,6 % enregistré en octobre 2022) (graphique 1.8). Toutefois, l’inflation a de nouveau légèrement augmenté en décembre, en raison des effets baissiers exercés par les mesures budgétaires liées à l’énergie sur les niveaux des prix un an auparavant. Toutes les principales composantes de l’inflation ont enregistré une diminution des taux d’inflation en glissement annuel au cours du second semestre 2023, reflétant la dissipation de l’impact des précédents chocs sur les coûts et l’atonie de la demande dans un contexte de resserrement de la politique monétaire. Toutefois, les taux d’inflation en glissement annuel (hors prix de l’énergie) étaient encore, à la fin de l’année, nettement supérieurs à leurs moyennes de long terme, tandis que les taux annualisés en glissement trimestriel s’étaient déjà largement rapprochés de ces références. La dynamique des prix des biens s’est ralentie plus rapidement que celle des services, la réduction des goulets d’étranglement au niveau de l’offre et des coûts des intrants ayant permis d’atténuer considérablement les tensions. La hausse des prix des services s’est accélérée jusqu’à mi-2023, en raison d’une demande post-pandémique toujours vigoureuse, de l’augmentation des coûts de main-d’œuvre et de facteurs temporaires liés aux mesures budgétaires. Du fait du ralentissement de la hausse des prix de l’énergie et des produits alimentaires, l’hétérogénéité des taux d’inflation entre les pays de la zone euro s’est également nettement réduite.

Graphique 1.8

Inflation totale et ses composantes principales

(variations annuelles en pourcentage ; contributions en points de pourcentage)

Sources : Eurostat et calculs de la BCE.
Note : Les dernières observations se rapportent à décembre 2023.

La hausse des prix de l’énergie s’est fortement ralentie tandis que la hausse des prix des produits alimentaires s’est modérée

Les évolutions des prix de l’énergie ont contribué pour plus de moitié à la baisse de l’inflation totale entre décembre 2022 et décembre 2023. Les prix de l’énergie ont encore enregistré une forte hausse en janvier 2023, mais à la fin de l’année ils avaient reculé de 25,6 points de pourcentage, pour s’inscrire en territoire négatif. Cela reflète la dissipation des fortes augmentations des prix de gros de l’énergie enregistrées en 2022. Toutefois, la hausse des prix de l’énergie est demeurée légèrement volatile, les marchés de gros de l’énergie se montrant sensibles à des événements tels que le conflit au Moyen-Orient. Dans le même temps, la hausse des prix des produits alimentaires a atteint un point haut à 15,5 % en mars 2023. Elle s’est ensuite considérablement ralentie sur le reste de l’année, tout en restant supérieure à 6 % en fin de l’année, en raison des effets persistants des chocs antérieurs sur les coûts, résultant de l’énergie et d’autres intrants, ainsi que des tensions accrues exercées par les bénéfices unitaires et les coûts de main-d’œuvre.

L’inflation sous-jacente a commencé à se modérer, mais est demeurée élevée à la fin de l’année

L’inflation core – mesurée par la hausse de l’IPCH en excluant les composantes volatiles que sont l’énergie et les produits alimentaires – a continué d’augmenter au premier trimestre de l’année, mais s’est ensuite ralentie, revenant à 3,4 % en décembre après un pic à 5,7 %. Cette baisse a résulté dans un premier temps de la variation des prix des biens industriels non énergétiques, la demande de biens ayant fléchi dans un contexte de durcissement des conditions de financement (cf. section 1.2) et de tensions accumulées liées aux goulets d’étranglement antérieurs au niveau de l’offre, alors que les coûts élevés de l’énergie avaient commencé à se dissiper. Dans le même temps, la hausse des prix des services a oscillé à des niveaux élevés jusqu’en août, en raison d’une demande toujours forte après la réouverture de l’économie (pour les secteurs des services nécessitant de nombreux contacts tels que les loisirs et les vacances) et de l’augmentation des coûts de main-d’œuvre, en particulier compte tenu de la part plus importante de la main-d’œuvre dans la structure de coûts du secteur des services par rapport au secteur manufacturier. Vers la fin de l’année, toutefois, la hausse des prix des services s’est également légèrement ralentie et a confirmé le processus désinflationniste général. De plus, le décalage de la dynamique de l’inflation dans les services a reflété le fait que de nombreuses composantes des services accusent généralement un retard par rapport à l’inflation totale (par exemple, les logements, les services postaux et médicaux). Tous les autres indicateurs de l’inflation sous‑jacente se sont également nettement modérés au cours de l’année, reflétant la dissipation de l’impact des chocs passés et l’incidence croissante du resserrement de la politique monétaire, mais ils ont continué de s’inscrire dans une fourchette large, et la plupart d’entre eux sont restés à des niveaux nettement supérieurs à ceux observés avant la pandémie [8].

Les coûts de main-d’œuvre sont devenus le principal contributeur à l’inflation intérieure dans le courant de l’année

La croissance du déflateur du PIB (une mesure fiable des tensions d’origine interne sur les prix) s’est établie en moyenne à 6,0 % en 2023. En comparaison, la variation moyenne des prix à l’importation est ressortie à – 2,9 %, reflétant le passage de moteurs externes de l’inflation à des moteurs internes. Si les bénéfices ont continué de jouer un rôle de premier plan dans les tensions d’origine interne sur les prix au tournant de l’année 2022/2023 (cf. encadré 2), les coûts de main-d’œuvre sont progressivement devenus le principal facteur, compte tenu des fortes évolutions des salaires et d’une diminution de la productivité du travail (cf. graphique 1.9). La croissance annuelle de la rémunération par tête a augmenté, pour atteindre 5,1 % en moyenne en 2023, contre 4,5 % en 2022, des taux nettement supérieurs à la moyenne de 1,7 % enregistrée avant la pandémie (2015-2019), ce qui a été favorisé par les tensions persistantes sur les marchés du travail (cf. section 1.2). Ce nouveau renforcement reflète en partie le fait que les travailleurs cherchent à compenser les pertes de pouvoir d’achat des salaires nominaux résultant de l’inflation passée. La croissance des salaires négociés a augmenté pour s’établir à 4,5 % en moyenne en 2023 ; la différence par rapport à la croissance effective des salaires suggère qu’il existe une composante encore importante de glissement des salaires, bien que moins élevée qu’en 2021-2022 [9]. La croissance de la rémunération par tête et celle des salaires négociés ont commencé à se ralentir vers la fin de l’année, mais elles demeurent à des niveaux élevés, ce qui indique que de fortes tensions sur les salaires nominaux persisteront courant 2024. Cela reflète un redressement des salaires réels plutôt que les signes d’une dynamique salaires-prix déstabilisatrice.

Graphique 1.9

Rémunération par tête dans la zone euro

(variations annuelles en pourcentage ; contributions en points de pourcentage)

Sources : Eurostat, BCE et calculs de la BCE.

Les anticipations d’inflation à long terme ont légèrement diminué, restant ancrées autour de la cible de 2 % de la BCE

La moyenne des anticipations d’inflation à plus long terme des prévisionnistes professionnels, qui se situait à 2,2 % fin 2022, a légèrement baissé, pour revenir à 2,1 % en 2023. D’autres données d’enquêtes, telles que celles tirées de l’enquête de la BCE auprès des analystes monétaires et celles de Consensus Economics, ont également suggéré que les anticipations d’inflation à plus long terme étaient bien ancrées autour de la cible de 2 % de la BCE. Une mesure de la compensation de l’inflation à plus long terme extraites des instruments de marché (le taux des swaps indexés sur l’inflation à cinq ans dans cinq ans) a augmenté pour atteindre un pic de 2,7 % en août, mais est revenue à 2,3 % fin décembre dans un contexte d’informations indiquant une inflation totale plus faible que prévu et des perspectives de croissance économique modérées (cf. section 1.2). En toute hypothèse, les mesures extraites des instruments de marché corrigées des primes de risque impliquent des anticipations « véritables » très proches de 2 %. Du côté des consommateurs, les anticipations d’inflation médianes à trois ans sont demeurées légèrement supérieures, à 2,5 % en décembre, reflétant peut-être une forte incertitude, un climat économique défavorable et des niveaux de prix encore élevés par rapport aux salaires [10].

1.5 Les conditions de crédit et de financement se sont fortement durcies à mesure de la hausse des taux directeurs

Baisse des rendements obligataires malgré le resserrement de la politique monétaire, reflétant une modification des anticipations vers la fin de l’année

Les tensions inflationnistes étant restées élevées et persistantes tout au long de 2023 (cf. section 1.4), la BCE a résolument poursuivi le resserrement de la politique monétaire jusqu’à septembre, et maintenu par la suite les taux d’intérêt directeurs à des niveaux restrictifs, afin de garantir un retour de l’inflation à la cible de 2 % à moyen terme (cf. section 2.1). Le taux – sans risque – des swaps au jour le jour (OIS) à dix ans a oscillé autour de 3 % durant la majeure partie de l’année, atteignant un pic à 3,3 % en octobre avant de revenir en moyenne à 2,5 % en décembre (graphique 1.10). La baisse du taux OIS à dix ans vers la fin de l’année a résulté d’un fort recul des anticipations des marchés financiers relatives aux taux d’intérêt, principalement après des résultats plus faibles que prévu pour l’inflation. Ce recul des anticipations n’a été que partiellement compensé par une hausse de la prime de terme. Les rendements des emprunts publics à long terme ont suivi très étroitement les évolutions du taux OIS. Leurs spreads ont été peu affectés par le processus de normalisation du bilan de l’Eurosystème (cf. section 2.1) et à la fin de l’année, ils étaient pratiquement les mêmes qu’en décembre 2022. La moyenne pondérée du PIB des rendements nominaux des emprunts publics à dix ans pour la zone euro s’est établie à 2,7 % en moyenne en décembre 2023, soit 10 points de base au-dessous de son niveau un an auparavant.

Graphique 1.10

Taux d’intérêt à long terme, et coût de l’emprunt pour les entreprises et pour les prêts au logement consentis aux ménages

(en pourcentages annuels)

Sources : Bloomberg, LSEG et calculs de la BCE.
Notes : Observations mensuelles. Le rendement des emprunts publics à 10 ans dans la zone euro est une moyenne pondérée du PIB. Les indicateurs relatifs au coût de l’emprunt sont calculés en agrégeant les taux débiteurs bancaires à court terme et à long terme à l’aide d’une moyenne mobile sur 24 mois des volumes de contrats nouveaux. Les dernières observations se rapportent à décembre 2023.

Les marchés boursiers ont été soutenus par la baisse des primes de risque

Les prix des actions ont augmenté en 2023 à la fois dans le secteur non financier et, plus encore, dans le secteur bancaire. Une baisse des primes de risque sur actions a soutenu les prix des actions dans un contexte de volatilité faible et en diminution, en dépit de tensions géopolitiques accrues. L’indice des actions bancaires de la zone euro a continué d’être soutenu par les anticipations d’une augmentation des bénéfices des banques, à court terme comme à long terme, les turbulences observées sur les marchés en mars qui avaient résulté des difficultés du secteur bancaire aux États-Unis et en Suisse exerçant un impact négatif important mais temporaire. Les indices larges relatifs aux prix des actions des sociétés non financières et des banques de la zone euro ont achevé l’année 2023 environ 12 % et 23 % au-dessus de leurs niveaux respectifs de fin 2022. Les rendements des obligations d’entreprises ont diminué et leurs niveaux de décembre 2023 ont été inférieurs, en moyenne, à ceux de décembre 2022, tant pour le segment bien noté (investment-grade) que pour le segment à haut rendement (high-yield), en raison d’une baisse des taux sans risque conjuguée à une compression des écarts de rendement pour ces obligations.

L’agrégat monétaire large et l’intermédiation bancaire ont reflété le resserrement de la politique monétaire

L’agrégat monétaire large (M3) a stagné, reflétant principalement le resserrement de la politique monétaire. Son taux de variation annuel est ressorti à 0,1 % seulement en décembre, après avoir significativement baissé en 2023 et avoir même enregistré temporairement des taux négatifs pour la première fois depuis le début de l’Union monétaire (graphique 1.11). Cette baisse a été liée à l’atonie de la création de crédit, aux coûts d’opportunité élevés de la détention d’actifs liquides et à la réduction du bilan de l’Eurosystème. Même si les bilans des banques sont restés robustes dans l’ensemble, les remboursements des fonds empruntés dans le cadre de la troisième série d’opérations de refinancement à plus long terme ciblées ainsi qu’une contraction des portefeuilles d’actifs de l’Eurosystème ont réduit l’excédent de liquidité. Les coûts de financement des banques ont nettement augmenté, mais dans une moindre mesure que les taux directeurs, les banques se tournant vers des sources de financement de marché plus coûteuses et se livrant à une concurrence plus active pour attirer les dépôts des clients en leur offrant des intérêts plus élevés.

Avec le resserrement de la politique monétaire, les taux débiteurs bancaires ont fortement augmenté pour les entreprises et les ménages

La transmission du resserrement de la politique monétaire aux conditions de financement au sens large est restée forte en 2023. Comme indiqué par l’enquête sur la distribution du crédit bancaire dans la zone euro, les banques ont continué de durcir sensiblement leurs critères d’octroi (c’est-à-dire les directives internes ou les critères d’approbation des prêts) pour les prêts consentis aux ménages et aux entreprises. Cette évolution a été confirmée par l’enquête sur l’accès des entreprises au financement en ce qui concerne les entreprises et par l’enquête sur les anticipations des consommateurs s’agissant des ménages. Les taux débiteurs bancaires nominaux ont de nouveau fortement augmenté en 2023, atteignant leurs plus hauts niveaux en près de 15 ans. Le taux débiteur bancaire composite appliqué aux prêts au logement consentis aux ménages s’est établi à 4,0 % à la fin de l’année, soit une augmentation de 100 points de base environ par rapport à fin 2022, et le taux équivalent pour les prêts consentis aux sociétés non financières a augmenté de 180 points de base, ressortant à 5,2 %, soit près de deux fois la hausse observée pour les ménages (graphique 1.10). Les hausses des taux débiteurs ont été plus rapides et plus importantes que lors des précédents épisodes de resserrement monétaire, reflétant principalement les relèvements plus rapides et de plus grande ampleur des taux directeurs intervenus depuis juillet 2022. La disparité des taux débiteurs entre les pays est restée contenue, signe que les modifications de la politique monétaire de la BCE se sont transmises sans heurt aux taux débiteurs dans l’ensemble de la zone euro.

Les prêts bancaires aux ménages et aux entreprises se sont nettement ralentis

Les prêts bancaires aux ménages et aux entreprises se sont nettement ralentis en 2023, sous l’effet du durcissement des conditions de crédit (graphique 1.11). Les flux nets mensuels de prêts ont été presque nuls au cours des trois derniers trimestres de l’année. Le taux de croissance annuel des prêts bancaires consentis aux ménages a fléchi, s’établissant à 0,3 % pour l’année, reflétant principalement le ralentissement des prêts hypothécaires dans un contexte de baisse des prix des logements pour la première année depuis 2014. Le taux de croissance annuel des prêts bancaires aux entreprises s’est également inscrit en recul, ressortant à 0,4 % en décembre et les flux nets de financement externe global vers les entreprises se sont situés à des points bas historiques (graphique 1.12).

Graphique 1.11

Croissance de M3 et croissance des crédits aux entreprises et aux ménages

(variations annuelles en pourcentage)

Source : BCE.
Notes : Les entreprises sont des sociétés non financières. Les dernières observations se rapportent à décembre 2023.

Graphique 1.12

Flux nets de financement externe vers les entreprises

(flux annuels en milliards d’euros)

Sources : BCE et Eurostat.
Notes : Les entreprises sont des sociétés non financières. IFM : institutions financières monétaires. Dans la rubrique « prêts des non‑IFM et du reste du monde », les institutions financières non monétaires comprennent les autres intermédiaires financiers, les fonds de pension et les sociétés d’assurance. Les rubriques « prêts des IFM » et « prêts des non-IFM et du reste du monde » sont corrigées des cessions de prêts et de la titrisation. La rubrique « Autre » correspond à la différence entre le total et les instruments inclus dans le graphique et comprend essentiellement les prêts interentreprises et les crédits commerciaux. Les dernières observations se rapportent au troisième trimestre 2023. Le flux annuel pour 2023 est calculé comme la somme sur quatre trimestres des flux du quatrième trimestre 2022 au troisième trimestre 2023.

Encadré 1
Les implications macroéconomiques du changement climatique

La BCE s’efforce de mieux comprendre les conséquences macroéconomiques du changement climatique et des politiques visant à atténuer ses effets, conformément aux engagements pris à la suite de l’évaluation de la stratégie de politique monétaire de 2020-2021 [11]. Ces efforts sont particulièrement pertinents au regard du principal mandat de la BCE, qui est de maintenir la stabilité des prix. La complexité du changement climatique ainsi que la nature non linéaire et très incertaine de ses effets nécessitent une analyse macroéconomique approfondie pour limiter les erreurs de prévision et comprendre les changements structurels que le changement climatique entraîne dans l’économie.

Le changement climatique affecte déjà l’inflation dans la zone euro. Selon les estimations d’une étude de la BCE, la chaleur extrême de l’été 2022 a accentué la hausse des prix des produits alimentaires en Europe d’environ 0,7 point de pourcentage après un an, c’est-à-dire en 2023 (graphique A) [12]. La hausse des prix des services peut également être affectée par des étés plus chauds, éventuellement via l’impact sur les prix des produits alimentaires et la sensibilité à la température des services liés au tourisme [13]. L’impact de la hausse des températures estivales sur l’inflation pourrait être plus important dans un climat plus chaud : une vague de chaleur comparable à celle de 2022 se produisant sous le climat de 2035 pourrait, dans un scénario pessimiste, augmenter la hausse moyenne des prix des produits alimentaires de 1 point de pourcentage. Dans un scénario optimiste, l’effet d’une vague de chaleur similaire ne serait qu’un peu moins grave (0,8 point de pourcentage). La hausse des températures aura un impact plus important sur les régions déjà plus chaudes. Cela implique des effets différents sur l’inflation selon les pays de la zone euro, ce qui constituerait un vrai défi pour la transmission d’une politique monétaire unique.

Graphique A

Impact croissant des vagues de chaleur sur la hausse des prix des produits alimentaires en Europe

(année de vague de chaleur, points de pourcentage)

Source : Kotz et al. (cf. la note de bas de page no 12).
Notes : Impacts estimés par une approche basée sur une régression en données de panel au niveau mondial, en utilisant des prix mensuels et des données climatiques à haute résolution. Les barres montrent l’écart cumulé de la hausse des prix des produits alimentaires par rapport au scénario de référence des projections après 12 mois en raison des températures extrêmes de juin, juillet et août. Le graphique est basé sur la combinaison des élasticités d’une hausse des températures de 1° C avec les résultats de 21 modèles climatiques mondiaux. Les températures sont basées sur un été équivalent à celui de 2022 (c’est-à-dire dans la queue supérieure de la distribution des températures sur la base des climats futurs projetés) et sont extraites des résultats des modèles climatiques dans le cadre d’un scénario d’émissions optimiste (dans lequel la hausse des températures mondiales serait inférieure à 2° C en 2100) et d’un scénario pessimiste (dans lequel les émissions augmenteraient tout au long du siècle à venir). Les impacts pourraient être réduits grâce à une adaptation ambitieuse à des climats plus chauds.

Les évènements météorologiques extrêmes réduisent généralement la production à court terme, mais l’impact économique total s’étend au-delà des effets directs et immédiats qui résulteraient, par exemple, de la destruction de maisons, d’usines et de machines. Il s’agit par exemple de perturbations dans d’autres régions ou secteurs par le biais des liens entre les chaînes d’approvisionnement ou de la dégradation d’infrastructures. Les pertes de revenus dans les secteurs affectés et la baisse de production réduisent généralement la demande de produits et services d’autres secteurs. Autre effet, la hausse de l’incertitude pourrait amener les ménages et les entreprises à réévaluer leurs points de vue sur le risque de désastre et donc entraîner une baisse des dépenses.

Sur des horizons plus longs, le changement climatique peut également réduire la croissance de la production de façon plus persistante [14]. Par exemple, la diminution de l’enneigement menacera la viabilité de nombreux domaines skiables en Europe, et certaines régions méditerranéennes pourraient devenir trop chaudes pour le tourisme estival ; cette évolution pouvant cependant s’avérer bénéfique pour les régions les plus septentrionales. Les rendements de l’agriculture et de la sylviculture seront probablement réduits par des températures moyennes plus élevées. Même si les changements de cultures peuvent atténuer certains de ces effets, les températures moins prévisibles et les cycles de précipitations seront également susceptibles de peser sur la production agricole. La hausse des températures au-dessus de la zone de confort d’environ 19-22° C – ce qui pourrait se produire plus fréquemment sous un climat plus chaud – réduit la productivité des travailleurs.

L’adaptation, c’est-à-dire l’ajustement à des climats plus chauds, pourrait contribuer à limiter les impacts macroéconomiques. Cela inclut, par exemple, l’installation de la climatisation pour réduire l’impact du stress thermique sur la productivité du travail ou la réorientation vers d’autres cultures pour limiter les pertes de productivité agricole. Toutefois, ces mesures auront probablement des répercussions sur les budgets publics et la marge de manœuvre budgétaire [15]. L’assurance constitue un autre outil pour l’adaptation, mais il existe déjà un important déficit de couverture assurantielle pour le climat en Europe [16].

Pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de l’Accord de Paris et éviter un réchauffement climatique plus catastrophique, une transformation structurelle de l’économie de grande ampleur est nécessaire. Le capital et le travail doivent être réalloués d’un secteur à l’autre et au sein des secteurs, même au sein des entreprises individuelles (par exemple, les constructeurs automobiles devront réorienter leurs usines de la fabrication de véhicules thermiques vers celle de véhicules électriques à batterie). La réussite de cette réallocation dépendra de la mise en œuvre de politiques de transition efficaces ; de la flexibilité des marchés et en particulier de la capacité de l’économie à financer et à absorber les importants investissements en capital nécessaires ; de l’évolution des technologies de décarbonation et de la disponibilité de la main-d’œuvre qualifiée pour les appliquer.

Les analyses suggérant un impact économique favorable des mesures de politique climatique introduites à ce jour ne dressent probablement pas un tableau d’ensemble de la situation [17]. Les évaluations fondées sur un modèle disponibles pour les trajectoires de prix du carbone ne montrent qu’un effet limité sur la production et l’inflation [18]. Toutefois, les mesures incluses sont encore loin d’atteindre l’objectif de l’UE de réduction des émissions, et l’impact plus large de la transition – y compris les effets d’une réglementation et d’objectifs renforcés – peut être moins facile à quantifier.

La vitesse de la transition affecte considérablement l’impact économique final : retarder la transition nécessitera des changements politiques plus rapides et plus radicaux par la suite, augmentant la probabilité d’actifs échoués et d’une hausse du chômage structurel [19]. De plus, les différentes politiques de transition n’ont pas toutes le même impact sur la productivité [20]. Les politiques fondées sur le marché – telles que les taxes carbone – ont moins d’impact sur la productivité des entreprises à forte intensité en carbone que les politiques non fondées sur le marché (telles que l’interdiction de certains produits ou processus).

La compétitivité de l’économie de la zone euro est également affectée par les choix en matière de politiques de transition au niveau mondial. Elles incluent la hausse du prix du carbone ainsi que les politiques industrielles telles que le récent Inflation Reduction Act aux États-Unis. Le système d’échange de quotas d’émission de l’UE (SEQE-UE) peut déclencher des « fuites de carbone », c’est-à-dire la relocalisation de l’activité économique et des émissions dans des régions où les exigences en matière d’émissions sont moins strictes. Ce phénomène peut être réduit en calibrant conjointement avec soin le « mécanisme d’ajustement carbone aux frontières » et les mécanismes existants de prévention des fuites de carbone [21].

Dans l’ensemble, le changement climatique et les politiques d’atténuation affectent presque tous les aspects de l’analyse macroéconomique réalisée par les banques centrales. Des questions clés restent en suspens, notamment en ce qui concerne la façon dont la transition devrait se dérouler et les changements structurels qui en résulteront pour l’économie, l’impact macroéconomique des conditions météorologiques extrêmes et les risques liés à l’accélération du changement climatique, ainsi que le rôle du capital naturel et des services écosystémiques.

Encadré 2
Le rôle des profits unitaires dans les tensions actuelles sur les prix intérieurs

Cet encadré se concentre sur la manière dont les profits unitaires ont contribué, d’un point de vue comptable, à la dynamique des tensions sur les prix intérieurs en 2023.

Les tensions sur les prix intérieurs ont été très fortes en 2023, mais se sont légèrement atténuées au cours de l’année, les profits unitaires ayant diminué.

La croissance du déflateur du PIB, qui affiche un important co-mouvement avec la hausse de l’IPCH hors énergie et produits alimentaires (IPCHX), peut être décomposée entre les contributions des coûts unitaires de main-d’œuvre, des profits unitaires et des impôts unitaires (moins les subventions) (graphique A) [22], [23]. La croissance annuelle du déflateur du PIB a continué de s’accélérer nettement en 2023, atteignant une moyenne de 6,0 % contre 4,7 % en 2022. Ce résultat contraste avec un taux moyen de 1,6 % sur la période comprise entre 1999 et 2021. À partir d’un point haut historique à 6,4 % au premier trimestre 2023, le taux de croissance a commencé à se modérer pour s’établir à 5,3 % au quatrième trimestre. Les profits unitaires ont contribué sur plusieurs trimestres en 2022 et 2023 à la forte hausse du déflateur du PIB, représentant environ la moitié ou plus de son taux de croissance élevé. Par comparaison, la contribution moyenne était légèrement supérieure à un tiers sur la période comprise entre 1999 et 2019. La contribution des profits unitaires a ensuite fortement diminué en 2023, contribuant à contrebalancer les augmentations de la contribution des coûts unitaires de main-d’œuvre sur la période.

Graphique A

Déflateur du PIB et contributions

(variations annuelles en pourcentage ; contributions en points de pourcentage)

Sources : Eurostat et calculs de la BCE.

Les évolutions économiques exceptionnelles après la pandémie expliquent la forte croissance des profits unitaires en 2022 et début 2023.

Les profits unitaires évoluent généralement en corrélation étroite avec les évolutions des indicateurs conjoncturels tels que le PIB en volume. En outre, ils sont généralement affectés par les fortes variations des termes de l’échange, par exemple des fluctuations importantes des prix à l’importation ou de ceux du pétrole. Ces caractéristiques reflètent le fait que, quand la demande est plus soutenue que la production potentielle, il est plus facile pour les responsables de la fixation des prix d’augmenter les prix et les profits unitaires sans perdre de parts de marché, tandis que lors de chocs sur les coûts des intrants, liés par exemple aux prix de l’énergie, les profits sont généralement utilisés, au moins temporairement, pour éviter de répercuter l’intégralité de la hausse des coûts sur les prix de vente. Le ralentissement économique observé en 2022 et 2023, dans la mesure où il a résulté de la baisse de la demande par rapport à l’offre, ainsi que la détérioration marquée des termes de l’échange en 2022 liée à la forte hausse des prix des importations auraient par conséquent tous deux reflété des évolutions des profits unitaires plus faibles que celles qui ont été observées (graphique B). Cela suggère que d’autres mécanismes et des facteurs plus exceptionnels peuvent avoir joué durant cette période. Les déséquilibres entre l’offre et la demande dans de nombreux secteurs économiques ont constitué l’une des sources de la vigueur des profits unitaires pendant ces années. Même si les perturbations des chaînes d’approvisionnement durant la pandémie ont provoqué des contraintes d’offre généralisées, les mesures gouvernementales financées par la dette ont limité l’impact du ralentissement de la croissance sur les revenus disponibles et contribué à un niveau élevé d’épargne. Cette épargne et la demande latente associée ont dopé la demande dans de nombreux secteurs à la suite de la réouverture après les confinements. Dans un tel environnement caractérisé par une demande agrégée importante par rapport à l’offre, les hausses prononcées des coûts des intrants peuvent conduire les responsables de la fixation des prix à augmenter leurs prix sans nécessairement modifier leur stratégie de fixation des marges commerciales. Cela implique une transmission des coûts des intrants et une contribution significative des profits unitaires aux tensions sur les prix intérieurs, comme observé récemment [24].

Graphique B

Profits unitaires, PIB en volume et déflateur des importations

(variations annuelles en pourcentage)

Sources : Eurostat et calculs de la BCE.
Note : Les dernières observations se rapportent au quatrième trimestre 2023.

Les facteurs exceptionnels s’estompant, les profits unitaires se sont réalignés avec le cycle économique et leur rôle classique d’amortisseur

Avec l’atténuation des déséquilibres entre l’offre et la demande après la pandémie et le ralentissement significatif des tensions sur l’énergie et sur les autres coûts des intrants en 2023, la croissance des profits unitaires a commencé à se ralentir et à revenir progressivement à des niveaux plus normaux. La dissipation des déséquilibres offre-demande a rendu plus difficile d’augmenter les marges sans perdre des parts de marché et a contribué à des hausses plus contenues des profits unitaires. L’évolution de l’environnement vers des tensions plus modérées sur les coûts des intrants a permis une modération de la dynamique des prix de vente. Cela signifie que la croissance des profits unitaires devrait se ralentir même si les entreprises conservent leur approche en matière de répercussion des coûts des intrants et de fixation des marges commerciales. En outre, grâce à la diminution des tensions sur les coûts des intrants, il peut avoir été plus facile pour les entreprises d’amortir les tensions sur les coûts de main-d’œuvre. Les évolutions plus faibles des profits unitaires sont également cohérentes avec une conjoncture économique relativement atone en 2023. Globalement, les profits unitaires semblent avoir renoué avec leur rôle classique d’amortisseur, contrebalançant une transmission plus importante aux prix intérieurs des tensions élevées sur les coûts unitaires de main-d’œuvre.

2 La politique monétaire en territoire restrictif

En 2023, la BCE a continué d’augmenter les taux directeurs et de les maintenir à des niveaux suffisamment restrictifs pour assurer un retour au plus tôt de l’inflation vers la cible de 2 % à moyen terme. Au cours des neuf premiers mois de l’année, elle a relevé les taux de 200 points de base, portant le taux de la facilité de dépôt à 4 %, les tensions inflationnistes exceptionnellement fortes liées aux coûts élevés de l’énergie s’étendant à l’ensemble de l’économie. Les prix élevés des produits alimentaires ont également constitué un facteur contributif important. De plus, bien qu’en diminution, les effets des goulets d’étranglement au niveau de l’offre et de la demande latente liée à la levée des restrictions dues à la pandémie ont continué de pousser les prix à la hausse, et la croissance des salaires s’est affermie. Les décisions de la BCE ont reflété une approche s’appuyant sur les données et se sont fondées sur l’évaluation des perspectives d’inflation à moyen terme compte tenu des données économiques et financières disponibles, de la dynamique de l’inflation sous-jacente et de la force de la transmission de la politique monétaire. Au cours de l’année, les informations disponibles ont montré de façon croissante que le resserrement de la politique monétaire se transmettait de manière vigoureuse à l’économie. En outre, les données disponibles relatives à l’inflation indiquaient que le processus de désinflation, ressortant notamment de la baisse des mesures de l’inflation sous-jacente, continuait de progresser. Enfin, le Conseil des gouverneurs a décidé de laisser les taux directeurs de la BCE inchangés lors de ses réunions d’octobre et de décembre.

Le bilan de l’Eurosystème a continué de se contracter dans le cadre de la normalisation de la politique monétaire entamée en 2022 et ce en dépit de la contribution supplémentaire de 45 milliards d’euros apportée par le bilan de la Banque nationale de Croatie (Hrvatska narodna banka) à la suite de l’adoption de l’euro par la Croatie le 1er janvier 2023. Le bilan de l’Eurosystème a atteint 6 900 milliards d’euros en fin d’année, soit une baisse de plus de 1 000 milliards en un an et de près de 2 000 milliards par rapport à son point haut de mi-2022. Cette diminution a principalement résulté de l’arrivée à échéance et des remboursements anticipés des fonds à long terme empruntés par les banques dans le cadre de la troisième série d’opérations de refinancement à plus long terme ciblées (TLTRO III) et a été favorisée par la fin des deux phases de réinvestissement total et partiel dans le cadre du programme d’achats d’actifs (APP), au cours des périodes débutant en mars et en juillet respectivement. En décembre 2023, le Conseil des gouverneurs a décidé d’avancer la normalisation du bilan de l’Eurosystème, exprimant son intention d’abandonner progressivement, à compter de juillet 2024, les réinvestissements réalisés dans le cadre du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (pandemic emergency purchase programme, PEPP). En 2023, après l’annonce de décembre 2022, l’Eurosystème a travaillé à la révision de son cadre opérationnel pour le pilotage des taux d’intérêt à court terme, qui s’est achevée en mars 2024.

De plus, en 2023, la BCE a poursuivi la suppression progressive, initiée en 2022, de ses mesures d’assouplissement des garanties introduites en réponse à la pandémie, et la notation de crédit de la République hellénique a été relevée au niveau bien notée (investment-grade). Tout au long de 2023, l’Eurosystème a mis l’accent sur la gestion des risques afin de garantir une mise en œuvre efficace de la politique monétaire, notamment en diversifiant les sources d’évaluation du crédit acceptées. Les taux d’intérêt directeurs ayant été relevés pour réduire l’inflation, la BCE a enregistré des pertes liées aux revenus d’intérêts négatifs, qui ont été en partie compensées par les coussins financiers constitués antérieurement. Le revenu monétaire de la BCE devrait à nouveau augmenter à l’avenir, ce qui renforcera son efficacité opérationnelle.

2.1 Poursuite d’une politique monétaire restrictive afin de ramener l’inflation à la cible de 2 %

En janvier, l’inflation se situait encore à 8,6 %, tandis que l’économie continuait de bien résister malgré des défis croissants

Début 2023, la croissance économique a stagné dans la zone euro, après une décélération marquée depuis mi-2022. Toutefois, l’économie montrait des signes de résilience face aux défis importants liés à l’atonie de l’activité économique mondiale, aux incertitudes géopolitiques en raison de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine et à l’inflation élevée parallèlement à un durcissement des conditions de financement. L’inflation totale a fléchi en janvier, en raison de la baisse des prix de l’énergie, demeurant cependant élevée à 8,6 %, compte tenu également des prix élevés des produits alimentaires. Cette évolution a résulté en partie de l’impact généralisé des coûts élevés de l’énergie dans l’ensemble de l’économie, qui a également influencé les prix des produits alimentaires, conjugué à la persistance de facteurs – même s’ils se dissipent – liés à la pandémie, tels que les perturbations des chaînes d’approvisionnement et la demande latente. La croissance des salaires s’est également redressée.

Le Conseil des gouverneurs a relevé les taux directeurs en février et exprimé son intention de continuer à le faire

Compte tenu des perspectives d’inflation à moyen terme, le Conseil des gouverneurs a réaffirmé son intention de maintenir une politique monétaire restrictive et a relevé les trois taux directeurs de la BCE de 50 points de base lors de sa réunion de février. Il a également déclaré qu’il avait l’intention de relever les taux d’intérêt de 50 points de base supplémentaires lors de sa réunion de mars et qu’il évaluerait ensuite la trajectoire future de la politique monétaire. Le Conseil des gouverneurs est resté déterminé à relever les taux d’intérêt à un rythme régulier pour les porter à des niveaux suffisamment restrictifs afin d’assurer un retour au plus tôt de l’inflation vers sa cible de 2 % à moyen terme. Le maintien des taux d’intérêt à des niveaux restrictifs devrait progressivement réduire l’inflation en freinant la demande et en prévenant tout mouvement à la hausse durable des anticipations d’inflation.

Lors de sa réunion de février, le Conseil des gouverneurs a également fixé les modalités de la réduction des titres détenus par l’Eurosystème dans le cadre de l’APP. Cela fait suite à sa décision de décembre 2022 de ne plus réinvestir intégralement les remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance à partir de mars, afin que le portefeuille APP diminue de 15 milliards d’euros par mois en moyenne entre mars et juin 2023, le rythme de réduction ultérieur devant être déterminé plus tard. Les réinvestissements en obligations d’entreprises seraient orientés plus nettement vers les émetteurs affichant de meilleures performances climatiques. Tout en restant axée sur l’objectif de stabilité des prix de la BCE, cette stratégie visait à mieux tenir compte du risque financier lié au climat dans le bilan de l’Eurosystème et à décarboner progressivement les avoirs en obligations d’entreprises, conformément à l’objectif secondaire de la BCE de soutenir les politiques économiques générales dans l’UE, qui incluent des efforts visant à atténuer l’impact du changement climatique (cf. encadré 8).

Les turbulences dans le secteur bancaire américain ont alimenté l’incertitude en Europe, soulignant la nécessité d’une approche s’appuyant sur les données pour les décisions relatives aux taux d’intérêt

En mars, dans un contexte de turbulences dans le secteur bancaire aux États-Unis et en Suisse, les tensions sur les marchés financiers se sont fortement accrues et ont renforcé l’incertitude relative aux perspectives de croissance et d’inflation dans la zone euro. En outre, les projections macroéconomiques de mars établies par les services de la BCE prévoyaient des niveaux d’inflation durablement élevés, en particulier pour l’inflation hors énergie et produits alimentaires, malgré une baisse attendue de l’inflation au cours des prochaines années. Avec la projection d’une inflation restant trop forte pendant une trop longue période, le Conseil des gouverneurs a décidé de relever les trois taux d’intérêt directeurs de la BCE de 50 points de base. De plus, l’incertitude accrue a souligné l’importance d’une approche fondée sur les données pour les décisions du Conseil des gouverneurs relatives aux taux directeurs. Celui-ci a par conséquent également clarifié sa « fonction de réaction », en expliquant que ses décisions relatives aux taux directeurs seraient guidées par trois critères : les perspectives d’inflation compte tenu des données économiques et financières disponibles, la dynamique de l’inflation sous-jacente et la vigueur de la transmission de la politique monétaire. Le Conseil des gouverneurs a également continué de suivre attentivement les tensions sur les marchés, se tenant prêt à prendre les mesures nécessaires pour préserver la stabilité des prix et contribuer à la stabilité financière dans la zone euro. Au cours des mois suivants, le secteur bancaire de la zone euro a bien résisté aux tensions en provenance de pays n’appartenant pas à la zone euro.

Il est devenu de plus en plus évident que la politique monétaire restrictive avait un impact significatif sur les conditions de financement dans la zone euro

À mesure que l’année avançait, il est devenu de plus en plus évident que la politique restrictive du Conseil des gouverneurs en matière de taux d’intérêt avait un impact significatif sur l’économie. Les hausses antérieures des taux se sont transmises vigoureusement aux conditions monétaires et de financement dans la zone euro – les premières phases du mécanisme de transmission – et ont progressivement exercé des effets sur l’ensemble de l’économie, même si les délais et la vigueur de la transmission à l’économie réelle demeuraient incertains. En avril, les taux d’emprunt pour les entreprises et les prêts hypothécaires ont atteint leurs niveaux les plus élevés en plus d’une décennie. La baisse de la demande de crédit qui en a résulté, ainsi que le durcissement des critères d’octroi, ont entraîné un ralentissement progressif de la croissance des prêts. En juin, les banques ont également remboursé le montant le plus important au titre des fonds empruntés dans le cadre des TLTRO III, ce qui a entraîné une baisse significative de l’excédent de liquidité. Cette réduction n’a pas entravé la transmission harmonieuse des modifications des taux directeurs aux taux sans risque sur les marchés monétaires, même si une asymétrie est apparue s’agissant de la réaction de l’écart entre le taux à court terme de l’euro (€STR) et le taux de la facilité de dépôt de la BCE. Le spread ne s’est pas resserré avec la réduction de la liquidité, alors qu’il s’était élargi lorsque la liquidité avait augmenté (cf. encadré 3).

Le Conseil des gouverneurs a continué de relever ses taux directeurs, les tensions sous-jacentes sur les prix demeurant élevées...

L’inflation totale a fortement diminué. Elle est revenue à 6,1 % en mai, contre 8,5 % en février, 6,9 % en mars et 7,0 % en avril. Toutefois, même s’il était prévu que l’inflation continue de se replier vers la cible, en grande partie sous l’effet du durcissement concomitant des conditions de financement freinant de plus en plus la demande, les anticipations prévoyaient toujours que les tensions sur les prix restent trop fortes trop longtemps. Le Conseil des gouverneurs a donc opté pour deux nouvelles hausses consécutives des taux d’intérêt de 25 points de base, en mai et en juin, respectivement.

...a interrompu les réinvestissements au titre de l’APP à compter de juillet...

Après la réduction de leur rythme en mars, juillet a marqué la fin des réinvestissements au titre de l’APP. Il était toujours prévu que les réinvestissements au titre du PEPP se poursuivent au moins jusqu’à fin 2024. Dans le même temps, les évolutions observées depuis la précédente réunion de politique monétaire du Conseil des gouverneurs ont conforté l’anticipation selon laquelle l’inflation reculerait encore sur le restant de l’année, mais demeurerait supérieure à la cible pendant une période prolongée. Sur cette base, le Conseil des gouverneurs a continué de relever les taux d’intérêt, de 25 points de base supplémentaires en juillet.

...et ramené la rémunération des réserves obligatoires à 0 %, améliorant l’efficacité de la politique monétaire

Le Conseil des gouverneurs a également décidé, en juillet, de ramener à 0 % la rémunération des réserves obligatoires précédemment fixée au taux de la facilité de dépôt. L’objectif de cette décision était de maintenir l’efficacité de la politique monétaire en gardant le contrôle sur l’orientation de la politique monétaire tout en assurant la transmission intégrale des décisions en matière de taux d’intérêt aux marchés monétaires. Elle a également amélioré l’efficacité de la politique monétaire en réduisant les charges d’intérêts globales liées aux réserves, tout en atteignant le même degré de restriction monétaire.

L’inflation ne montrant pratiquement aucun progrès en août par rapport au taux de 5,3 % enregistré en juillet et les perspectives d’inflation présentées dans les projections de septembre établies par les services de la BCE ayant été révisées à la hausse pour 2023 et 2024, principalement en raison d’une trajectoire plus élevée des prix de l’énergie, le Conseil des gouverneurs a de nouveau relevé les taux directeurs de la BCE de 25 points de base lors de sa réunion de septembre. La hausse cumulée sur 2023 est ainsi ressortie à 200 points de base et le taux de la facilité de dépôt à 4 % (graphique 2.1).

Graphique 2.1

Modifications des taux d’intérêt directeurs de la BCE

(en points de pourcentage)

Source : BCE.

...et a déclaré que le maintien des taux directeurs aux niveaux actuels pendant une durée suffisamment longue contribuerait fortement au retour au plus tôt de l’inflation à la cible

Toutefois, il était envisagé que l’économie demeure atone au cours des mois suivants, après avoir stagné au premier semestre de l’année. L’impact croissant des mesures de resserrement du Conseil des gouverneurs sur la demande intérieure, conjugué à un environnement difficile pour le commercial international, a conduit les services de la BCE à réviser nettement à la baisse leurs projections relatives à la croissance économique en septembre 2023. En outre, alors que les tensions sous-jacentes sur les prix persistaient à des niveaux élevés, la plupart des indicateurs ont commencé à fléchir et la trajectoire projetée de l’inflation hors énergie et produits alimentaires a également été légèrement révisée à la baisse. Sur la base de son évaluation actualisée, le Conseil des gouverneurs a également considéré que les taux d’intérêt directeurs de la BCE avaient atteint des niveaux qui, maintenus pendant une durée suffisamment longue, contribueraient fortement au retour au plus tôt de l’inflation au niveau de la cible.

Octobre a mis fin à la plus longue période de hausses consécutives des taux d’intérêt de l’histoire de l’euro

Après dix relèvements consécutifs, le Conseil des gouverneurs a décidé de laisser inchangés les taux directeurs de la BCE lors de sa réunion d’octobre. Depuis le début des hausses de taux en juillet 2022, la BCE a porté le taux de la facilité de dépôt de – 0,50 % à 4 % en septembre 2023. Même s’il était encore prévu que l’inflation reste durablement élevée en raison de fortes tensions d’origine interne sur les prix, elle a continué de diminuer nettement en septembre, revenant à 4,3 %. Cette baisse s’est accompagnée d’un fléchissement des mesures de l’inflation sous-jacente. Les risques géopolitiques accrus liés, à partir d’octobre, au conflit au Moyen-Orient ont également encore davantage souligné l’importance de l’approche du Conseil des gouverneurs fondée sur les données pour déterminer le niveau et la durée appropriés de la restriction appliquée dans ses taux directeurs.

L’inflation est revenue à 2,4 % en novembre

Vers la fin de l’année, l’inflation a continué de diminuer, pour s’établir à 2,4 % en novembre. Toutefois, lors de sa réunion de décembre, le Conseil des gouverneurs a estimé qu’elle repartirait probablement temporairement à la hausse à court terme, en raison d’effets de base. L’inflation sous-jacente a continué de ralentir. Les projections macroéconomiques des services de l’Eurosystème ont suggéré que l’inflation reprendrait sa baisse progressive en 2024. Dans le même temps, les tensions sur les prix intérieurs ont été considérées comme restant élevées, en raison principalement d’une croissance soutenue des coûts unitaires de main-d’œuvre.

Le Conseil des gouverneurs a maintenu ses taux inchangés et décidé d’avancer la normalisation du bilan de l’Eurosystème

Dans ce contexte, le Conseil des gouverneurs a décidé, lors de sa réunion de décembre, de laisser ses taux directeurs inchangés.

Il a également décidé en décembre d’avancer la normalisation du bilan de l’Eurosystème. Il a exprimé son intention de réinvestir, en totalité, les remboursements au titre du principal des titres du PEPP arrivant à échéance jusqu’à mi-2024, avant de réduire le portefeuille de 7,5 milliards d’euros par mois en moyenne jusqu’à la fin de l’année et de cesser les réinvestissements par la suite.

2.2 Les évolutions du bilan de l’Eurosystème à mesure que la politique monétaire continue de se resserrer

Le bilan de l’Eurosystème a été progressivement réduit, avec la fin des réinvestissements au titre de l’APP et l’arrivée à échéance des opérations TLTRO III

En 2023, le bilan de l’Eurosystème a poursuivi la réduction progressive commencée en 2022 avec la normalisation de la politique monétaire. Il a encore diminué avec la fin des phases de réinvestissement total et partiel de l’APP en février et juin, respectivement. Dans le cadre du PEPP, l’Eurosystème a poursuivi les réinvestissements en totalité tout au long de l’année. Fin 2023, le bilan était revenu à 6 900 milliards d’euros, principalement en raison de l’arrivée à échéance d’opérations TLTRO III, ainsi que de remboursements anticipés et, dans une certaine mesure également, du fait que le portefeuille de l’APP a commencé à être liquidé.

Fin 2023, les actifs liés à la politique monétaire figurant au bilan de l’Eurosystème s’élevaient à 5 100 milliards d’euros, soit une baisse de 1 200 milliards par rapport à fin 2022. Les prêts aux établissements de crédit de la zone euro représentaient 6 % du total des actifs (après 17 % fin 2022) et les actifs acquis à des fins de politique monétaire, 68 % du total des actifs (après 62 % fin 2022). Les autres actifs financiers figurant au bilan étaient principalement constitués d’avoirs en devises étrangères, d’or et de portefeuilles de titres libellés en euros autres que ceux détenus à des fins de politique monétaire.

Au passif, le montant global des avoirs de réserve des établissements de crédit et du recours à la facilité de dépôt est ressorti en baisse à 3 500 milliards d’euros fin 2023 (après 4 000 milliards fin 2022) et représentait 51 % du passif total (après 50 % fin 2022). Les billets en circulation sont restés pratiquement inchangés, à 1 600 milliards d’euros et représentaient 23 % du passif total (après 20 %).

En 2023, après l’annonce de décembre 2022, l’Eurosystème a travaillé à la révision de son cadre opérationnel pour le pilotage des taux d’intérêt à court terme, qui s’est achevée en mars 2024.

Graphique 2.2

Évolution du bilan consolidé de l’Eurosystème

(en milliards d’euros)

Source : BCE.
Notes : Les chiffres positifs se rapportent à l’actif et les chiffres négatifs au passif. La ligne de l’excédent de liquidité est présentée comme un chiffre positif bien qu’elle corresponde à la somme des rubriques suivantes du passif : excédent des avoirs en compte courant par rapport aux réserves obligatoires et recours à la facilité de dépôt.

L’adoption de l’euro par la Croatie le 1er janvier 2023 et l’intégration du bilan de la Banque nationale de Croatie (Hrvatska narodna banka) dans le bilan consolidé de l’Eurosystème a accru le total de ses actifs et de ses passifs de 45 milliards d’euros.

Distribution des portefeuilles de l’APP et du PEPP selon les catégories d’actifs et les juridictions

Le retrait des programmes d’achats a été bien absorbé par les marchés

L’APP comprend quatre programmes d’achats d’actifs : le troisième programme d’achats d’obligations sécurisées (CBPP3), le programme d’achats de titres adossés à des actifs (ABSPP), le programme d’achats de titres du secteur public (PSPP) et le programme d’achats de titres du secteur des entreprises (CSPP). Le PEPP a été mis en place en 2020 pour faire face à la pandémie. Toutes les catégories d’actifs éligibles dans le cadre de l’APP le sont également dans le cadre du PEPP ; une dérogation aux exigences d’éligibilité a été temporairement accordée dans le cadre du PEPP pour les titres émis par la République hellénique [25].

En décembre 2021, le Conseil des gouverneurs a confirmé son intention d’amorcer la normalisation progressive de sa politique monétaire, en réduisant le rythme de ses acquisitions de titres pour le PEPP et, par la suite, l’APP. Le Conseil a annoncé la fin des achats nets d’actifs dans le cadre du PEPP et, en mars 2022, a donné une date de fin attendue pour les achats nets dans le cadre de l’APP. L’Eurosystème a mis fin aux achats nets dans le cadre du PEPP au 1er avril 2022 et a continué de réinvestir (en totalité) les remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance acquis dans le cadre du programme. Il a mis fin aux achats nets dans le cadre de l’APP au 1er juillet 2022 et a commencé à ne réinvestir (en totalité) que les remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance. Il a ensuite décidé de réduire les avoirs de l’Eurosystème dans le cadre de l’APP à un rythme mesuré et prévisible via le réinvestissement partiel des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance entre mars et juin 2023, garantissant ainsi le maintien d’une présence continue de l’Eurosystème sur le marché au titre de l’APP au cours de cette période. Enfin, le Conseil des gouverneurs a confirmé le 15 juin 2023 qu’il interromprait les réinvestissements dans le cadre de l’APP à partir de juillet 2023. Pour le PEPP, les réinvestissements en totalité se sont poursuivis jusqu’à fin 2022 et tout au long de 2023. Le 14 décembre 2023, le Conseil des gouverneurs a annoncé son intention de poursuivre les réinvestissements, en totalité, des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance acquis dans le cadre du PEPP pendant le premier semestre 2024 et de réduire le portefeuille du PEPP de 7,5 milliards d’euros par mois en moyenne au second semestre 2024, avant d’interrompre les réinvestissements dans le cadre du PEPP à la fin de la même année. Les achats au titre des réinvestissements ont continué d’être réalisés sans heurt et conformément aux conditions de marché respectives en vigueur.

La taille du portefeuille de l’APP est demeurée stable pendant la phase de réinvestissement total, de juillet 2022 à février 2023. Pendant la phase de réinvestissement partiel, de mars à juin 2023, elle a baissé de 60 milliards d’euros, à un rythme moyen de 15 milliards d’euros par mois, avant le début de la liquidation intégrale en juillet 2023. Globalement, les détentions au titre de l’APP sont revenues de 3 254 milliards d’euros (au coût amorti) fin 2022 à 3 026 milliards d’euros fin 2023. Le PSPP constituait la part la plus importante de ces avoirs, avec 2 403 milliards d’euros, soit 79 % du total des avoirs détenus dans le cadre de l’APP à la fin de l’année. Dans le cadre du PSPP, les remboursements ont en général été réinvestis dans la juridiction dans laquelle les remboursements au titre du principal étaient attendus. De plus, quelques banques centrales nationales ont acheté des titres émis par des institutions supranationales de l’UE. Fin 2023, l’échéance moyenne pondérée des avoirs détenus dans le cadre du PSPP ressortait à 7,0 ans, avec quelques variations d’une juridiction à l’autre. L’ABSPP représentait moins de 1 % (13 milliards d’euros) du total des avoirs au titre de l’APP à la fin de l’année, le CBPP3 9 % (286 milliards) et le CSPP 11 % (324 milliards). Les achats d’obligations d’entreprises et d’obligations sécurisées ont été guidés par des classements comparatifs reflétant la capitalisation boursière de l’ensemble des obligations d’entreprises et des obligations sécurisées éligibles, respectivement. L’Eurosystème a continué d’orienter ses achats de titres du secteur des entreprises vers les émetteurs présentant de meilleures performances climatiques et a réalisé ses premières publications d’informations financières en matière de climat relatives aux détentions de titres d’entreprises dans le cadre du CSPP et du PEPP, ainsi que pour ses portefeuilles ne relevant pas de la politique monétaire – cf. section 11.5. Les achats de titres dans le cadre de l’APP ont été mis en œuvre sans heurt au premier semestre 2023. La phase de réinvestissement partiel et l’arrêt des achats ont été bien absorbés par les marchés financiers et n’ont pas causé de perturbations majeures.

Fin 2023, les avoirs au titre du PEPP s’élevaient à 1 700 milliards d’euros (au coût amorti). Les portefeuilles d’obligations sécurisées représentaient moins de 1 % (6 milliards d’euros) du total, les avoirs en titres du secteur des entreprises 3 % (46 milliards) et les avoirs en titres du secteur public 97 % (1 614 milliards) [26]. L’échéance moyenne pondérée des titres du secteur public détenus dans le cadre du PEPP est ressortie à 7,3 ans fin 2023, avec des différences d’une juridiction à l’autre.

Les remboursements de titres du secteur privé dans le cadre de l’APP et du PEPP ont représenté 80 milliards d’euros en 2023, tandis que les remboursements de titres du secteur public dans le cadre du PSPP et du PEPP ont représenté 438 milliards. Les réinvestissements dans le cadre de l’APP et du PEPP se sont établis à 36 milliards d’euros pour les titres du secteur privé et à 271 milliards pour les titres du secteur public. Étant donné les remboursements importants et inégalement répartis, les réinvestissements au titre du secteur public ont été lissés entre les différentes juridictions et dans le temps afin de garantir une présence régulière et équilibrée sur le marché, en tenant dûment compte de la formation des prix de marché et de considérations relatives au fonctionnement des marchés. Ce mécanisme de lissage a conduit à des écarts temporaires additionnels des avoirs au titre du PEPP relativement à une allocation conforme à la clef de répartition du capital de l’Eurosystème, mais ces écarts ont été largement inversés avant la fin de la période de lissage, qui correspond à l’année civile au cours de laquelle les remboursements interviennent.

Les actifs acquis dans le cadre du PSPP, du CSPP, du CBPP3 et du PEPP ont continué d’être mis à disposition à des fins de prêts de titres, en vue de soutenir la liquidité du marché obligataire et du marché repo. En 2023, les conditions sur le marché repo se sont nettement améliorées par rapport à l’année précédente, ce qui s’est reflété dans une baisse des volumes de prêts.

Évolutions des opérations de refinancement de l’Eurosystème

Fin 2023, l’encours des opérations de refinancement de l’Eurosystème s’élevait à 410 milliards d’euros, soit une baisse de 914 milliards par rapport à fin 2022. Cette variation reflète principalement les remboursements volontaires anticipés (312,5 milliards d’euros) et l’arrivée à échéance d’opérations (612,9 milliards) dans le cadre de la série des TLTRO III. L’échéance moyenne pondérée des opérations de refinancement en cours de l’Eurosystème a diminué, revenant d’environ 10,5 mois fin 2022 à 5,2 mois fin 2023.

Levée progressive des mesures d’assouplissement des garanties prises en réponse à la pandémie

En mars 2022, la BCE a annoncé la levée progressive des mesures d’assouplissement des garanties introduites en réponse à la pandémie. Ces mesures constituaient un élément essentiel des mesures de politique monétaire prises par la BCE pour faire face à la pandémie, facilitant l’accès des contreparties aux opérations de crédit de l’Eurosystème en augmentant le volume des garanties éligibles. Les mesures portaient essentiellement sur la réduction temporaire des décotes sur l’ensemble des catégories d’actifs dans une proportion fixe de 20 % et sur l’élargissement temporaire des dispositifs relatifs aux créances privées additionnelles (additional credit claim, ACC) mis en œuvre par certaines banques centrales nationales.

La suppression progressive a commencé en juillet 2022. Dans une deuxième étape, qui est entrée en vigueur le 29 juin 2023, la réduction temporaire des décotes sur les actifs négociables et non négociables a été totalement supprimée par la mise en œuvre d’un nouveau barème de décote, marquant ainsi le retour au niveau pré-pandémique de tolérance au risque de la BCE pour les opérations de crédit [27].

Une troisième étape de la levée progressive des mesures d’assouplissement des garanties prises en réponse à la pandémie sera un examen complet des dispositifs ACC. Certaines banques centrales nationales ont mis fin à leurs dispositifs ACC soit en intégralité soit en partie courant 2023 ou avant [28]. En novembre 2023, la BCE a annoncé la fin de l’éligibilité des titres de créance à court terme comme garantie conformément à l’orientation relative à des mesures temporaires concernant l’éligibilité des garanties [29], ainsi que de certains éléments spécifiques des dispositifs ACC. De plus, la BCE a décidé de restaurer le seuil minimal de 25 000 euros pour les créances privées domestiques acceptées en garantie au plan domestique, ainsi que de prolonger la validité des dispositifs ACC avec les éléments qui ont été conservés, au moins jusqu’à fin 2024. Ces décisions seront mises en œuvre courant 2024.

En septembre 2023, la notation de crédit applicable à la République hellénique a été relevée de l’échelon 4 de qualité du crédit à l’échelon 3 sur l’échelle de notation harmonisée de l’Eurosystème (de BB+ à BBB-), positionnant tous les instruments de dette émis par l’administration centrale de la République hellénique au niveau investment grade (bien noté) [30]. Les titres de créance émis par l’administration centrale de la République hellénique, qui bénéficiaient auparavant d’une dérogation incluse dans l’orientation relative aux mesures temporaires concernant l’éligibilité des garanties sont donc, à compter de septembre 2023, soumises aux critères d’éligibilité du dispositif de garanties général.

Évolutions des actifs négociables éligibles et des garanties mobilisées

Le montant nominal des actifs négociables éligibles a augmenté de 1 200 milliards d’euros en 2023 pour atteindre un niveau de 18 300 milliards en fin d’année (graphique 2.3). Les titres des administrations centrales sont demeurés la catégorie d’actifs la plus importante (9 900 milliards d’euros). Les autres catégories d’actifs comprenaient les obligations d’entreprises (1 900 milliards d’euros), les obligations bancaires sécurisées (1 800 milliards) et les obligations bancaires non garanties (2 000 milliards). Les titres des administrations régionales (603 milliards d’euros), les titres adossés à des actifs (600 milliards) et les autres actifs négociables (1 400 milliards) représentaient chacun une fraction relativement faible de l’univers des actifs éligibles.

Graphique 2.3

Évolutions des actifs négociables éligibles

(en milliards d’euros)

Source : BCE.
Notes : Les valeurs des actifs sont des montants nominaux. Le graphique présente les moyennes des données de fin de mois pour chaque période.

Entre l’ajustement des taux d’intérêt applicables aux TLTRO III en novembre 2022 et fin 2023, les contreparties ont remboursé 80 % de leur encours de crédit, ce qui s’est accompagné d’une réduction importante des garanties mobilisées, de plus de 900 milliards d’euros (graphique 2.4). Après les remboursements anticipés réalisés entre novembre 2022 et janvier 2023, les contreparties ont démobilisé plus particulièrement les obligations d’État, qui ont un coût d’opportunité relativement élevé et peuvent être utilisés pour financer des opérations repo privées. De plus, elles ont démobilisé plus de 250 milliards d’euros d’obligations sécurisées et de titres adossés à des actifs en 2023. L’arrivée à échéance de l’opération TLTRO III en juin 2023 s’est également accompagnée d’une importante réduction des garanties mobilisées (environ 300 milliards d’euros), soit 60 % du crédit net remboursé ce jour-là. Toutefois, les deux tiers de cette baisse des garanties mobilisées sont dus à la levée progressive partielle des mesures d’assouplissement des garanties prises en réponse à la pandémie, en particulier la suppression progressive de certains pools d’ACC en France et l’annulation de la réduction restante de 10 % des décotes.

Graphique 2.4

Évolutions des garanties mobilisées

(en milliards d’euros)

Source : BCE.
S’agissant des garanties, les données présentées sont des moyennes de fin de mois pour chaque période, après valorisation et décotes. Concernant l’encours des crédits, les données quotidiennes sont utilisées.

2.3 Gérer les risques financiers liés aux instruments de politique monétaire

L’Eurosystème gère en permanence les risques financiers inhérents à la mise en œuvre de ses opérations de politique monétaire. Sa fonction de gestion des risques vise à parvenir à un équilibre entre risque et efficacité, c’est-à-dire à atteindre les objectifs de politique monétaire avec le minimum de risques possible [31].

Les pertes ont découlé d’inadéquations entre les actifs et les passifs en matière de sensibilité aux taux d’intérêt

La BCE a relevé ses taux directeurs plusieurs fois en 2023 afin de ramener l’inflation à la cible de 2 % à moyen terme fixée par le Conseil des gouverneurs. Cela a augmenté le coût du passif au bilan des banques centrales de l’Eurosystème, alors que le revenu généré par leurs portefeuilles de titres de l’APP et du PEPP, ainsi que par les TLTRO III, est demeuré faible. Cela s’est traduit par un revenu d’intérêt négatif, qui peut être partiellement couvert par les coussins financiers constitués au cours des années précédentes. Si ces coussins sont pleinement utilisés, toute perte restante est comptabilisée au bilan. Toutefois, ces pertes peuvent être compensées par les bénéfices futurs et n’affectent pas la capacité des banques centrales de l’Eurosystème à fonctionner efficacement. À terme, l’asymétrie entre les actifs et les passifs de l’Eurosystème devrait diminuer, ce qui améliorera son compte de résultat [32].

Les principales modifications du cadre de gestion des risques de l’Eurosystème en 2023 ont été une plus grande diversification de ses sources d’évaluation du crédit et une orientation plus nette des achats de titres du secteur des entreprises vers les émetteurs ayant une meilleure performance climatique.

Une plus grande diversification des sources d’évaluation du crédit

2023 a été marquée par l’acceptation de sources supplémentaires d’évaluation du crédit au sein du dispositif d’évaluation du crédit de l’Eurosystème (Eurosystem Credit Assessment Framework, ECAF). L’ECAF est un cadre de gestion des risques utilisé par l’Eurosystème pour atténuer le risque de crédit des actifs utilisés dans les opérations de politique monétaire. Il définit les procédures, règles et techniques qui garantissent que l’exigence, par l’Eurosystème, de normes élevées en matière de crédit pour l’ensemble des actifs éligibles soit satisfaite en permanence. Cela implique l’évaluation, l’acceptation et le suivi de différents types de sources d’évaluation du crédit.

Le système interne d’évaluation du crédit de la Banque de Grèce a été accepté comme source d’évaluation du crédit

En avril 2023, le Conseil des gouverneurs a décidé d’accepter le système interne d’évaluation du crédit de la Banque de Grèce, qui fournit des évaluations des entités juridiques grecques du secteur non financier, comme source d’évaluation du crédit. Ces évaluations peuvent désormais être utilisées pour déterminer l’éligibilité des créances privées sur les sociétés non financières grecques en garantie des opérations de crédit de l’Eurosystème et les décotes qui leur sont appliquées. Le système interne d’évaluation du crédit de la Banque de Grèce est l’un des neuf systèmes d’évaluation du crédit de banque centrale nationale actuellement acceptés par le Conseil des gouverneurs.

Scope Ratings GmbH est agréé comme nouvelle agence externe de notation du crédit

En novembre, le Conseil des gouverneurs a décidé d’agréer Scope Ratings GmbH comme nouvel organisme externe d’évaluation du crédit (external credit assessment institution, ECAI), après une évaluation approfondie par l’Eurosystème de la candidature de cette entreprise sur la base des critères d’agrément de l’Eurosystème pour les ECAI. L’évaluation a pris en considération des critères quantitatifs et qualitatifs, ainsi que tout commentaire pertinent formulé par l’Autorité européenne des marchés financiers (European Securities and Markets Authority, ESMA) en matière de supervision bancaire. Les notations fournies par Scope Ratings seront utilisées avec les notations des ECAI déjà agréées (DBRS Morningstar, Fitch Ratings, Moody’s et S&P Global Ratings) pour déterminer l’éligibilité des actifs acceptés en garantie des opérations de politique monétaire et les décotes qui leur seront appliquées une fois achevé le processus d’intégration de Scope Ratings au sein de l’infrastructure informatique de l’Eurosystème.

Gérer les risques liés aux achats d’actifs réalisés dans le cadre de l’APP et du PEPP

Les risques financiers liés aux achats d’actifs ont continué d’être gérés sur la base de cadres de contrôle des risques spécifiques à chaque classe d’actifs

En 2023, le réinvestissement des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance a continué d’être mené aux fins de la politique monétaire dans le cadre du PEPP et, jusqu’à fin juin, dans le cadre de l’APP également. Les risques financiers liés à ces programmes sont gérés sur la base de cadres de contrôle des risques financiers spécifiques qui prennent en compte les objectifs de politique monétaire de chaque programme et les caractéristiques et les profils de risque des différents types d’actifs achetés. Les cadres comportent des critères d’éligibilité, des évaluations du risque de crédit et des procédures de diligence raisonnable, des cadres de valorisation, des portefeuilles de référence et des limites. Ils s’appliquaient aux achats nets d’actifs et continuent de s’appliquer au réinvestissement des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance, ainsi qu’aux avoirs détenus aussi longtemps qu’ils demeurent inscrits au bilan de l’Eurosystème. Les principaux éléments de ces cadres, tels que résumés dans le tableau 2.1 de la section 2.3 du Rapport annuel 2022 de la BCE, restent valides. S’agissant des titres du secteur des entreprises, l’Eurosystème a appliqué une orientation plus nette de ses réinvestissements des remboursements au titre du principal des titres arrivant à échéance vers des émetteurs ayant une meilleure performance climatique dès le début des réinvestissements partiels au titre de l’APP en mars 2023.

Encadré 3
L’évolution de l’excédent de liquidité et son impact sur le taux du marché des opérations non garanties en euros

Cet encadré analyse les effets de la réduction du bilan de l’Eurosystème sur le marché monétaire en euros. La contraction de l’excédent de liquidité résultant de la réduction du bilan n’a pas perturbé la transmission des modifications des taux d’intérêt directeurs de la BCE aux taux du marché monétaire des opérations en blanc. Toutefois, une asymétrie est apparue en 2023 dans la réaction du spread entre le taux à court terme en euros (€STR) et le taux de la facilité de dépôt de la BCE, qui a été moins sensible à la réabsorption de l’excédent de liquidité qu’à l’injection antérieure de liquidité. Une analyse préliminaire suggère que ce phénomène est probablement temporaire.

Le nouveau resserrement de la politique monétaire a réduit la liquidité

Le taux de la facilité de dépôt n’étant plus négatif et en raison du recalibrage des conditions pour les TLTRO III, l’excédent de liquidité s’est réduit, revenant de 4 400 milliards d’euros le 27 juillet 2022 à 3 300 milliards d’euros le 31 décembre 2023 (graphique A, partie a). Cette réduction, à hauteur de 1 100 milliards d’euros, résulte principalement du remboursement de 1 700 milliards d’euros empruntés par les banques dans le cadre des TLTRO III. L’arrivée à échéance des avoirs de l’Eurosystème détenus au titre du programme d’achats d’actifs (asset purchase programme, APP) a également contribué à cette baisse, les remboursements qui n’étaient pas réinvestis absorbant 300 milliards d’euros. À l’inverse, l’évolution des facteurs autonomes a permis de réinjecter 900 milliards d’euros de liquidités excédentaires dans le système, reflétant une réduction des dépôts ne relevant pas de la politique monétaire détenus par les clients institutionnels auprès de l’Eurosystème. Cette réduction s’est effectuée progressivement, après des ajustements de la rémunération de ces dépôts.

La diminution de la liquidité n’a pas réduit l’écart entre l’€STR et le taux de la facilité de dépôt

Les données historiques suggèrent qu’une baisse importante de l’excédent de liquidité devrait entraîner une réduction de l’écart entre l’€STR et le taux de la facilité de dépôt. Néanmoins, la diminution récente de l’excédent de liquidité n’a pas abouti à une compression de cet écart (graphique A, partie b), lequel s’est élargi jusqu’au second semestre 2022 puis stabilisé à près de – 10 points de base à partir de novembre 2022. Cette rupture par rapport aux profils historiques soulève la question de savoir s’il s’agit d’un phénomène temporaire ou d’une transformation structurelle.

Graphique A

Évolution de l’excédent de liquidité

a) Excédent de liquidité et composantes

b) Excédent de liquidité et écart €STR/taux de la facilité de dépôt

(en milliers de milliards d’euros)

(axe des abscisses : excédent de liquidité en milliers de milliards d’euros ; axe des ordonnées : écart en points de base)

Sources : BCE (base de données sur les opérations de marché), Bloomberg et calculs des services de l’Eurosystème.
Notes : Partie a) : le taux de la facilité de dépôt a été négatif jusqu’au 26 juillet 2022, puis il est passé de ‑0,50 % à 0,00 % le 27 juillet. Partie b) : le taux de la facilité de dépôt a été négatif du 1er octobre 2019 au 26 juillet 2022 (période couverte par ce graphique). Le taux de la facilité de dépôt a été égal à zéro du 27 juillet 2022 au 13 septembre 2022. Le taux de la facilité de dépôt est positif depuis le 14 septembre 2022, date à laquelle il a été relevé de 0,00 % à 0,75 %.

Déterminants

La désactivation effective du système à deux paliers pour la rémunération des réserves excédentaires des banques en juillet 2022 a permis de disposer de 1 000 milliards d’euros supplémentaires de liquidités excédentaires à des fins de négociation (graphique B, partie a). Pendant la période de taux négatifs et à la suite de l’introduction du système à deux paliers en octobre 2019, l’excédent de liquidité effectivement disponible à des fins de négociation était inférieur au montant total de l’excédent de liquidité, une partie de cet excédent détenu auprès de l’Eurosystème bénéficiant d’une rémunération favorable (c’est-à-dire qu’elle était exemptée de taux d’intérêt négatifs). La fin des taux d’intérêt négatifs en juillet 2022 a mis un terme à cet avantage. La libération de fonds négociables supplémentaires a soutenu, entre autres, les opérations des banques sur les dépôts à vue non garantis.

D’après l’ensemble de données relatif aux statistiques des marchés monétaires (money market statistical reporting, MMSR), les emprunts non garantis sont passés d’une moyenne quotidienne de 120 milliards d’euros pendant la période de taux négatif de la facilité de dépôt en 2021 et 2022 à 210 milliards d’euros fin 2023, cette hausse concernant l’ensemble des secteurs de contrepartie (graphique B, partie b). Le retour à des taux positifs et la fin du système à deux paliers ont ainsi entraîné une hausse notable de l’offre sur le compartiment des opérations en blanc.

Dans un contexte d’offre excédentaire, les banques ont bénéficié d’un pouvoir de marché plus important dans la négociation des taux d’intérêt avec leurs clients, comme cela apparaît clairement dans la plus grande dispersion de leurs contributions au calcul du €STR, la majorité tirant le taux vers le bas. Si les investisseurs fournissant des fonds ont privilégié les échéances courtes, car ils anticipaient une hausse des taux de la BCE, les banques n’ont montré que peu d’appétence pour ces échéances qui n’ont pas d’effet positif sur les mesures réglementaires de la liquidité tout en augmentant de façon coûteuse la taille totale de leur bilan. Les banques ont donc tendance à facturer une prime aux déposants pour compenser l’effet négatif de ces dépôts sur leur ratio de levier. Cette prime a exercé une pression à la baisse sur l’€STR, en particulier aux dates de déclaration trimestrielle et de fin d’année.

Graphique B

Activité de négociation

a) Excédent de liquidité négociable et écart €STR/taux de la facilité de dépôt

b) Emprunts non garantis par secteur de contrepartie

(échelle de gauche : excédent de liquidité en milliers de milliards d’euros ; échelle de droite : écart en points de base)

(en milliards d’euros)

Sources : BCE (base de données sur les opérations de marché, MMSR), Bloomberg et calculs des services de l’Eurosystème.
Notes : Partie a) : le taux de la facilité de dépôt a été négatif jusqu’au 26 juillet 2022, puis il est passé de ‑ 0,50 % à 0,00 % le 27 juillet. « Réserves exonérées » se réfère à la part de l’excédent de liquidité exemptée d’une rémunération négative au titre du système à deux paliers. Partie b) : le taux de la facilité de dépôt est positif depuis le 14 septembre 2022, date à laquelle il a été relevé de 0,00 % à 0,75 %. Le montant des transactions indiqué dans le graphique comprend tous les dépôts à vue à court terme en euros, les dépôts des sociétés non financières, les comptes de dépôt à vue rémunérés (call accounts) et d’autres emprunts résiduels d’une durée inférieure ou égale à un an. SNF : sociétés non financières. « Autre » se rapporte aux fonds d’investissement (à l’exception des fonds d’investissement monétaires), aux fonds de pension et aux caisses d’assurance, ainsi qu’aux secteurs résiduels.

L’absence de compression du spread pourrait être un phénomène temporaire

En conclusion, l’absence de compression du spread entre l’€STR et le taux de la facilité de dépôt pourrait être un phénomène temporaire car, dans un contexte d’offre excédentaire, les banques conservent leur pouvoir de marché pour négocier le prix des dépôts à court terme en vue de couvrir les effets sur les ratios réglementaires. Un réalignement de l’€STR et du taux de la facilité de dépôt pourrait encore avoir lieu à mesure que la baisse des niveaux de liquidités excédentaires se poursuivra, ce qui pourrait modifier l’équilibre des pouvoirs entre l’offre et la demande d’espèces.

3 Un secteur financier européen résilient, mais évoluant dans un environnement de stabilité financière fragile

Les banques de la zone euro se sont montrées résilientes en 2023, en particulier face aux faillites de banques aux États-Unis et en Suisse. Elles ont bénéficié des progrès réalisés sur plusieurs fronts, ainsi que de l’engagement prudentiel continu. L’environnement de la stabilité financière est néanmoins demeuré fragile, le durcissement des conditions financières affectant l’économie réelle et le secteur financier. Les autorités nationales ont continué à mettre en place les coussins macroprudentiels ou à les durcir pour accroître la solidité du secteur bancaire. De plus, les cadres réglementaires pour les banques ainsi que pour l’infrastructure et les innovations financières ont été renforcés afin d’accroître la résilience à long terme du système financier.

3.1 L’environnement de la stabilité financière en 2023

L’environnement de la stabilité financière dans la zone euro est resté fragile

L’environnement de la stabilité financière dans la zone euro est resté fragile en 2023, reflétant un ensemble de défis liés à l’inflation élevée, au durcissement des conditions financières, aux perspectives de croissance plus faibles et aux récentes tensions géopolitiques au Moyen-Orient qui s’ajoutent aux effets de la guerre actuelle menée par la Russie contre l’Ukraine. En mars 2023, les faillites de banques aux États-Unis et en Suisse ont déclenché un choc financier puissant mais finalement de courte durée, grâce à une action résolue des autorités qui a entraîné un déplacement rapide des préoccupations relatives à la stabilité financière vers d’autres questions, telles que les effets des taux d’intérêt élevés et les risques baissiers pesant sur la croissance. Le relèvement des taux directeurs de la BCE a continué de pousser progressivement à la hausse les coûts de financement dans tous les secteurs de l’économie. Toutefois, l’allongement des périodes de fixation des taux d’intérêt pour les prêts octroyés les années précédentes, ainsi que la résistance des marchés du travail et l’accumulation d’épargne, ont atténué les implications en termes de risque de crédit de la hausse des coûts d’emprunt pour les emprunteurs tout au long de l’année. De manière générale, la qualité des actifs des banques de la zone euro est restée solide, mais les pertes sur prêts des banques ont commencé à croître, bien qu’à partir de niveaux faibles, et les entités du secteur de l’intermédiation financière non bancaire ont continué de faire face à un risque de crédit élevé lié à un plus grand nombre de dégradations de notation de leurs portefeuilles d’obligations.

Les conditions financières se sont durcies et les coûts du service de la dette ont augmenté pour les ménages, les entreprises et les administrations publiques

Les emprunteurs souverains de la zone euro, ayant bénéficié des taux d’intérêt bas des années antérieures et soutenus par l’instrument de protection de la transmission de la BCE, ont observé une hausse généralisée des coûts de financement en 2023, avec une dispersion limitée entre pays au cours de l’année. Néanmoins, les gouvernements devant renouveler les dettes arrivant à échéance à des taux d’intérêt plus élevés, leurs coûts de financement demeurent sensibles à l’évolution des fondamentaux budgétaires, notamment au risque de dérapage budgétaire, qui pourrait raviver des craintes quant à la soutenabilité de la dette souveraine. Dans le même temps, toute dynamique injustifiée et désordonnée sur le marché de la dette souveraine peut être contrée par la flexibilité des réinvestissements dans le cadre du programme d’achats d’urgence face à la pandémie et par l’instrument de protection de la transmission de la BCE, si les conditions nécessaires sont réunies.

De même, avant et pendant la pandémie, le secteur des entreprises a profité de taux d’intérêt bas, et ses bénéfices se sont bien maintenus en 2023. Avec l’atténuation des effets liés à la reprise, le durcissement des conditions de crédit et la hausse des coûts du service de la dette, les vulnérabilités des entreprises se sont accrues. Bien que demeurant généralement peu nombreuses, les faillites d’entreprises ont commencé à augmenter pendant l’année. Les sociétés immobilières ont été particulièrement vulnérables, en raison du ralentissement du marché de l’immobilier commercial dans la zone euro.

En 2023, le secteur des ménages a fait face à une détérioration de sa capacité à assurer le service de la dette, en raison de la hausse des taux d’intérêt et de la correction sur les marchés de l’immobilier résidentiel. L’augmentation marquée des coûts d’emprunt depuis le début du cycle de resserrement de la politique monétaire a clairement eu un impact négatif sur la demande de prêts hypothécaires. Malgré cela, la robustesse du marché du travail et les contraintes sur l’offre de logements ont favorisé un ralentissement ordonné des marchés de l’immobilier résidentiel. Toutefois, les valorisations encore élevées suggèrent que des vulnérabilités pourraient se concrétiser si les corrections des prix devenaient désordonnées.

Les marchés financiers sont restés vulnérables aux mauvaises surprises

Abstraction faite des divers épisodes de volatilité observés en 2023, la fixation globale des prix sur les marchés financiers pendant l’année semblait s’appuyer sur des attentes optimistes quant aux perspectives macrofinancières et présentait donc une vulnérabilité à toute mauvaise surprise. Tandis que les primes de risque semblaient bien correspondre aux tendances historiques sur le marché des obligations d’entreprises, elles se sont nettement comprimées sur le marché des actions. La réaction inhabituellement modeste du cours des actions à la hausse des taux d’intérêt risquait d’exposer les actions à des réévaluations brutales, si les effets défavorables du ralentissement économique sur la rentabilité des entreprises s’avéraient plus importants qu’attendu par les investisseurs. En outre, le sentiment des marchés à l’égard du risque est resté très sensible à de nouvelles surprises concernant les perspectives d’inflation et de croissance et, par extension, la trajectoire de la politique monétaire.

Le ratio de fonds propres de base de catégorie 1 (CET1) des banques de la zone euro s’est établi à 15,6 % au troisième trimestre 2023, soit un taux proche de son plus haut niveau depuis le début de la supervision bancaire européenne et reflétant une rentabilité plus élevée et une réduction des risques dans les portefeuilles des banques. Des coussins de fonds propres et de liquidité solides ont contribué à préserver la confiance dans le système bancaire de la zone euro lorsque des tensions sont apparues à la suite des faillites de banques américaines et suisses en début d’année. En outre, le rendement des fonds propres des banques a continué d’augmenter pour atteindre 10,0 %, son niveau le plus haut depuis plus de dix ans, porté par l’accroissement des marges nettes d’intérêts, les rendements des actifs ayant augmenté plus rapidement que le coût de financement. Si les bénéfices des banques ont été soutenus par ces effets favorables, ils étaient menacés par trois vents contraires : a) le risque que la combinaison de l’inflation plus élevée, de la hausse des coûts du service de la dette et de la détérioration de l’environnement macroéconomique ait un effet négatif sur la qualité des actifs des banques, ce qui avait déjà commencé à se manifester avec les premiers signes d’une augmentation des taux de défaillance et des arriérés de paiement ; b) le durcissement des critères d’octroi de crédit pesant sur la demande de prêts, et les flux de nouveaux prêts reculant à leurs plus faibles niveaux depuis 2015 ; et c) une probable augmentation des coûts de financement, les taux de dépôt agrégés commençant à remonter – notamment pour les dépôts à terme – et le financement de marché commençant à se renchérir. Malgré ces défis, les résultats du test de résistance 2023 à l’échelle de l’UE mené par l’Autorité bancaire européenne (ABE) ont confirmé que les banques devraient rester résilientes face à des chocs défavorables graves.

Le secteur de l’intermédiation financière non bancaire est resté exposé aux risques de liquidité et de crédit

Le secteur de l’intermédiation financière non bancaire est resté relativement stable en 2023, observant des flux continus vers les fonds d’obligations souveraines et d’obligations d’entreprises de bonne qualité (investment-grade). Cela a favorisé une plus grande absorption de la dette émise par les États et par les entreprises. Dans le même temps, les entités du secteur de l’intermédiation financière non bancaire ont réduit activement leur exposition globale au risque de crédit pendant l’année grâce à un processus continu d’atténuation des risques, réorientant leurs portefeuilles d’investissement vers des actifs comparativement plus sûrs. Ils sont toutefois restés vulnérables au risque de crédit. En raison de la forte incertitude économique et du durcissement des conditions financières, ce secteur risquait de subir des moins-values de réévaluation résultant de dégradations de notation de ses portefeuilles d’obligations, ainsi que des défaillances. Il continuait également d’être exposé au risque de liquidité, les coussins de liquidité des fonds obligataires et actions demeurant bas dans le contexte du durcissement des conditions financières. De manière générale, les liquidités détenues par les différents compartiments du secteur restant limitées, le risque existait que des sorties soudaines de fonds d’investissement, des appels de marge importants ou des polices d’assurance devenues caduques mènent à des cessions forcées d’actifs. Les fonds d’investissement immobiliers étaient toujours particulièrement exposés à la réalisation des moins-values et aux sorties de fonds des investisseurs, compte tenu notamment des difficultés rencontrées par le secteur de l’immobilier commercial. L’instabilité de ce compartiment était particulièrement préoccupante, au vu de son importance pour le secteur immobilier et de son potentiel d’amplification des risques dans ce secteur.

Les banques, les fonds d’investissement et les assureurs de la zone euro ont de nouveau fait face à des défis soulevés par le changement climatique en 2023. Le cyber-risque a également nécessité un suivi attentif. La multiplication de catastrophes naturelles majeures résultant du changement climatique et le volume croissant des pertes associées ont en outre fait augmenter les primes d’assurance dans un contexte d’offre limitée d’assurances contre les risques liés au climat [33]. Cela a souligné le risque qu’une plus grande incidence des chocs climatiques exacerbe les problèmes de rentabilité que connaissent les assureurs non-vie et accentue les déficits de couverture assurantielle existants (la proportion de pertes économiques non couvertes par une assurance), avec un effet négatif possible sur la situation macroéconomique et la stabilité financière.

3.2 Politique macroprudentielle : préserver la résilience du secteur financier lorsque les conditions macrofinancières sont difficiles

Les autorités nationales ont continué à mettre en place les coussins macroprudentiels ou à les durcir

La BCE a pour mission d’évaluer les mesures macroprudentielles relatives aux fonds propres proposées par les autorités nationales pour les banques établies dans les pays participant au mécanisme de surveillance unique. Il est important de souligner qu’elle a le pouvoir d’appliquer des mesures plus strictes en matière de fonds propres, si nécessaire. La BCE a examiné attentivement les orientations de politique macroprudentielle nationales et n’a pas jugé nécessaire d’y recourir en 2023, plusieurs pays ayant déjà mis en œuvre de nouvelles mesures macroprudentielles ou durci les dispositifs existants afin de renforcer la résilience de leurs systèmes bancaires face à l’accumulation de vulnérabilités et de risques baissiers.

Préserver la résilience du système financier et promouvoir les mesures macroprudentielles ciblées

Les coussins macroprudentiels devraient être maintenus afin de préserver la résilience des banques en cas de détérioration des conditions du secteur bancaire

En 2023, les préoccupations en matière de stabilité financière ont porté sur les implications de la hausse des taux d’intérêt et sur les risques de baisse de la croissance. D’un point de vue macroprudentiel, le durcissement des conditions financières a entraîné un ralentissement continu du cycle financier, mais aucun risque systémique ne s’est concrétisé. Les positions de fonds propres des banques sont notamment restées solides, même si la marge de manœuvre en fonds propres varie selon les banques et les pays, et que les contraintes au niveau de l’offre de crédit ne sont pas liées aux exigences de fonds propres des banques. Pour la période à venir, les coûts plus élevés du service de la dette et la détérioration de l’environnement macroéconomique pourraient compromettre la capacité de remboursement du secteur non financier et amoindrir progressivement la qualité des actifs des banques. Cette situation, associée à la contraction du volume des prêts et à la hausse des coûts de financement, pourrait avoir une incidence négative sur la rentabilité et la résilience des banques.

Dans ce contexte, les autorités nationales ont continué à durcir leur politique macroprudentielle en 2023, de manière à renforcer la résilience des banques. Cela a été facilité par la rentabilité des banques et leur marge de manœuvre en fonds propres, qui sont restées élevées en moyenne malgré l’environnement macrofinancier difficile. Certaines autorités nationales ont activé le coussin de fonds propres contracyclique afin de remédier aux vulnérabilités liées à l’accumulation du risque de crédit et d’accroître la marge de manœuvre macroprudentielle sous la forme de coussins libérables. En 2023, huit pays ont introduit ou renforcé le coussin contracyclique, portant le nombre total de pays ayant mis en place ou annoncé un taux de coussin contracyclique positif à 14 en fin d’année. De plus, un total de 11 pays ont mis en place ou annoncé un coussin pour le risque systémique global ou sectoriel [34], tandis que les banques de dix pays ont observé une augmentation de leurs coussins de fonds propres pour les autres EIS, en partie du fait d’une méthodologie révisée des taux planchers de la BCE [35]. Enfin, 15 pays ont maintenu des mesures relatives aux emprunteurs pour éviter une prise de risque excessive des banques dans l’activité de prêts aux ménages.

La BCE a communiqué son analyse et ses avis sur les sujets relatifs à la politique macroprudentielle en 2023. Dans les chapitres relatifs à la politique macroprudentielle des numéros de mai et novembre de sa Financial Stability Review, elle souligne l’importance de préserver des coussins macroprudentiels en cas de détérioration des conditions du secteur bancaire [36]. Elle explique également pourquoi il est nécessaire que les mesures existantes relatives aux emprunteurs restent en vigueur et qu’elles continuent à agir comme des filets de sécurité structurels, afin de veiller à ce que les critères d’octroi de crédit ne se détériorent pas et que les emprunteurs restent résilients. Par ailleurs, elle suggère que la rentabilité élevée du secteur bancaire pourrait permettre à certains pays de mettre en œuvre de nouvelles hausses ciblées des coussins macroprudentiels, sous réserve d’éviter les effets procycliques. Enfin, la BCE a publié des avis expliquant pourquoi l’instauration de taxes exceptionnelles à la charge des établissements de crédit dans certains pays pourrait avoir des effets négatifs sur la stabilité financière [37].

L’expérience de la pandémie suggère que le rôle des coussins macroprudentiels libérables devrait être renforcé

La BCE a consacré un Macroprudential Bulletin à la possible mise en place d’un taux neutre positif sur le coussin contracyclique. De manière générale, l’expérience de la pandémie suggère que le rôle des coussins macroprudentiels libérables doit être renforcé, pour remédier efficacement aux chocs systémiques défavorables qui peuvent survenir indépendamment de la position d’un pays dans les cycles économique ou financier. Fin 2023, six pays avaient déjà mis en place ou annoncé des cadres pour la fixation d’un taux neutre positif [38]. Ces cadres étaient fondés sur des approches différentes, donnant lieu à des taux neutres positifs variés. À moyen terme, une approche plus harmonisée de la fixation des taux neutres positifs dans les pays de l’union bancaire semblerait souhaitable, car elle apporterait plus de cohérence et d’efficacité dans la prise de décision tout en permettant suffisamment de souplesse à l’échelle nationale. La BCE a réitéré son appel à créer un vaste ensemble de mesures pour remédier de manière globale aux vulnérabilités du secteur de l’intermédiation financière non bancaire. Ces mesures devraient tenir compte des cadres existants et reposer sur une forte coordination internationale.

La coopération avec le Comité européen du risque systémique

Le CERS a continué d’analyser les sources potentielles de risque systémique et a publié une recommandation sur l’immobilier commercial

En 2023, la BCE a apporté un soutien analytique, statistique, logistique et administratif au secrétariat du Comité européen du risque systémique (CERS). Elle a notamment co-présidé le groupe de travail sur les instruments (IWG), le groupe de travail sur l’analyse (AWG) et le groupe de travail sur les tests de résistance, ainsi que l’équipe de projet BCE/CERS sur le suivi du risque climatique. Elle a également co-présidé les équipes agiles placées sous l’autorité de l’AWG/groupe d’analyse macroprudentielle (MPAG) et de l’IWG/groupe de politique macroprudentielle (MPPG) et chargées d’évaluer l’incidence de l’inflation élevée et des hausses des taux d’intérêt sur la stabilité financière, ainsi que l’équipe agile AWG/MAPG chargée de la liquidité systémique.

Par ailleurs, la BCE a soutenu les travaux du CERS sur : a) les outils macroprudentiels pour la cyber-résilience [39] ; b) les implications systémiques et les mesures possibles concernant les crypto-actifs et la finance décentralisée [40] ; c) le suivi des vulnérabilités liées à l’intermédiation financière non bancaire [41] ; d) les mesures possibles pour remédier aux risques en matière de dette des entreprises et de fonds d’investissement immobiliers [42] ; e) les vulnérabilités dans le secteur de l’immobilier commercial, qui ont donné lieu à la publication d’une recommandation par le CERS [43] ; et f) les cadres macroprudentiels sur la gestion des risques liés au climat [44]. Des informations plus détaillées sont disponibles sur le site internet du CERS et dans ses rapports annuels.

3.3 Les activités microprudentielles visant à garantir la sécurité et la solidité des banques individuelles

Les banques sont restées robustes en raison des progrès réalisés au cours des dernières années et de l’engagement prudentiel continu

Malgré l’environnement macroéconomique difficile, les banques européennes sont restées robustes tout au long de 2023, notamment après les turbulences observées en mars, qui avaient été déclenchées par la faillite de quelques banques régionales américaines et qui ont atteint leur point culminant en Europe avec le rachat de Credit Suisse par UBS sous le contrôle des autorités suisses. Dans un exercice de collecte de données dédiées mené par la BCE et l’ABE, les banques ont déclaré 73 milliards d’euros de moins-values latentes nettes sur les titres de créance en valeur comptable. Ce montant a été considéré comme contenu par rapport aux chiffres déclarés aux États-Unis. L’amélioration de la qualité des actifs et de la rentabilité a permis aux banques de résister à un ralentissement économique sévère dans le scénario défavorable du test de résistance 2023 de la BCE. Cette résilience globale est attribuable aux efforts déployés par les banques au fil des années, à la diversification de leurs sources de financement et à leurs bonnes conditions de liquidité, ainsi qu’à l’engagement prudentiel continu de la BCE, comme par exemple les travaux menés sur le risque de taux d’intérêt dans le portefeuille bancaire depuis 2021. Dans le processus régulier de contrôle et d’évaluation prudentiels (Supervisory Review and Evaluation Process, SREP) mené en 2023, les notes SREP globales sont restées globalement inchangées. Les exigences au titre du pilier 2 pour les fonds propres CET 1 ont été fixées à 1,2 % en moyenne, contre 1,1 % en 2022.

Malgré les résultats du SREP et bien que les banques européennes aient enregistré une rentabilité record en 2023, la BCE estime qu’il faut se garder de tout excès de confiance. La transmission croissante et progressive de ses taux directeurs aux taux des dépôts des banques et l’augmentation globale des coûts de financement des banques, ainsi qu’une détérioration de la qualité des actifs dans le secteur de l’immobilier résidentiel et dans d’autres secteurs sensibles aux taux d’intérêt pourraient compromettre la pérennité de profits élevés. Les travaux de surveillance prudentielle de la BCE restent concentrés sur les faiblesses persistantes dans la gestion du risque, la gouvernance et les contrôles internes, et sur les risques émergents.

La supervision est devenue plus efficace et davantage axée sur les risques

Au cours de l’année 2023, la supervision bancaire de la BCE est devenue plus efficace et davantage axée sur les risques. Sur la base de ses travaux internes et des recommandations du groupe d’experts, la BCE a mis en œuvre un nouveau cadre de tolérance au risque permettant aux autorités de surveillance d’adapter et de prioriser leurs activités selon la situation individuelle de la banque soumise à leur surveillance prudentielle, plutôt que d’adopter une approche universelle applicable à tous (one size fits all). Dans le même ordre d’idée, elle a introduit un nouveau cadre d’évaluation pluriannuel pour le SREP, permettant aux autorités de surveillance de mieux calibrer l’intensité et la fréquence de leurs analyses. Elle a également commencé à développer des processus d’intensification plus rapides et plus efficaces, en s’appuyant sur l’ensemble des outils de supervision bancaire, y compris les astreintes financières, par exemple dans le domaine des risques liés au climat et à l’environnement [45].

Trois banques ont été sanctionnées par la BCE en 2023 [46].

En décembre 2023, la BCE a publié les priorités prudentielles pour 2024-2026, qui sont les suivantes : a) renforcer la résilience face aux chocs macrofinanciers et géopolitiques immédiats, b) accélérer le traitement effectif des insuffisances en matière de gouvernance et de gestion des risques liés au climat et à l’environnement, et c) faire des progrès plus importants dans la transformation numérique et élaborer des cadres solides de résilience opérationnelle.

Dans le cadre de ses efforts continus pour renforcer la transparence, en 2023, la BCE a publié a) son approche en quatre étapes pour déterminer les exigences au titre du pilier 2 en fonction des différents risques, b) la méthodologie SREP relative au risque de crédit et au risque de marché applicable au cycle 2024, et c) le Guide sur les procédures relatives aux participations qualifiées ; et en janvier 2024, elle a publié une version actualisée du Manuel de surveillance prudentielle dont la dernière publication remonte à 2018.

En avril 2023, la BCE, en collaboration avec le Conseil de résolution unique, a accueilli favorablement un ensemble de modifications législatives du cadre européen de gestion des crises et de garantie des dépôts proposées par la Commission européenne.

En octobre 2023, Claudia Buch a été nommée en tant que nouvelle présidente du Conseil de surveillance prudentielle de la BCE, conformément au processus de sélection institutionnel établi.

De plus amples informations sont disponibles sur le site internet de la BCE consacré à la supervision bancaire et dans le Rapport annuel de la BCE sur les activités de surveillance, 2023.

3.4 La contribution de la BCE aux initiatives de l’UE et aux initiatives internationales

Plusieurs étapes importantes ont été franchies dans l’amélioration du cadre réglementaire

De nouveaux progrès ont été accomplis en 2023 en matière d’amélioration du cadre réglementaire du secteur financier. Les principales avancées furent 1) l’accord sur la mise en œuvre par l’UE des réformes définitives de Bâle III, 2) les initiatives visant à faire face aux risques liés au climat et 3) la proposition de renforcement du cadre de l’UE pour la gestion des crises et l’assurance des dépôts. D’importantes avancées ont également été réalisées en matière de réglementation des crypto-actifs et d’amélioration de la réglementation des infrastructures de marché, par exemple s’agissant de la compensation centrale.

Améliorer le cadre réglementaire des banques

Les travaux sur la réglementation bancaire se sont concentrés sur la mise en œuvre de Bâle III, le programme d’action de la BCE en matière de finance durable et la gestion de crise

En 2023, la BCE a continué de soutenir les négociations sur le paquet bancaire de l’UE, qui comprend un ensemble de modifications du règlement sur les exigences de fonds propres (Capital Requirements Regulation, CRR) [47]et de la directive sur les exigences de fonds propres (Capital Requirements Directive, CRD) [48] visant à mettre en œuvre les réformes définitives de Bâle III dans l’UE. En décembre, les instances préparatoires du Parlement européen et du Conseil de l’UE ont approuvé le paquet bancaire de l’UE. Les textes définitifs du CRR et de la CRD devraient être adoptés d’ici fin avril 2024, une fois conclues les révisions juridiques. Les réformes sont destinées à soutenir encore davantage la capacité de résistance du système bancaire de l’UE, notamment en augmentant les fonds propres nécessaires pour couvrir l’exposition au risque de crédit, au risque opérationnel et au risque de marché. Elles renforceront également la panoplie d’outils prudentiels, y compris pour faire face aux risques liés au climat et aux autres risques en matière de durabilité [49]. De plus, la BCE a contribué au programme d’action de l’UE en matière de finance durable, notamment en publiant des avis sur une directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité et sur un règlement sur les activités de notation environnementale, sociale et de gouvernance [50].

Les discussions sur l’achèvement de l’union bancaire se sont concentrées sur l’amélioration du cadre de l’Union pour la gestion des crises et l’assurance des dépôts. Le 18 avril 2023 la Commission européenne a publié une proposition législative visant à renforcer la gestion des crises bancaires dans l’UE et, en particulier, à améliorer les options des autorités en matière de traitement des défaillances des petites et moyennes banques. La BCE a accueilli très favorablement le paquet législatif dans l’un de ses avis [51], soulignant la nécessité de meilleurs outils et options de financement pour la gestion des crises. Au-delà du paquet réglementaire proposé, la BCE a appelé à de nouvelles avancées vers l’achèvement de l’union bancaire. En particulier, cela nécessite la mise en place d’un système européen d’assurance des dépôts et d’un cadre européen pour la liquidité en cas de résolution.

Finaliser un cadre réglementaire pour les crypto-actifs et en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux

Des progrès importants ont été réalisés en matière de réglementation des crypto-actifs et d’amélioration du cadre de lutte contre le blanchiment de capitaux

La BCE a continué de soutenir la finalisation et la mise en œuvre d’un cadre réglementaire pour les crypto-actifs en 2023, au niveau tant européen qu’international. Après l’entrée en vigueur dans l’UE du règlement sur les marchés de crypto-actifs [52] en juin, la BCE a apporté sa contribution sur un certain nombre de normes techniques coordonnées par l’Autorité bancaire européenne et l’Autorité européenne des marchés financiers et qui visaient à mettre en œuvre le règlement. Au niveau international, elle a contribué aux progrès réalisés au sein d’instances internationales telles que le Conseil de stabilité financière (Financial Stability Board, CSF), le Comité de Bâle sur le contrôle bancaire (Basel Committee on Banking Supervision, CBCB) et le Comité sur les paiements et les infrastructures de marché (Committee on Payments and Market Infrastructures, CPIM). Plus précisément, le CSF a finalisé son cadre réglementaire global pour les activités liées aux crypto-actifs, fournissant des recommandations de haut niveau pour réguler les activités et les marchés de crypto-actifs et pour les dispositifs mondiaux de stablecoins. Ces recommandations ont été intégrées à la feuille de route plus large du G20 sur les crypto-actifs, qui a été adoptée en octobre et a également bénéficié des apports de la BCE. De plus, la BCE a soutenu les travaux du CBCB sur le durcissement et la clarification de certains aspects de sa norme sur l’exposition des banques aux crypto-actifs. En particulier, les ajustements durcissent les critères permettant aux stablecoins de recevoir un traitement réglementaire préférentiel.

La BCE a également poursuivi sa contribution active à la finalisation du paquet législatif proposé par la Commission européenne sur la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (LBC/FT), y compris la création d’une autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux au niveau de l’UE. Comme indiqué dans ses avis [53], la BCE a soutenu la coopération étroite et le partage d’informations entre les autorités de surveillance LBC/FT et la supervision bancaire européenne et, plus généralement, un régime efficace de l’UE pour contrer le risque d’utilisation abusive du système financier de l’UE à des fins de blanchiment de capitaux et de financement du terrorisme.

Soutenir les progrès vers l’union des marchés de capitaux et le renforcement du cadre réglementaire de l’IFNB

Des efforts continus pour faire avancer l’union des marchés de capitaux et la règlementation du secteur de l’IFNB

Les travaux législatifs se sont poursuivis en 2023 sur les initiatives visant à approfondir l’intégration des marchés de capitaux de l’UE dans le cadre du plan d’action 2020 de la Commission européenne relatif à l’union des marchés de capitaux. Au cours de l’année, la BCE a contribué au débat de politique publique sur l’avenir de l’union des marchés de capitaux par le biais de divers publications et discours [54]. De plus, la présidente de la BCE, ainsi que les présidents de l’Eurogroupe, de la Banque européenne d’investissement, du Conseil européen et de la Commission européenne ont publié un article de blog sur l’importance de l’union des marchés de capitaux pour orienter l’épargne de l’Europe vers la croissance. La BCE a aussi participé activement aux discussions de l’Eurogroupe sur l’avenir des marchés de capitaux et des marchés financiers européens et a contribué au processus législatif lié à l’examen du règlement sur l’infrastructure du marché européen [55].

De plus, la BCE a continué de souligner l’importance de remédier aux vulnérabilités structurelles des entités de l’intermédiation financière non bancaire (IFNB) et d’améliorer le cadre de mesures approprié dans une perspective macroprudentielle. Dans une analyse des récents épisodes de tensions dans le secteur de l’IFNB, la Revue de stabilité financière et le Bulletin macroprudentiel de la BCE ont débattu des implications en matière de niveau de préparation s’agissant de la liquidité et de levier d’endettement dans ce secteur [56]. La BCE a également été impliquée dans l’évaluation par le CSF des implications en matière de stabilité financière du levier d’endettement dans l’IFNB et a activement contribué aux travaux en cours visant à améliorer la capacité de résistance de ce secteur [57]. S’agissant des fonds d’investissement ouverts, la BCE a contribué à la révision des recommandations du CSF visant à gérer les décalages de liquidité dans ces fonds [58].

4 Le fonctionnement harmonieux des infrastructures de marché et des paiements

L’Eurosystème joue un rôle central dans le développement, la gestion et la surveillance des infrastructures de marché et des paiements. En 2023, l’Eurosystème a renouvelé avec succès son système de paiement de gros et a poursuivi le développement des services TARGET. En vue de renforcer encore l’intégration et l’innovation sur les marchés européens des paiements et des titres, l’Eurosystème a actualisé sa stratégie en matière de paiements de détail et a commencé à analyser l’incidence potentielle des technologies émergentes sur le règlement des transactions financières de gros. Dans le cadre de ses travaux d’exploration d’un éventuel euro numérique, l’Eurosystème est passé de l’analyse à la phase préparatoire.

4.1 Les services TARGET

L’Eurosystème a lancé avec succès son nouveau système de paiement de gros T2

Le 20 mars 2023, l’Eurosystème a lancé avec succès son nouveau système de paiement de gros T2, qui remplace le système TARGET2 en fonctionnement depuis novembre 2007. Le système T2 instaure un dispositif de règlement brut en temps réel (RBTR), une fonction centrale de gestion de la liquidité qui optimise la gestion des liquidités dans l’ensemble des services TARGET et offre un ensemble de composantes communes partagées entre les services TARGET ainsi qu’une extension des heures de fonctionnement. La migration a eu lieu entre le 17 et le 20 mars 2023, et les banques ont toutes commencé à utiliser le nouveau système après une migration de type « big bang » le lundi 20 mars 2023. Le nouveau système est conforme à la norme internationale d’échange de messages entre établissements financiers (ISO 20022) et apporte d’importants gains d’efficacité. En outre, le nouveau dispositif T2 permet aux opérateurs de marché de rationaliser la gestion de la liquidité de la monnaie de banque centrale pour leurs opérations en euros dans les paiements de gros et de détail ainsi que pour le règlement de titres.

Quelque 1 000 banques utilisent T2 pour réaliser des opérations en euros, pour leur propre compte ou pour celui de leurs clients. Si l’on inclut les succursales et les filiales, plus de 40 000 banques sont connectées à T2 à travers le monde. En 2023, une moyenne de 409 444 paiements par jour, d’une valeur quotidienne moyenne de 2 200 milliards d’euros, ont été traités à l’aide de T2 et son prédécesseur TARGET2. Cela représente une augmentation du volume journalier des paiements de 2,9 % par rapport à 2022.

À compter du 1er janvier 2023, à la suite de l’adhésion de la Croatie à la zone euro, la communauté financière croate est passée de son système RBTR national à TARGET2/T2. L’intégration du marché croate aux services TARGET s’est poursuivie en juin avec la migration vers le service TARGET Instant Payment Settlement (TIPS), et en septembre, lorsque le dépositaire central de titres (DCT) croate a rejoint TARGET2-Titres (T2S).

Le DCT croate a été affilié dans le cadre d’une vague au cours de laquelle cinq DCT ont rejoint avec succès la plateforme T2S : Euroclear Bank, l’un des plus grands DCT au monde, le système de règlement-livraison de titres d’État bulgare et le dépositaire central AD, l’autre DCT opérant en Bulgarie, Središnje klirinško depozitarno društvo d.d. (SKDD) en Croatie et Euroclear Finland. La plateforme T2S connecte désormais 24 DCT de 23 marchés européens, permettant ainsi le règlement de titres en euros et en couronnes danoises. Cette vague de migration a constitué une évolution importante pour T2S et l’Eurosystème sur le plan du fonctionnement, de l’exploitation et de la stratégie. En particulier, l’affiliation réussie d’un DCT (Euroclear Finland) qui gère des comptes d’investisseurs finaux confirme une nouvelle fois que les infrastructures de marché de l’Eurosystème fonctionnent avec l’ensemble des marchés et juridictions de l’UE. En outre, sur le plan de l’exploitation, la migration d’Euroclear Bank amène les instruments d’euro-obligations directement dans T2S et, à partir de 2024, dans le système de gestion des garanties de l’Eurosystème (Eurosystem Collateral Management System, ECMS). En 2023, T2S a traité en moyenne 699 868 opérations par jour, pour une valeur quotidienne moyenne de 790,3 milliards d’euros.

TIPS a continué de jouer un rôle important dans le développement des paiements instantanés en euros, avec de nouvelles affiliations de banques et de communautés nationales en 2023. L’augmentation du nombre de participants à TIPS a entraîné une hausse du volume des transactions de plus de 127 % par rapport à 2022, avec un pic de 28 millions de paiements instantanés réglés en décembre 2023 (contre 18,7 millions en décembre 2022). Les tests relatifs à la connexion de la Banque de Suède (Sveriges Riksbank) et de la couronne suédoise à TIPS pour les paiements instantanés en 2024 ont été achevés avec succès. La collaboration entre l’Eurosystème et la Banque nationale du Danemark (Danmarks Nationalbank) pour connecter la couronne danoise à TIPS (et T2) en 2025 s’est poursuivie sans heurts.

En juillet 2023, l’Eurosystème a publié une nouvelle structure tarifaire pour TIPS qui est entrée en vigueur le 1er janvier 2024. Elle garantit que le service fonctionne sur la base d’un recouvrement des coûts, sans réaliser de bénéfices. La structure tarifaire de TIPS vise parallèlement à favoriser l’adoption des paiements instantanés en Europe, qui devrait également s’accélérer, compte tenu de la proposition législative de la Commission européenne visant à rendre les paiements instantanés en euros accessibles à tous les citoyens et entreprises titulaires d’un compte bancaire dans l’UE et dans les pays de l’Espace économique européen.

Outre ces trois services de règlement, l’Eurosystème développe actuellement un nouveau service TARGET, à savoir le système ECMS. Il s’agira d’un système unifié de gestion des actifs utilisés comme garanties dans le cadre des opérations de crédit de l’Eurosystème dans l’ensemble des juridictions de la zone euro. Le lancement de l’ECMS a été déplacé d’avril 2024 à novembre 2024 afin de donner aux utilisateurs davantage de temps pour mener à bien les tests des fonctionnalités de l’ECMS dans un environnement stable.

4.2 Le projet d’euro numérique

La BCE a lancé la phase préparatoire du projet d’euro numérique

La phase d’analyse du projet d’euro numérique s’est étalée sur deux ans pour s’achever en octobre 2023. Le bilan des travaux réalisés au cours de la phase d’analyse a servi de fondement à la décision du Conseil des gouverneurs de la BCE de lancer la phase préparatoire. Le début de cette nouvelle phase n’implique pas une décision sur l’émission ou non d’un euro numérique. Cette décision ne peut être envisagée par le Conseil des gouverneurs qu’après l’adoption du cadre législatif pour l’euro numérique au niveau de l’UE.

Au cours de la phase d’analyse, l’Eurosystème a convenu de la conception de haut niveau et des exigences techniques pour un euro numérique. Les travaux ont été soutenus par un exercice de prototypage visant à valider la conception proposée d’un point de vue technique ainsi que par des travaux de recherche de groupes de réflexion [59] visant à recueillir des informations sur les préférences et les attentes des utilisateurs potentiels. Un dialogue étroit et transparent avec des acteurs du marché, d’autres institutions de l’UE et des décideurs politiques a permis à l’ensemble des parties prenantes d’apporter leur point de vue sur les options de conception et de distribution. Des analyses de marché sur des aspects techniques ont montré qu’il existait suffisamment de fournisseurs européens capables de mettre au point des solutions en matière d’euro numérique, et qu’une série d’options de conception architecturale et technologique étaient disponibles.

Le premier stade de la phase préparatoire, qui a débuté le 1er novembre 2023, durera deux ans et jettera les bases de l’éventuelle émission d’un euro numérique. Au cours de cette période, l’accent sera mis sur la finalisation du recueil de règles relatives à l’euro numérique (digital euro rulebook) ainsi que sur la sélection des fournisseurs susceptibles de mettre en œuvre une plateforme et une infrastructure pour un euro numérique. L’Eurosystème approfondira par ailleurs les tests et les expériences, et continuera de consulter l’ensemble des parties prenantes, y compris le public, pour s’assurer qu’un euro numérique réponde aux normes les plus élevées en matière de qualité, de sécurité, de respect de la vie privée et de facilité d’utilisation.

Les éventuelles étapes ultérieures seront décidées par le Conseil des gouverneurs en fonction des résultats du premier stade de la phase de préparation et des évolutions du processus législatif.

4.3 L’innovation et l’intégration des infrastructures de marché et des paiements

L’Eurosystème a actualisé sa stratégie en matière de paiements de détail

En novembre 2023, l’Eurosystème a publié une mise à jour de sa stratégie en matière de paiements de détail à la lumière des changements importants dans le paysage des paiements au cours des quatre années qui ont suivi son lancement. En particulier, la Big Tech a renforcé ses activités dans le domaine des services de paiement, ce qui pourrait avoir un effet négatif sur l’autonomie stratégique de l’Europe en matière de paiements. En outre, la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine a souligné l’importance des risques (cyber) pour les infrastructures critiques en Europe, y compris pour les services de paiement. Par ailleurs, des progrès considérables ont été réalisés en ce qui concerne le projet d’euro numérique.

La stratégie actualisée maintient ses objectifs principaux, qui sont d’élaborer des solutions paneuropéennes pour les paiements au point d’interaction (c’est-à-dire au point de vente physique et dans l’espace mobile et de commerce électronique), et de renforcer encore l’espace unique de paiement en euros (Single Euro Payments Area, SEPA), en recourant avant tout au plein déploiement des paiements instantanés. La stratégie ajoute l’objectif d’accroître la résilience des paiements de détail, notamment en mettant à disposition des solutions de paiement de secours. Enfin, la complémentarité entre la stratégie de l’Eurosystème en matière de paiements de détail et le projet d’euro numérique est mise en avant, avec l’accent sur les différentes manières pour un euro numérique de contribuer à la réalisation des objectifs de la stratégie. Par exemple, un euro numérique offrirait une solution de paiement paneuropéenne en soi, tout en aidant les solutions de paiement de détail privées à atteindre une portée paneuropéenne.

Des progrès ont été réalisés en matière d’intégration financière dans le domaine du post-marché

Conformément à son objectif de poursuite de l’intégration des marchés financiers européens dans le domaine du post-marché, et de contribution à la réalisation de l’union des marchés des capitaux, le groupe consultatif de l’Eurosystème sur les infrastructures de marché pour les titres et les garanties (Advisory Group on Market Infrastructures for Securities and Collateral, AMI-SeCo) a continué de rendre compte des progrès réalisés par les marchés AMI-SeCo (l’Espace économique européen et les marchés britannique et suisse) pour le respect des normes du programme d’harmonisation T2S, du règlement unique sur la gestion des garanties pour l’Europe (Single Collateral management Rulebook for Europe, SCoRE) (qui est également nécessaire pour interagir avec l’ECMS) et des normes relatives aux changements institutionnels (corporate events) – en ce compris les normes relatives à l’identification des actionnaires. Le taux global de conformité par rapport aux normes d’harmonisation de T2S est resté autour de 90 %. Les cinq nouveaux DCT qui ont rejoint T2S en septembre 2023 ont été évalués comme étant à un niveau élevé de conformité par rapport aux normes d’harmonisation de T2S. Le Corporate Events Compliance Report a fourni la preuve que des progrès avaient également été accomplis en ce qui concerne le respect des normes relatives aux changements institutionnels. Dans le tableau de bord relatif au second semestre de 2023, l’AMI-SeCo a noté des retards dans les progrès des intervenants en matière de conformité par rapport aux normes SCoRE applicables. Compte tenu du report à novembre 2024 de la mise en service du système de gestion des garanties de l’Eurosystème (Eurosystem Collateral Management System, ECMS), l’AMI-SeCo a accepté de reculer la date limite de mise en conformité avec les normes SCoRE concernées.

Afin de recenser les obstacles qui subsistent à l’intégration de l’environnement du post-marché des titres dans l’UE, l’AMI-SeCo a lancé en novembre 2023 une enquête auprès de ses membres ainsi que des membres des groupes de parties prenantes nationales. L’AMI-SeCo a également apporté sa contribution à la Commission européenne et au Conseil européen sur les aspects post-marché de la proposition de la Commission visant à rendre plus efficaces les procédures transfrontières de retenue à la source et a communiqué à l’Autorité européenne des marchés financiers (AEMF) son point de vue sur l’éventualité d’un raccourcissement du cycle de règlement des opérations sur titres standard T+2.

Enfin, l’Eurosystème a commencé à analyser l’incidence potentielle des technologies émergentes, en ce compris la technologie des registres distribués (distributed ledger technology, DLT), sur le règlement des transactions financières de gros.

4.4 La surveillance et le rôle des banques centrales d’émission

L’évaluation complète des services TARGET a débuté

Le fonctionnement sécurisé et efficace des infrastructures de marchés financiers (IMF) et des services de paiements dans la zone euro est une priorité constante de l’Eurosystème dans son rôle de surveillance. De plus, en sa qualité de banque centrale d’émission pour l’euro, l’Eurosystème participe à des accords de coopération pour les IMF situées hors de la zone euro et exerçant d’importantes activités libellées en euros.

S’agissant de la surveillance des services TARGET de l’Eurosystème (cf. section 4.1), les premières priorités ont été notamment le suivi du projet de consolidation T2-T2S avant sa mise en service en mars 2023, et l’intégration de nouveaux marchés. En outre, des évaluations complètes de T2/TIPS au regard du règlement concernant les exigences de surveillance applicables aux systèmes de paiement d’importance systémique (SPIS) et de T2S au regard des principes du CPIM-OICV ont été lancées en octobre 2023.

L’Eurosystème surveille également d’autres SPIS, notamment EURO1, STEP2-T et le MasterCard Clearing Management System (MCMS). En 2023, il s’est concentré sur la finalisation de la première évaluation complète du MCMS au regard du règlement SPIS, le lancement de nouvelles évaluations complètes d’EURO 1 et de STEP2-T au regard du règlement SPIS, l’évaluation du MCMS au regard des attentes en matière de surveillance de la capacité de résistance informatique (cyber resilience oversight expectations, CROE) pour les infrastructures de marchés financiers et le suivi de la migration d’EURO 1 vers la norme ISO 2022.

S’agissant des instruments de paiement, des schémas de paiement et des dispositifs de paiement, l’Eurosystème a franchi en 2023 une étape majeure dans le recensement des dispositifs de paiement dont la surveillance ou le suivi doivent être assurés dans le cadre établi par l’Eurosystème pour la surveillance des instruments, schémas et dispositifs de paiement électronique (payment instruments, schemes and arrangements, PISA). Outre l’intégration d’entités nouvellement entrées dans la sphère de surveillance du cadre PISA, l’Eurosystème a réalisé une évaluation complète du premier groupe de systèmes paneuropéens, et a poursuivi ses travaux sur la surveillance de la fraude relative aux paiements par carte.

En sa qualité de banque centrale d’émission pour l’euro, l’Eurosystème a continué d’être associé aux dispositifs de surveillance et de gestion de crise coopératifs pour les IMF exerçant d’importantes activités libellées en euros. S’agissant des contreparties centrales (CPC), l’Eurosystème a contribué à l’évaluation de modifications apportées à la gestion des risques, de propositions d’extension de services, de plans de redressement et de plans de résolution. En ce qui concerne le règlement de titres, l’Eurosystème a continué d’apporter sa contribution à l’évaluation régulière des DCT dans le cadre du règlement relatif aux dépositaires centraux de titres et de préparer l’agrément futur d’entités exploitant des infrastructures de marché reposant sur la DLT en vertu du règlement (UE)  2022/858 (règlement pilote sur le régime DLT).

Dans le domaine de la cyber-résilience, il a été procédé à la finalisation de la révision de la stratégie en matière de cyber-résilience de l’Eurosystème pour les IMF, et des informations sur les améliorations et les modifications apportées seront communiquées début 2024. De plus, le SEBC a mené son enquête périodique sur la cyber-résilience auprès de 80 IMF de l’UE et a entamé un suivi, de concert avec les autorités de surveillance et entités supervisées respectives.

La BCE a soutenu divers axes de travail mondiaux liés à la surveillance (par exemple, sur les pratiques en matière de marges des CCP, les garanties des IMF pour les risques financiers sans lien avec les dispositifs concernant la défaillance des participants, et les stablecoins), ainsi que le test de résistance des CCP à l’échelle de l’UE organisé par les autorités de surveillance et coordonné par l’AEMF. La BCE a également publié un relevé des modèles de marge initiale des CCP de l’UE, suivi en permanence l’incidence de la volatilité accrue des marchés sur les CCP et leurs membres, et organisé, en collaboration avec la Banque fédérale d’Allemagne (Deutsche Bundesbank) et la Banque fédérale de réserve de Chicago, la Conférence conjointe de 2023 sur la gestion des risques des CCP visant à faciliter les discussions entre le secteur, les organismes de réglementation et les milieux universitaires.

L’Eurosystème contribue régulièrement à l’élaboration de nouvelles réglementations de l’UE concernant les IMF et les services de paiements. En 2023, en particulier, elle a apporté sa contribution à l’avis de la BCE sur la révision du règlement européen sur les infrastructures de marché. La BCE a également contribué activement à l’élaboration d’un droit dérivé pour le règlement sur la résilience opérationnelle numérique (Digital Operational Resilience Act), notamment en ce qui concerne l’élaboration de tests d’intrusions fondés sur les menaces, conformément au cadre européen de cyberpiratage éthique fondé sur les renseignements quant aux menaces (Threat Intelligence-Based Ethical Red Teaming, TIBER-EU).

Encadré 4
Les nouvelles technologies pour le règlement en monnaie de banque centrale sur le marché de gros

L’Eurosystème procède à l’analyse de l’incidence potentielle des technologies émergentes, y compris la technologie de registres distribués (distributed ledger technology, DLT), sur le règlement des transactions financières de gros. Ce travail s’inscrit dans le cadre des efforts de l’Eurosystème pour s’assurer que les banques centrales suivent et contribuent à l’innovation numérique dans le domaine des paiements et du règlement de titres.

Le secteur financier s’intéresse de plus en plus aux applications potentielles de la DLT, y compris pour les transactions actuellement réglées en monnaie de banque centrale. En cas d’adoption significative de la DLT par le secteur, les banques centrales pourraient être amenées à prendre des mesures pour préserver le fonctionnement harmonieux des systèmes de paiement et le rôle de la monnaie de banque centrale comme ancrage monétaire soutenant la stabilité, l’intégration et l’efficacité du système financier européen.

L’Eurosystème a recensé quatre solutions conceptuelles qui pourraient permettre le règlement en monnaie de banque centrale de transactions de gros où, par exemple, le règlement de la partie de la transaction qui porte sur des titres s’opère dans une infrastructure de type DLT (figure A).

Figure A

Solutions conceptuelles pour le règlement en monnaie de banque centrale des transactions de gros enregistrées sur les plateformes DLT

Source : Cf. Neuhaus (H.) et Plooij (M.), « Le règlement des transactions de gros en monnaie de banque centrale face à l’innovation technologique », Bulletin économique, no 8, BCE, 2023, p. 104-119.
Notes : Les lignes, les points et les pictogrammes bleus représentent la monnaie de banque centrale (CeBM). Les lignes, les points et les pictogrammes violets représentent les titres.

L’Eurosystème prévoit de mener des travaux exploratoires sur la DLT sous la forme d’essais de règlement en monnaie de banque centrale réelle et de simulations de liquidations dans un environnement de test. Cela sera réalisé sur la base de trois solutions de l’Eurosystème permettant le règlement en monnaie de banque centrale des transactions financières de gros enregistrées sur des plateformes DLT : d’une part, la solution Trigger fournie par la Banque fédérale d’Allemagne (Deutsche Bundesbank) et la solution TIPS Hash-Link développée par la Banque d’Italie (Banca d’Italia), toutes deux fondées sur le concept no 1, et, d’autre part, l’Interopérabilité entièrement DLT, solution élaborée par la Banque de France et fondée sur le concept no 2. Les acteurs du marché ont été invités à se manifester s’ils souhaitent participer aux essais et expériences prévus entre mai et novembre 2024. Parallèlement, les deux autres solutions conceptuelles feront l’objet d’une analyse plus approfondie en interne au sein de l’Eurosystème.

Un groupe de contact des marchés consacré à la DLT a été établi pour appuyer les travaux exploratoires de l’Eurosystème. Ce groupe fournit des contributions d’experts et informe l’Eurosystème des progrès réalisés dans l’utilisation de la DLT ou d’autres nouvelles technologies sur les marchés financiers de gros.

5 Les opérations de marché et les services financiers aux autres institutions et aux établissements financiers

L’Eurosystème a approuvé un nouveau cadre pour la fourniture de lignes de liquidité en euros aux banques centrales hors zone euro en août 2023, et a maintenu plusieurs lignes de liquidité avec des banques centrales hors zone euro, fournissant ainsi un filet de sécurité au financement de marché. La BCE a continué de proposer régulièrement des opérations en dollars des États-Unis aux contreparties de la zone euro. Il n’y a pas eu d’intervention de la BCE sur le marché des changes. La BCE a continué de gérer plusieurs opérations financières pour le compte de l’Union européenne et de jouer un rôle de coordination dans le cadre des services de l’Eurosystème en matière de gestion des réserves.

5.1 Les évolutions des opérations de marché

Les lignes de liquidité en euros et en devises

Les lignes de swap et de repo de l’Eurosystème sont des instruments de politique monétaire. Elles contribuent à éviter que les tensions sur les marchés de financement internationaux n’entravent l’efficacité de la transmission de la politique monétaire dans la zone euro. Le tableau 5.1 montre les lignes de liquidité en activité au 31 décembre 2023.

En 2023, la BCE a continué de fournir, dans le cadre du swap line network, de la liquidité en dollars des États-Unis sur une base hebdomadaire, avec une échéance de sept jours, en coordination avec le Système fédéral de réserve des États-Unis, la Banque du Canada, la Banque d’Angleterre, la Banque du Japon et la Banque nationale suisse. Du 20 mars au 30 avril 2023, la fréquence des opérations de fourniture de liquidité en dollars d’une durée de sept jours a été augmentée de manière coordonnée avec les banques centrales du swap line network, devenant quotidienne au lieu d’hebdomadaire. Cette fréquence accrue visait à améliorer l’efficacité de l’opération et à en renforcer le rôle de filet de sécurité dans un contexte de fortes tensions sur le marché du financement en dollar. Les emprunts contractés par les contreparties de la zone euro sont restés limités tout au long de l’année.

Tableau 5.1

Relevé des lignes de liquidité opérationnelles

Contrepartie hors zone euro

Type de régime

Réciproque

Montant empruntable maximum (millions d’euros)

Banque nationale du Danemark (Danmarks Nationalbank)

Ligne de swap

Non

24 000

Banque de Suède (Sveriges Riksbank)

Ligne de swap

Non

10 000

Banque du Canada

Ligne de swap

Oui

Illimitée

Banque populaire de Chine

Ligne de swap

Oui

45 000

Banque du Japon

Ligne de swap

Oui

Illimitée

Banque nationale suisse

Ligne de swap

Oui

Illimitée

Banque d’Angleterre

Ligne de swap

Oui

Illimitée

Système fédéral de réserve des États-Unis

Ligne de swap

Oui

Illimitée

Banque nationale de Pologne (Narodowy Bank Polski)

Ligne de swap

Non

10 000

Banque nationale de Hongrie (Magyar Nemzeti Bank)

Ligne de repo

Non

4 000

Banque nationale de Roumanie (Banca Naţională a României)

Ligne de repo

Non

4 500

Banque d’Albanie

Ligne de repo

Non

400

Autorité financière andorrane

Ligne de repo

Non

35

Banque nationale de la République de Macédoine du Nord

Ligne de repo

Non

400

Banque centrale de la République de Saint-Marin (Banca Centrale della Repubblica di San Marino)

Ligne de repo

Non

100

Source : BCE.
Notes : Liste des lignes de liquidité de banque centrale gérées par l’Eurosystème (au 31 décembre 2023). Le tableau n’inclut pas les lignes de repo mises en place avec les banques centrales n’appartenant pas à la zone euro dans le cadre de la facilité de repo de l’Eurosystème pour les banques centrales (Eurosystem repo facility for central banks, EUREP), pour lesquelles la BCE n’a pas communiqué ses contreparties. Dans le nouveau régime, la BCE a publié toutes les lignes de liquidité depuis le 16 janvier 2024.

Le 3 août 2023, le Conseil des gouverneurs a approuvé un nouveau cadre pour la fourniture de lignes de liquidité en euros aux banques centrales hors zone euro, à la suite d’un examen approfondi du cadre précédent et sur la base de l’expérience des dernières années. Le nouveau cadre est entré en vigueur le 16 janvier 2024 ; il maintient le rôle des lignes de liquidité comme instruments de politique monétaire et conserve les éléments fondamentaux du cadre en place jusqu’à présent, mais le rationalise, et intègre les facilités de repo existantes dans un cadre permanent unifié baptisé EUREP. Les lignes de swap sont accessibles aux pays dont la solvabilité ou l’importance systémique est la plus élevée du point de vue de la zone euro. L’accès à une ligne de liquidité en euros pourrait différer en temps normal des périodes de graves perturbations généralisées sur les marchés financiers, lorsque la mise en place de lignes de précaution avec un éventail plus large de pays pourrait se justifier. Le Conseil des gouverneurs continuera d’évaluer les demandes de lignes de liquidité au cas par cas.

Déclaration des interventions sur le marché des changes

La BCE n’est pas intervenue sur le marché des changes en 2023. Depuis l’introduction de l’euro, la BCE est intervenue sur le marché des changes à deux reprises, à savoir en 2000 et en 2011. Les données relatives aux interventions sur le marché des changes sont publiées tous les trois mois, avec un décalage d’un trimestre, sur le site internet de la BCE ainsi que dans l’entrepôt de données statistiques (Statistical Data Warehouse). Les informations publiées dans le tableau trimestriel sont également récapitulées dans le tableau 5.2. S’il n’y a pas eu d’intervention sur le marché des changes au cours du trimestre concerné, cette information est explicitement indiquée.

Tableau 5.2

Interventions de la BCE sur le marché des changes

Période

Date

Type d’intervention

Couple de devises

Devise achetée

Montant brut (millions d’euros)

Montant net (millions d’euros)

T3 2000

22/09/2000

Coordonnée

EUR/USD

EUR

1 640

1 640

22/09/2000

Coordonnée

EUR/JPY

EUR

1 500

1 500

Q4 2000

03/11/2000

Unilatérale

EUR/USD

EUR

2 890

2 890

03/11/2000

Unilatérale

EUR/JPY

EUR

680

680

06/11/2000

Unilatérale

EUR/USD

EUR

1 000

1 000

09/11/2000

Unilatérale

EUR/USD

EUR

1 700

1 700

09/11/2000

Unilatérale

EUR/JPY

EUR

800

800

T1 2011

18/03/2011

Coordonnée

EUR/JPY

EUR

700

700

T1 à T4 2021

-

-

-

-

-

-

T1 à T4 2022

-

-

-

-

-

-

T1 à T4 2023

-

-

-

-

-

-

Source : BCE.

Le cadre de déclaration couvre les interventions sur le marché des changes effectuées par la BCE, soit unilatéralement, soit en coordination avec d’autres autorités internationales, ainsi que les interventions de change « aux marges » dans le cadre du mécanisme de change européen (MCE II).

5.2 La gestion des opérations d’emprunt et de prêt de l’UE

La BCE a traité des paiements dans le cadre de divers programmes de prêts de l’UE

La BCE est responsable de la gestion des comptes et du traitement des paiements relatifs aux opérations d’emprunt et de prêt de l’UE dans le cadre du mécanisme de soutien financier à moyen terme (medium-term financial assistance, MTFA) [60], du mécanisme européen de stabilisation financière (MESF) [61], de l’instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en situation d’urgence (European instrument for temporary support to mitigate unemployment risks in an emergency, SURE) [62], du programme Next Generation EU (NGEU) [63] et du programme d’assistance macrofinancière à l’Ukraine (macro-financial assistance to Ukraine programme, MFA+) [64]. La BCE assume également la responsabilité de gérer certains paiements liés à des opérations relevant du Fonds européen de stabilité financière (FESF) [65] et du Mécanisme européen de stabilité (MES) [66]. Elle assure aussi le traitement de tous les paiements afférents à la convention de prêt dont bénéficie la Grèce [67]. En 2023, la BCE a terminé les préparatifs en vue d’offrir des services d’agent payeur à la Commission européenne, élargissant ainsi la gamme des services d’agent fiscal qu’elle propose actuellement.

Au 31 décembre 2023, l’encours nominal total s’élevait à 200 millions d’euros dans le cadre du mécanisme MTFA, à 42,8 milliards d’euros au titre du MESF, à 98,4 milliards d’euros au titre de l’instrument SURE et à 39,54 milliards d’euros dans le cadre de la convention de prêt en faveur de la Grèce. Enfin, la BCE a procédé en 2023 aux décaissements et aux paiements des intérêts de prêts et de subventions au titre du programme NGEU à destination et émanant de différents États membres, et a traité les prêts MFA+ à destination de l’Ukraine.

5.3 Les services de l’Eurosystème en matière de gestion des réserves

Plusieurs banques centrales nationales de l’Eurosystème ont fourni des services dans le cadre des ERMS

En 2023, un large éventail de services financiers ont continué d’être offerts dans le cadre des services de l’Eurosystème en matière de gestion des réserves (Eurosystem reserve management services, ERMS) instaurés en 2005 pour la gestion des actifs libellés en euros et mis en réserve par des clients de l’Eurosystème. En vertu de ceux-ci, plusieurs banques centrales nationales de l’Eurosystème fournissent, selon des modalités harmonisées et conformément aux normes du marché, des services financiers à des banques centrales, à des autorités monétaires et à des organismes gouvernementaux de pays n’appartenant pas à la zone euro, de même qu’à des organisations internationales. La BCE joue un rôle de coordination générale, suit le bon fonctionnement des services, encourage les modifications visant à en améliorer le cadre et prépare des rapports connexes pour ses organes de décision.

Fin 2023, le nombre de comptes de clients gérés dans le cadre des ERMS s’élevait à 273, contre 270 fin 2022. Le total des avoirs agrégés (encaisses et portefeuilles de titres compris) gérés dans le cadre des ERMS a diminué de quelque 20 % en 2023 par rapport à 2022.

6 Les espèces sont demeurées le moyen de paiement le plus utilisé par les citoyens européens et ont affiché un faible niveau de contrefaçon

La circulation des billets en euros a été affectée par les relèvements des taux directeurs de la BCE, sous l’effet de la diminution des avoirs en espèces détenus à titre de réserve de valeur. Une grande majorité de citoyens européens estiment qu’il est important d’avoir la possibilité de payer en espèces. Dès lors, la BCE s’efforce de garantir un accès efficace aux espèces et leur acceptation dans la zone euro.

L’Eurosystème s’est également engagé à faire en sorte que les espèces restent aussi durables et respectueuses de l’environnement que possible et a évalué l’empreinte environnementale des billets de banque en tant que moyen de paiement. Les préparatifs en vue de la réalisation d’une nouvelle série de billets en euros sont l’occasion de rendre les billets en euros plus évocateurs pour tous les Européens. Le grand public est dès lors consulté tout au long du processus de conception.

6.1 Circulation des billets en euros et garantie de l’accès aux espèces et de leur acceptation

La circulation des billets en euros a été impactée par les hausses des taux d’intérêt

Fin 2023, le nombre de billets en euros en circulation atteignait 29,8 milliards, pour une valeur totale de 1 570 milliards d’euros. Les billets de banque ne produisant aucun intérêt, les relèvements des taux directeurs de la BCE observés depuis juillet 2022 ont continué de comprimer la détention d’espèces à titre de réserve de valeur. En conséquence, l’année 2023 a été marquée par des taux de croissance annuels très faibles de 1,2 et – 0,3 %, respectivement en nombre de coupures et en valeur.

Graphique 6.1

Nombre et valeur des billets en euros en circulation

(échelle de gauche : en milliards d’euros ; échelle de droite : en milliards)

Source : BCE.

Dans le souci de maintenir la qualité des billets en euros en circulation et la confiance qu’ils inspirent, les banques centrales nationales de l’Eurosystème ont traité 25,3 milliards de billets en euros. Parmi ceux-ci, 3,3 milliards de coupures usées ont été remplacées par des exemplaires nouvellement imprimés.

La valeur des pièces en euros en circulation a progressé de 3,2 % par an, pour s’établir à 33,5 milliards d’euros fin 2023, ce qui correspond à 148,2 milliards de pièces en euros.

En 2022, la BCE a mené une étude analysant les comportements des consommateurs en matière de paiement dans la zone euro (Study on payments attitudes of consumers in the euro area), qui a montré que 60 % des citoyens estiment qu’il est important d’avoir la possibilité de payer en espèces. Afin de garantir l’accès efficace aux espèces et leur acceptation, la Commission européenne a adopté, le 28 juin 2023, une proposition de règlement concernant le cours légal des billets et pièces en euros. Dans son avis sur la proposition de la Commission, la BCE a exprimé son ferme soutien à l’établissement de règles claires concernant l’acceptation obligatoire des espèces en euros et les refus des détaillants d’accepter les espèces, par exemple en apposant des affiches « pas de paiements en espèces » à l’entrée des magasins. Un bon accès aux espèces et l’acceptation de celles-ci sont les éléments clés de la stratégie fiduciaire de l’Eurosystème à l’horizon 2030, qui visera à assurer que les espèces en euros restent largement disponibles en tant que moyen de paiement et réserve de valeur attrayants, fiables et concurrentiels.

6.2 Étude sur l’empreinte environnementale des billets en euros

L’empreinte environnementale de produit examine l’ensemble du cycle de vie des billets, depuis l’acquisition des matières premières et la fabrication jusqu’à la distribution et l’élimination

La BCE a mené une étude sur l’empreinte environnementale des billets en euros afin d’évaluer l’empreinte environnementale, par personne et par an, des paiements en espèces effectués avec des billets en euros, le but étant de garantir que les espèces restent aussi durables et respectueuses de l’environnement que possible.

Les conclusions de l’étude ont montré que l’empreinte, par personne et par an, de l’utilisation des billets en euros est équivalente à un trajet de huit kilomètres en voiture et qu’elle ne représente que 0,01 % de l’incidence annuelle totale sur l’environnement des activités de consommation.

L’étude sur l’empreinte environnementale de produit s’est également penchée sur les progrès engrangés jusqu’à présent

Les billets sont réutilisés à plusieurs reprises après leur mise en circulation. La phase de distribution, en ce compris la consommation d’énergie et le transport, est la principale contributrice à leur empreinte environnementale. L’utilisation de coton durable pour la fabrication du papier à billets a réduit l’incidence environnementale des billets en euros de près de 50 % et l’empreinte globale des paiements effectués avec des billets en euros de 3,6 % comparativement à l’utilisation de coton conventionnel issu de sources non durables. De nouvelles réductions sont prévues une fois que la transition vers un coton plus organique deviendra une réalité. D’importants travaux de recherche et de développement sont en cours afin d’identifier d’autres méthodes d’élimination des déchets de billets, telles que le recyclage et la réutilisation de ceux-ci.

6.3 Évolution de la contrefaçon des billets en euros

En 2023, le niveau des contrefaçons exprimé en proportion du nombre total de billets en circulation a été parmi les plus bas

En 2023, quelque 467 000 billets en euros contrefaits ont été retirés de la circulation, soit l’un des niveaux les plus bas jamais observés en proportion du nombre total de billets en circulation (graphique 6.2). Cela correspond à 16 contrefaçons détectées par million de coupures authentiques en circulation. Malgré cette très faible proportion, le nombre de billets contrefaits a augmenté par rapport à 2022, année durant laquelle il avait été exceptionnellement bas à la suite de la pandémie de COVID-19. La probabilité de se voir remettre un billet contrefait est faible. La plupart des contrefaçons sont de qualité médiocre et ne comportent aucun des signes de sécurité, ou alors il s’agit de piètres imitations. Les billets peuvent être vérifiés grâce au simple test consistant à « toucher, regarder, incliner » décrit sur la page internet consacrée aux signes de sécurité des billets et sur les sites internet des banques centrales nationales de la zone euro.

Graphique 6.2

Nombre de contrefaçons détectées chaque année par million de billets authentiques en circulation

Source : BCE.

6.4 Préparatifs en vue des futurs billets en euros

La BCE se prépare à mettre au point une nouvelle série de billets en euros qui demeureront aussi résistants à la contrefaçon et qui seront aussi respectueux de l’environnement que possible. Ce processus reflète l’engagement de l’Eurosystème en faveur des espèces et est l’occasion de rendre les billets en euros plus évocateurs pour tous les Européens.

Afin de veiller à ce que l’avis des Européens soit pris en compte dans les futurs graphismes, le grand public est consulté tout au long du nouveau processus de conception

Un groupe consultatif multidisciplinaire, composé de représentants de tous les pays de la zone euro, a proposé une liste restreinte de thèmes établie sur la base des suggestions du grand public. Le Conseil des gouverneurs a ensuite sélectionné sept thèmes, à propos desquels le grand public a été invité à exprimer ses préférences. Sur la base des résultats de deux enquêtes menées auprès du grand public durant l’été 2023, le Conseil des gouverneurs a retenu deux thèmes possibles pour les futurs billets en euros : « La culture européenne » et « Fleuves et oiseaux ».

Une décision sur les conceptions définitives et sur le calendrier de production et d’émission des nouveaux billets est attendue en 2026

En outre, le Conseil des gouverneurs a réuni un groupe consultatif chargé de proposer, d’ici fin 2024, des motifs susceptibles d’illustrer les thèmes sélectionnés. Par la suite, un concours sera organisé pour concevoir les nouveaux billets. Les citoyens européens auront de nouveau l’occasion d’exprimer leurs préférences entre plusieurs propositions. La BCE devrait se prononcer en 2026 sur les graphismes définitifs et sur le calendrier de production et d’émission des futurs billets. Une fois prise la décision de produire de nouveaux billets, il faudra encore patienter quelques années avant que ces derniers ne soient effectivement émis.

7 Les statistiques

La BCE, assistée par les banques centrales nationales (BCN), développe, collecte, compile et diffuse une large gamme de statistiques et de données nécessaires à la conduite de sa politique monétaire. Ces statistiques étayent d’autres missions du Système européen de banques centrales (SEBC) et du Comité européen du risque systémique, liées notamment à la stabilité financière. Elles sont également utilisées par les autorités publiques, les organisations internationales, les intervenants sur les marchés financiers, les médias et le grand public, ce qui contribue à accroître la transparence des activités de la BCE.

En 2023, la BCE s’est concentrée sur de nouvelles statistiques relatives à la zone euro, à savoir la collecte de statistiques extérieures plus détaillées et la ventilation de la composante « crédits, numéraire et dépôts » de la dette publique. La BCE a également décidé d’élargir la population déclarante dans le cadre du dispositif de collecte d’informations statistiques portant sur le marché monétaire (Money Market Statistical Reporting). Elle a publié de nouvelles séries de comptes financiers comportant une ventilation des droits sur les assurances-vie et des droits à pension par type de risque d’investissement. Dans le cadre de son plan d’action pour le climat, la BCE a publié des indicateurs climatiques sur son site internet. En outre, l’Eurosystème a lancé une enquête afin de déterminer quels thèmes pourraient être inclus dans le champ d’application du Cadre de déclaration intégré (Integrated Reporting Framework).

7.1 Nouvelles statistiques, statistiques élargies de la zone euro et autres évolutions

De nouveaux détails sur les statistiques extérieures ont été mis à la disposition des utilisateurs

En avril 2023, la BCE a commencé à publier des détails supplémentaires concernant les statistiques extérieures, conformément à l’orientation modifiée de la BCE relative aux statistiques extérieures, répondant ainsi au besoin des utilisateurs de disposer de statistiques transfrontières plus détaillées. Les nouvelles séries distinguent les données relatives aux fonds d’investissement, aux sociétés d’assurance et fonds de pension, aux autres institutions financières, aux sociétés non financières et aux ménages et institutions sans but lucratif au service des ménages. Elles identifient également le type d’instrument de dette utilisé pour procéder aux investissements directs. Les détails complémentaires sont disponibles pour les titres de créance, les crédits, les crédits commerciaux et avances, ainsi que pour des contreparties géographiques supplémentaires.

De nouvelles ventilations des crédits, numéraire et dépôts de la dette des administrations publiques ont été publiées

En outre, la BCE a commencé à publier de nouvelles ventilations de la composante « crédits, numéraire et dépôts » de la dette publique des États membres de l’UE, ce qui permet une évaluation plus approfondie du financement public. Alors que les titres de créance constituent généralement la plus grande part de la dette publique, les crédits et les dépôts sont également des composantes importantes, équivalentes en 2022 à 16 % environ du PIB de la zone euro et à 17,5 % de la dette publique totale. Les données montrent les différentes sources de financement et fournissent une ventilation par catégorie de créanciers, y compris les banques commerciales, les institutions multilatérales (telles que le Fonds monétaire international) et les institutions de l’Union européenne (par exemple la Banque européenne d’investissement).

La BCE a décidé d’élargir la population déclarante des statistiques du marché monétaire de l’euro

En avril 2023, la BCE a décidé d’élargir la population déclarante du dispositif de collecte des données portant sur le marché monétaire (Money Market Statistical Reporting, MMSR), ajoutant 24 nouvelles banques aux 46 établissements déjà déclarants. Les nouvelles banques participant au MMSR commenceront à effectuer leurs déclarations le 1er juillet 2024. Les données qu’elles fourniront contribueront à accroître la représentativité des données MMSR publiées par la BCE. Les données communiquées par les nouveaux agents déclarants seront incluses dans le calcul du taux à court terme de l’euro (€STR) à un stade ultérieur, afin de s’assurer au préalable que les données nouvellement collectées sont de qualité suffisante. L’élargissement de la population déclarante favorisera la représentativité, la robustesse et la fiabilité du taux de référence.

La BCE a publié de nouvelles statistiques des comptes financiers comportant une ventilation des droits sur les assurances-vie et des droits à pension par type de risque d’investissement

À la suite de la modification de son orientation relative aux obligations de déclaration statistique en matière de comptes financiers trimestriels, en octobre 2023, la BCE a commencé à publier de nouvelles ventilations pour les droits sur les assurances-vie et rentes et pour les droits à pension par type de risque d’investissement, pour l’ensemble des États membres de l’UE et la zone euro. Ces droits constituent des composantes importantes des actifs financiers des ménages. Ils sont enregistrés dans les comptes financiers comme des passifs des sociétés d’assurance et des fonds de pension (et, dans une bien moindre mesure, d’autres secteurs). Les nouvelles données montrent dans quelle mesure les ménages supportent le risque d’investissement des primes et des contributions investies en leur nom.

7.2 Publication de nouveaux indicateurs statistiques liés au climat

En janvier 2023, la BCE a publié sur son site internet une première série d’indicateurs statistiques expérimentaux et analytiques liés au changement climatique. Ces indicateurs ont été établis en étroite coopération avec les banques centrales nationales du SEBC et font partie du plan d’action pour le climat plus large de la BCE.

Les indicateurs expérimentaux sur la finance durable donnent une vue d’ensemble des instruments de dette présentant des caractéristiques de durabilité qui sont émis ou détenus par les résidents de la zone euro. Ils fournissent des informations sur les montants collectés en vue de financer des projets durables et, par extension, sur la transition vers une économie neutre en carbone.

Les indicateurs analytiques relatifs aux émissions de carbone des institutions financières livrent des informations sur l’intensité en carbone des portefeuilles de titres et de prêts des institutions financières. Ils contribuent ainsi à évaluer le rôle de ce secteur dans le financement de la transition vers une économie neutre en carbone et les risques qui y sont associés. Ces indicateurs fournissent des informations sur l’exposition des banques à des contreparties dont les modèles d’activité sont très intensifs en carbone.

Les indicateurs analytiques sur les risques physiques des portefeuilles de prêts et de titres évaluent les risques découlant des retombées de catastrophes naturelles induites par le changement climatique, comme les inondations et les incendies, sur la performance des prêts, des obligations et des actions. Ces indicateurs peuvent être utilisés pour comparer les risques physiques entre les pays, les secteurs et les types de catastrophe.

Les travaux se sont poursuivis sur les trois séries de données afin d’accroître la qualité des informations et la disponibilité des ventilations, y compris, notamment, les détails géographiques et sectoriels.

7.3 Rendre la collecte des données bancaires plus efficace

Le Cadre de déclaration intégré (Integrated reporting Framework, IReF) vise à inclure au maximum, au sein d’un dispositif de déclaration unique standardisé s’appliquant à l’ensemble de la zone euro, les exigences actuelles du SEBC en matière de données statistiques bancaires.

L’IReF constitue une première étape vers une initiative plus large en faveur d’un système de déclaration intégré pour les données statistiques, prudentielles et relatives à la résolution dans l’Union européenne, réclamé par le secteur bancaire européen et demandé par le Parlement européen et le Conseil. L’Autorité bancaire européenne, la BCE, le Conseil de résolution unique et la Commission européenne collaborent au sein d’un groupe de coordination informel dans le but de promouvoir davantage cette intégration. En 2023, ils ont discuté des modalités de fonctionnement d’un comité conjoint pour les déclarations bancaires (Joint Bank Reporting Committee, JBRC), auquel participeraient les autorités européennes et nationales compétentes ainsi que le secteur bancaire. Le JBRC devrait être mis en place en 2024.

Le SEBC coopère aussi étroitement avec le secteur bancaire afin d’optimiser la collecte de données et de réduire la charge globale de déclaration grâce au Dictionnaire des déclarations intégrées des banques (Banks’ Integrated Reporting Dictionary, BIRD). Il s’agit d’une initiative volontaire et collaborative regroupant les banques centrales nationales du SEBC et des banques commerciales. Le BIRD, qui est accessible gratuitement, aide les banques à produire des déclarations statistiques, prudentielles et de résolution conformes aux exigences définies dans la législation européenne. Le BIRD est un dictionnaire intégré dont le contenu est exempt de redondances : les concepts qui sous-tendent les obligations de reporting sont tous identifiés et décrits de façon unique, ce qui aide les banques à décider quelles données extraire de leurs systèmes internes et comment les traiter.

L’une des premières réalisations du BIRD sera d’aider les banques à se conformer à l’IReF, le nouveau cadre de collecte de données qui s’appliquera de manière uniforme dans tous les pays de la zone euro. Les agents déclarants pourront utiliser le BIRD pour compléter leurs déclarations IReF, ainsi que pour s’acquitter d’autres obligations de reporting. Le BIRD contribuera à réduire la charge de déclaration pesant sur les banques et à améliorer la qualité des données transmises aux autorités compétentes.

Encadré 5
Première publication des nouveaux comptes distributionnels de patrimoine des ménages

De nouvelles statistiques expérimentales fournissent, pour la zone euro, des informations trimestrielles sur la distribution du patrimoine des ménages alignées sur les comptes nationaux.

Les nouveaux comptes distributionnels de patrimoine publiés par la BCE donnent des indications sur la répartition du patrimoine des ménages et des pays de la zone euro qui sont cohérentes avec les comptes sectoriels trimestriels agrégés. Ces nouvelles statistiques étayent les analyses de la stabilité économique, monétaire et financière de la BCE Ce projet est lié à la nouvelle stratégie de la politique monétaire de la BCE de 2021, qui a pour objectif d’inclure une évaluation systématique de l’interaction réciproque entre la distribution du revenu et du patrimoine, d’une part, et la politique monétaire, d’autre part. Les comptes distributionnels de patrimoine permettront de mieux appréhender le processus de transmission de la politique monétaire. Cette publication fait suite aux recommandations de l’initiative du G20 sur les lacunes en matière de données (G20 Data Gaps Initiative), visant à développer des informations distributionnelles sur le revenu, la consommation, l’épargne et le patrimoine des ménages, le tout en ligne avec les comptes nationaux.

La méthode et les résultats ont été élaborés et compilés par le Système européen de banques centrales. L’approche commune peut encore être améliorée au niveau national par la prise en compte des sources de données supplémentaires disponibles à l’échelle locale. Certaines banques centrales nationales ont déjà mis en œuvre de telles améliorations. Les données combinent les comptes sectoriels trimestriels agrégés avec les informations individuelles par ménage tirées de l’enquête sur le comportement financier des ménages (Household Finance and Consumption Survey, HFCS) menée entre 2010 et 2021, ainsi que d’autres sources. Les résultats compilés pour les trimestres postérieurs à 2021 sont estimés sur la base des données des comptes sectoriels les plus récents et des résultats de la dernière vague disponible de la HFCS ou, dans certains pays, de données collectées par les INS. Les données sont établies trimestriellement et publiées cinq mois après la fin de chaque période. Les résultats sont disponibles pour la zone euro, 19 pays de la zone (tous les pays membres à l’exception de la Croatie) et la Hongrie.

Les comptes distributionnels de patrimoine fournissent des données sur le patrimoine net ainsi que sur le total des actifs et des passifs et leurs composantes. Les ménages sont ventilés entre les cinq déciles supérieurs de patrimoine net et les 50 % de déciles inférieurs, ainsi que par type d’emploi et par mode d’occupation du logement. L’ensemble des données tirées des comptes distributionnels de patrimoine inclut également le coefficient de Gini pour le patrimoine net, des données sur les patrimoines nets médian et moyen, la part du patrimoine net détenue par les 50 % de ménages les moins nantis, les 10 % et les 5 % les plus aisés, ainsi que le ratio dettes/actifs par décile de patrimoine net des ménages.

Graphique A

Évolution du patrimoine immobilier par décile de patrimoine net et part dans le patrimoine net des 5 % les plus aisés, zone euro

a) Patrimoine immobilier

b) Part dans le patrimoine net des 5 % de déciles les plus nantis

(milliers de milliards d’euros)

(en pourcentage)

Source : Comptes distributionnels de patrimoine.

Encadré 6
Les statistiques sur les paiements ‒ élargissement du champ d’application et augmentation de la fréquence

Le règlement modifié de la BCE concernant les statistiques relatives aux paiements est entré en vigueur le 1er janvier 2022. Les améliorations apportées par rapport au cadre juridique précédent reflètent à la fois les évolutions survenues dans l’univers des paiements et les modifications apparentées introduites dans la législation de l’UE. La fréquence de collecte des données a également augmenté, passant d’annuelle à semestrielle et trimestrielle. La première publication de données statistiques relatives aux paiements, collectées selon le cadre modifié, a eu lieu le 9 novembre 2023 par le biais du portail de données de la BCE. Les données ont été publiées pour les quatre trimestres et les deux semestres de 2022 ainsi que pour les deux premiers trimestres de 2023.

Les statistiques relatives aux paiements mises à disposition sur une base semestrielle incluent désormais des informations sur les services de paiement de détail innovants, tels les paiements effectués à l’aide d’appareils mobiles, les paiements sans contact, le commerce électronique et les nouveaux types de services de paiement définis dans la directive modifiée concernant les services de paiement (DSP2). Un communiqué de presse accompagne chaque publication semestrielle. Dans le cadre de la collecte élargie de données, les informations reprises dans le portail de données de la BCE montrent, entre autres, la forte demande de paiements par carte sans contact, qui, au premier semestre 2023, ont représenté 57 % de l’ensemble des paiements par carte effectués dans la zone euro (graphique A).

Graphique A

Part des paiements par carte sans contact en pourcentage de l’ensemble des paiements par carte effectués dans la zone euro au premier semestre 2023

Source : BCE.

En outre, des données sont collectées concernant les opérations de paiement frauduleuses, les méthodes d’authentification des opérations de paiement et les dispositifs de paiement. Chaque trimestre, aux fins du suivi des échanges transfrontière, des données sur la répartition mondiale par pays des opérations de paiement par carte sont collectées, conjointement à une ventilation par code de catégorie du commerçant.

8 Les activités de la BCE en matière de recherche

En 2023, les recherches de la BCE ont eu pour objet, entre autres, d’évaluer les fluctuations de l’inflation, la transmission monétaire, le changement climatique et les évolutions structurelles. Plus précisément, les responsables de la recherche au sein du Système européen de banques centrales (SEBC) ont lancé le réseau de recherche sur les défis de la transmission de la politique monétaire dans un monde en mutation (Challenges for Monetary Policy Transmission in a Changing World, ChaMP), dont l’objectif est d’exploiter de vastes séries de données granulaires pour analyser la force, le rythme et l’hétérogénéité des canaux de transmission monétaires dans la zone euro sur fond de chocs sans précédent, d’évolutions structurelles et de changements dans la dynamique d’inflation. Le réseau sur le patrimoine et la consommation des ménages (Household Finance and Consumption Network, HFCN) a continué d’apporter de nouveaux éclairages sur l’incidence de l’inflation sur les différents ménages dans la zone euro. L’enquête de la BCE sur les anticipations des consommateurs (Consumer Expectations Survey, CES) est maintenant largement reconnue comme une source d’informations précieuses pour la politique monétaire et pour la recherche en ce qui concerne la formation des anticipations des ménages. Le changement climatique est resté un thème important pour les activités de recherche de la BCE. La BCE a aussi collaboré étroitement avec les banques centrales nationales au sein des pôles de recherche du SEBC, en organisant des ateliers annuels pour débattre des questions les plus urgentes dans leurs différents domaines de spécialisation.

8.1 Le point sur les initiatives de recherche du SEBC

Le réseau ChaMP a commencé ses travaux en mai 2023

Le réseau ChaMP a commencé ses travaux en mai 2023. Ceux-ci devraient durer deux ans, avec une prolongation possible d’une année. Le réseau s’articule autour de deux axes de travail : la transmission de la politique monétaire par le biais du système financier (axe 1) et la transmission de la politique monétaire par la voie de l’économie réelle (axe 2). Le réseau ChaMP s’est doté d’un programme initial d’activité comprenant 180 projets de recherche soumis par 250 auteurs issus de la plupart des banques centrales du SEBC. Les premiers ateliers se sont tenus, respectivement, à Bruxelles le 25 octobre 2023 pour l’axe 2 et à Lisbonne le 31 octobre 2023 pour l’axe 1. L’atelier portant sur l’axe 1 comportait des présentations sur la transmission de la politique monétaire aux entreprises et aux ménages par le canal bancaire et sur le rôle des intermédiaires financiers non bancaires. L’atelier dédié à l’axe 2 s’est concentré sur la pertinence pour la transmission de la politique monétaire des réseaux de production entre les entreprises (par exemple les contraintes d’offre et les autres chocs) et des changements structurels (par exemple la numérisation, la (dé)mondialisation et le changement climatique). Les membres de l’équipe dirigeante se sont rencontrés pour la première fois en personne à Lisbonne le 30 octobre 2023.

En juillet 2023, le HFCN a publié les résultats de la quatrième vague (menée en 2021) de l’enquête sur le patrimoine et la consommation des ménages (Household Finance and Consumption Survey, HFCS). La HFCS est une source d’informations sur les finances et la consommation des ménages qui présente une utilité pour plusieurs projets de recherche menés par des membres du HFCN, par le groupe de recherche de la BCE sur l’hétérogénéité et par des chercheurs externes. Ces projets comprennent des travaux concernant les effets distributifs des chocs d’inflation sur les bilans des ménages [68], l’écart de richesse entre les hommes et les femmes, la mesure de l’incertitude liée aux revenus sur la base de données relatives aux anticipations des ménages, l’hétérogénéité des effets de la pandémie sur les finances des ménages, et les nouveaux comptes distributionnels de patrimoine (cf. encadré 5).

8.2 Le point sur les initiatives de recherche de la BCE

L’enquête sur les anticipations des consommateurs (CES) de la BCE a été élargie en 2023, apportant de nouveaux éclairages sur le secteur des ménages à des fins d’analyse et de recherche en matière de politique monétaire. La BCE a étendu la portée de l’enquête au‑delà des six pays inclus initialement dans la phase pilote (l’Allemagne, la Belgique, l’Espagne, la France, l’Italie et les Pays‑Bas) à cinq autres pays de la zone euro (l’Autriche, la Finlande, la Grèce, l’Irlande et le Portugal). L’enquête s’est révélée être un précieux outil de politique et de recherche pour l’analyse des anticipations d’inflation des ménages. La recherche a montré que la politique monétaire restrictive, en combinaison avec la communication active sur le rôle joué par la politique monétaire pour stabiliser l’inflation future, a soutenu la confiance du public et empêché les chocs récents sur les prix et sur les coûts de s’ancrer dans les anticipations d’inflation des consommateurs [69]. L’enquête CES a également permis de mettre en évidence l’incidence hétérogène de l’inflation sur les anticipations des différents ménages. Il en ressort notamment que les ménages à faibles revenus ont été les plus touchés par l’inflation en raison de leur exposition aux augmentations de prix des biens de première nécessité tels que l’énergie et les produits alimentaires.

Les thèmes de recherche liés au climat sont restés très importants en 2023

Les thèmes de recherche liés au climat sont restés très importants en 2023. Les travaux de recherche ont mis en évidence une déconnexion en ce que les banques qui publient des informations plus détaillées en matière d’environnement ont accordé davantage de crédits à des emprunteurs pollueurs, sans leur imposer de taux d’intérêt plus élevés ni réduire les échéances de leur dette [70]. D’autres travaux ont porté sur les conséquences inattendues de la taxation du carbone. L’analyse du risque d’« inflation verte » (des écarts persistants de l’inflation par rapport à notre cible résultant des taxes sur le carbone ou des systèmes de tarification du carbone) suggère que, lorsque les taxes sur le carbone augmentent très lentement, la décarbonation peut avoir lieu sans compromettre le mandat de la BCE [71]. D’autres études ont montré que les mécanismes de tarification du carbone réduisent les émissions de carbone des entreprises, mais entraînent également un glissement dans la composition de leurs investissements, la réduction de la pollution à court terme étant privilégiée, au détriment de l’innovation verte [72]. Les effets du changement climatique sur notre compréhension de la stabilité macroéconomique et financière ont également été au cœur de la table ronde qui s’est tenue dans le cadre de la conférence « WE_ARE_IN », organisée conjointement avec le Centre de recherche sur la politique économique (Centre for Economic Policy Research, CEPR).

En 2023, les experts de la BCE ont publié 120 articles dans la Working Paper Series de la BCE. Qui plus est, d’autres études de nature plus politique ou méthodologique ont été publiées dans la série d’articles thématiques (Occasional Paper Series), dans la série d’articles statistiques (Statistics Paper Series) et dans la série de documents de discussion (Discussion Paper Series) de la BCE. De nombreuses activités de recherche de la BCE ont également débouché sur des publications dans des revues scientifiques réputées, tandis que douze articles ont été diffusés dans le Bulletin de recherche de la BCE, qui vise un public plus général. L’encadré 7 décrit plus en détail les résultats des récents travaux de la BCE sur les dynamiques économiques après des événements extrêmes, ce thème revêtant une grande importance tant pour la stabilité financière que pour celle des prix.

8.3 Le point sur les travaux des pôles de recherche du SEBC

Les réseaux de recherche existants ont continué de coordonner leurs efforts au sein du SEBC et d’entretenir des relations avec les chercheurs des universités. En particulier, les pôles de recherche du SEBC consacrés aux thèmes « Économie monétaire » (pôle 1), « Macroéconomie internationale, politique budgétaire, économie du travail, compétitivité et gouvernance de l’UEM » (pôle 2), « Stabilité financière, réglementation macroprudentielle et contrôle microprudentiel » (pôle 3) et « Changement climatique » (pôle 4) ont organisé des ateliers sur les questions les plus urgentes dans leurs domaines. En 2023, l’atelier annuel du pôle 1 a été reporté et aura lieu à la Banque nationale de Pologne (Narodowy Bank Polski) à Varsovie, les 21 et 22 mars 2024. Le pôle 2 a organisé son atelier annuel à la Banque d’Angleterre, les 16 et 17 novembre 2023. Il comprenait cinq sessions dédiées à la productivité, aux marchés du travail, à la macroéconomie internationale, aux chocs énergétiques et aux politiques climatique et budgétaire. Le pôle 3 a tenu son atelier annuel à Saariselkä (Finlande), du 23 au 25 novembre 2023, sur les thèmes de la stabilité et de l’intermédiation financières. Le pôle 4 a organisé son deuxième atelier annuel en configuration hybride à la BCE, les 13 et 14 novembre 2023. Les thèmes abordés allaient de l’incidence des chocs de température sur l’inflation à la dynamique de la biodiversité.

Encadré 7
Dynamiques économiques après la survenance d’événements extrêmes – quantification des arbitrages en matière de stabilité financière pour la politique monétaire en périodes d’inflation élevée

Des recherches récentes se sont concentrées sur le développement et l’application de nouveaux outils permettant d’évaluer et de quantifier le lien entre politique monétaire et risques macroéconomiques extrêmes. Les conditions de stabilité financière et la capacité bilancielle du secteur financier jouent un rôle essentiel pour les risques macroéconomiques extrêmes, ce qui est conforme à un nombre croissant de données qui identifient les tensions financières comme étant un indicateur robuste de risques à court terme de ralentissement de la croissance. En outre, les interventions monétaires peuvent affecter la stabilité financière à court terme au travers de leur incidence immédiate sur le secteur financier, liée, d’une part, à la provision de liquidité aux intermédiaires financiers pendant les crises et, d’autre part, aux risques de perturbations soudaines sur les marchés provoqués par la hausse des taux et le durcissement des conditions de financement [73].

Lorsque les tensions inflationnistes ont commencé à s’intensifier en 2022, les principales banques centrales mondiales ont été confrontées à un dilemme : durcir rapidement la politique monétaire au risque d’alimenter les tensions financières après des années de taux d’intérêt extrêmement bas ou adopter une approche plus progressive qui protégerait le système financier et l’activité économique, mais avec le risque d’un ancrage de l’inflation à un niveau supérieur à l’objectif. Pour quantifier cet arbitrage, un modèle empirique non linéaire intégrant les conditions de stabilité financière peut être utilisé pour évaluer les risques extrêmes pour l’économie de la zone euro découlant du cycle de durcissement qui a débuté au troisième trimestre 2022 [74]. L’approche du modèle non linéaire présente l’avantage de capturer les réactions en chaîne et potentiellement variables dans le temps entre la politique monétaire et les risques d’instabilité financière future. Bien que rares, les épisodes d’instabilité financière peuvent avoir des conséquences macroéconomiques dévastatrices, ce qui les rend extrêmement pertinents pour les responsables de la politique monétaire. Des outils permettant d’évaluer ces événements extrêmes peuvent, en tant que tels, jouer un rôle significatif en informant les responsables de la politique monétaire qui cherchent à gérer les risques macroéconomiques.

L’analyse a révélé d’importants risques baissiers pesant sur la croissance économique à partir du troisième trimestre 2022. Le modèle estime à 10 % la probabilité que le PIB en volume de la zone euro recule de plus de 3 % l’année suivante. Les risques pesant sur la stabilité financière ont également été orientés vers une détérioration, avec une probabilité élevée de tensions dans le système financier. Ces risques, alimentés par le net renchérissement des matières premières et les tensions sur les marchés financiers à la suite de l’invasion de l’Ukraine par la Russie, ont dû être relativisés par des risques haussiers pour l’inflation, qui a été bien supérieure à son objectif.

Un resserrement de la politique monétaire au-delà des anticipations du marché aurait amplifié les risques baissiers à court terme pesant sur la croissance et la stabilité financière. En effet, la probabilité de tensions financières à court terme est particulièrement sensible à la politique monétaire. À moyen terme, toutefois, un durcissement de la politique monétaire pourrait également atténuer les risques pour la stabilité financière, en réduisant le levier d’endettement du système financier et en augmentant les primes de risque de tous les actifs financiers. Le modèle quantifie les effets d’un resserrement de la politique monétaire sur l’augmentation des risques à court terme et la diminution des risques à moyen terme pour le système financier et l’économie réelle.

9 Les activités et obligations juridiques de la BCE

Le présent chapitre traite de la compétence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) concernant la BCE et fournit des informations sur les avis de la BCE et les cas de non-respect de l’obligation de consulter la BCE sur les projets de législation dans les domaines relevant de sa compétence. Il rend également compte du suivi par la BCE du respect des interdictions relatives au financement monétaire et à l’accès privilégié.

9.1 Les compétences de la Cour de justice de l’Union européenne concernant la BCE

La CJUE a mis fin à plus d’une décennie de litiges relatifs à la restructuration de la dette publique grecque en 2012 en rejetant le recours concernant la dernière action en dommages et intérêts à l’encontre de la BCE

En septembre 2023, la CJUE a rejeté le recours introduit dans le cadre de la dernière action en indemnité intentée contre la BCE et l’Union européenne (UE) par des détenteurs d’obligations souveraines grecques. Les requérants ont été soumis à la restructuration de la dette publique grecque en 2012 par l’activation de clauses d’action collective rétroactivement adaptées [75]. En première instance, les requérants ont fait valoir que leur participation forcée à la restructuration de la dette publique grecque était imputable à la BCE et à l’UE en raison, entre autres, de la participation de la BCE et de l’UE aux réunions de l’Eurogroupe et de leur rôle dans le processus de consultation ayant conduit à l’activation de clauses d’action collective adaptées [76]. Le Tribunal a estimé que la BCE et l’UE n’avaient pas excédé leurs pouvoirs statutaires et n’avaient pas commis le moindre manquement au droit à la propriété, à la libre circulation des capitaux ou au principe de traitement équitable. Le Tribunal a également jugé que plusieurs dispositions du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne invoquées par les requérants (dont les articles 123 et 127) ne constituaient pas des règles de droit conférant des droits aux particuliers et ne pouvaient donc donner lieu à une responsabilité extracontractuelle de l’UE ou de la BCE. Le pourvoi, qui soutenait que le Tribunal avait examiné certains moyens de manière erronée, a été rejeté par la CJUE dans son intégralité, mettant ainsi un terme à plus d’une décennie de litiges dans lesquels la BCE l’a toujours emporté en démontrant qu’elle avait agi légalement.

La CJUE a considéré que les normes minimales établies par la BCE pour vérifier la qualité des billets en euros ne s’appliquaient pas aux professionnels appelés à manipuler des espèces, tels que les établissements de crédit et les transporteurs de fonds

En avril 2023, la CJUE (cinquième chambre) a rendu son jugement dans le cadre d’une procédure préjudicielle soumise par la Cour suprême administrative de Lituanie (affaire C-772/21). La CJUE a considéré que les normes minimales de la BCE pour le contrôle automatique de la qualité des billets en euros par des équipements de traitement des billets, visées à l’article 6, paragraphe 2, de la décision (BCE/2010/14) relative à la vérification de la qualité des billets en euros, ne s’appliquaient pas aux professionnels appelés à manipuler des espèces, tels que Brink’s Lithuania. Au principal, Brink’s a contesté la décision de la Banque centrale de Lituanie (Lietuvos bankas) selon laquelle Brink’s ne respectait pas les normes minimales fixées par la BCE, étant donné que deux de ses machines de traitement des billets avaient échoué au test de qualité (fondé sur ces normes). La CJUE a établi que les normes minimales de la BCE s’appliquaient aux fabricants d’équipements de traitement des billets. Bien que les professionnels appelés à manipuler des espèces ne soient pas liés par ces normes, ils restent tenus de remédier à une situation dans laquelle une inspection effectuée par une banque centrale nationale (BCN) constate que les équipements de traitement des billets ne respectent pas les normes minimales fixées par la BCE. La CJUE a également conclu que les États membres n’étaient pas autorisés à contraindre les professionnels appelés à manipuler des espèces à se conformer aux normes minimales de la BCE, puisque l’instauration d’une telle obligation en vertu du droit national ne respecterait pas la compétence exclusive de l’UE dans le domaine de la politique monétaire, qui inclut la vérification de l’authenticité et de la qualité des billets.

La CJUE a confirmé les limites du contrôle juridictionnel des décisions en matière de surveillance bancaire fondées sur un large pouvoir d’appréciation

En mai 2023, la CJUE a précisé la portée du contrôle juridictionnel des tribunaux de l’UE sur la décision adoptée par la BCE dans le domaine de la surveillance bancaire sur la base d’un pouvoir discrétionnaire impliquant des appréciations techniques, économiques et financières complexes. L’arrêt de la CJUE faisait suite à un pourvoi de la BCE contre l’arrêt du Tribunal d’avril 2021 par lequel ce dernier annulait la décision de la BCE refusant d’autoriser le Crédit Lyonnais à exclure du calcul de son ratio de levier certaines expositions découlant des montants collectés sur les comptes d’épargne réglementés. Le Tribunal avait considéré que la décision était entachée d’une erreur d’appréciation manifeste parce que la BCE n’avait pas pris en considération le fait que ces comptes n’étaient pas soumis à un risque de retraits massifs et que, par conséquent, ils n’exposaient pas la banque à un risque de liquidations massives. La CJUE, confirmant les arguments de la BCE, a annulé l’arrêt du Tribunal, jugeant que la portée du contrôle juridictionnel des tribunaux de l’UE sur les décisions que la BCE a adoptées sur la base d’un pouvoir discrétionnaire devait être limitée et ne devait pas conduire le Tribunal à substituer sa propre appréciation à celle de la BCE. Ce contrôle ne doit viser qu’à vérifier que la décision n’est pas fondée sur des faits largement erronés ou entachée d’une erreur manifeste d’appréciation ou d’abus de pouvoir. En l’espèce, la CJUE a considéré que le Tribunal avait substitué sa propre appréciation concernant les risques de ventes d’urgence d’actifs auxquels la banque était exposée à celle de la BCE et que, par conséquent, il avait dépassé les limites du contrôle juridictionnel. Statuant définitivement en l’espèce, la CJUE a rejeté le recours du Crédit Lyonnais introduit en première instance en annulation de la décision contestée, jugeant que la banque n’avait pas démontré que la décision de la BCE était entachée d’une erreur manifeste d’appréciation.

La Cour a confirmé que la BCE avait la compétence exclusive de retirer des licences bancaires, y compris dans le cadre de violations graves de la législation nationale en matière de LBC/FT

En septembre 2023, la CJUE [77] a rejeté l’appel de Versobank AS contre le jugement du Tribunal du 6 octobre 2021, lequel avait rejeté l’action en annulation introduite contre la décision de la BCE visant à retirer l’autorisation de la banque d’opérer en tant qu’établissement de crédit. Dans ce jugement, la CJUE a confirmé que la BCE avait la compétence exclusive de retirer la licence bancaire de tous les établissements de crédit établis dans des États membres participants, qu’ils soient classés comme établissements importants ou établissements moins importants, y compris pour des raisons liées à des violations graves de la législation nationale transposant la directive en matière de lutte contre le blanchiment des capitaux.

9.2 Les avis de la BCE et les cas de non-respect

Les articles 127, paragraphe 4, et 282, paragraphe 5, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne disposent que la BCE doit être consultée sur toute proposition de réglementation de l’UE ou sur tout projet de législation nationale dans les domaines relevant de sa compétence. Tous les avis de la BCE sont publiés sur le site EUR-Lex. En 2023, la BCE a adopté douze avis sur des propositions d’actes juridiques de l’UE et 35 avis sur des projets de législation nationale.

Douze cas de non-respect de l’obligation de consulter la BCE sur les projets de législation ont été recensés

Douze cas de non-respect de l’obligation de consulter la BCE sur les projets de réglementations ont été recensés, dont deux par rapport à des actes juridiques de l’Union et dix par rapport à de la législation nationale. La BCE a adopté des avis d’initiative par rapport à sept de ces douze cas.

Le premier cas au niveau de l’UE concernait une proposition de l’UE en vue d’un règlement relatif à des règles harmonisées sur l’accès équitable aux données et sur leur utilisation (règlement sur les données). Ce cas a été considéré comme évident et important, en ce qu’il concerne, entre autres, le périmètre de l’accès à des données privées et leur utilisation par la BCE et les BCN pour une série d’objectifs d’intérêt public définis. Le deuxième cas au niveau de l’UE concernait un paquet législatif de l’UE proposant la création d’un point d’accès unique européen (European Single Access Point, ESAP), fournissant un accès centralisé à des informations publiques pertinentes pour les services financiers, les marchés des capitaux et le développement durable. Ce cas a été considéré comme évident et important, en ce que la création d’un ESAP constitue une étape majeure dans la réalisation de l’union des marchés des capitaux, qui devrait permettre une allocation plus efficiente des capitaux dans l’ensemble de l’Union, ce qui contribuerait à la poursuite du développement et de l’intégration des marchés des capitaux.

Deux cas hongrois ont porté sur l’indépendance de la banque centrale et l’interdiction du financement monétaire. Le premier cas hongrois concernait une loi hongroise portant sur des mesures économiques et financières, qui interdisait à certaines institutions d’acheter, jusqu’au 30 juin 2023, un instrument de dette hongrois libellé en forints émis par une banque centrale nationale du SEBC. Ce cas a été considéré comme évident et important, dans la mesure où il empêche la Banque nationale de Hongrie (Magyar Nemzeti Bank) de choisir en toute indépendance les moyens et les instruments nécessaires pour mener une politique monétaire efficace et réaliser son objectif principal de stabilité des prix de manière indépendante. Le second cas hongrois portait sur des amendements à la loi relative à l’instauration par la Banque nationale de Hongrie (Magyar Nemzeti Bank) de comptes de trésorerie dans une seule devise étrangère qui seront gérés par la Banque nationale de Hongrie, en sus du compte de trésorerie déjà existant en forint hongrois uniquement. Ce cas a été considéré comme évident et important, en ce qu’il concerne la conformité de la rémunération des comptes de trésorerie de l’État d’une BCN avec l’interdiction du financement monétaire.

Deux cas slovaques de non-respect concernaient des espèces. Le premier cas portait sur une loi slovaque sur l’assurance sociale limitant les paiements en espèces pour les cotisations d’assurance sociale publique. Ce cas a été considéré comme évident et important, en raison de la limitation qu’il impose à l’utilisation des espèces comme moyen de paiement et de l’absence d’évaluation de la proportionnalité de cette limitation, compte tenu des critères établis par la CJUE dans son arrêt Hessischer Rundfunk (C-422/19 et C-423/19). Le second cas slovaque concernait une loi slovaque amendant la Constitution de la République slovaque, qui garantit l’émission d’espèces comme moyen de paiement ayant cours légal, et qui précise en outre que chacun a le droit d’effectuer un paiement pour l’achat de biens et la fourniture de services en utilisant des espèces comme moyen de paiement ayant cours légal, garantit que l’acceptation d’un tel paiement ne peut être refusée que pour des motifs raisonnables et applicables de façon générale et garantit le droit d’effectuer une opération en espèces dans une banque ou une succursale d’une banque étrangère. Ce cas a été considéré comme évident et important eu égard au fait que la Constitution garantit l’émission d’espèces comme moyen de paiement ayant cours légal et établit dans ce contexte un principe général d’acceptation obligatoire des espèces, ainsi qu’un cadre d’exemptions dans un État membre ayant l’euro comme monnaie, toutes matières qui relèvent de la compétence exclusive de la BCE et de l’Union.

Cinq cas nationaux de non-respect (quatre cas de non-consultation et une consultation tardive) portent sur des taxes et prélèvements bancaires à usage spécifique mis en place en réponse à la hausse de l’inflation et des taux d’intérêt. Ces cas ont concerné : 1) une loi polonaise portant sur un financement participatif pour les entreprises et une assistance aux emprunteurs, qui a introduit la notion de « vacances hypothécaires » afin d’alléger la charge pesant sur les emprunteurs ayant des prêts hypothécaires en cours à la suite des récents relèvements des taux d’intérêt par la Banque nationale de Pologne (Narodowy Bank Polski) ; 2) une loi portugaise relative à une mesure visant à réduire temporairement de 30 % les taux de l’indice de référence EURIBOR pour les prêts hypothécaires à taux variable, afin d’atténuer les effets de la hausse des taux d’intérêt sur le marché hypothécaire résidentiel et d’offrir une plus grande prédictibilité aux familles ayant des emprunts hypothécaires à taux variable ; (3) une loi roumaine portant sur certaines mesures fiscales et budgétaires visant à assurer le développement financier à long terme de la Roumanie, qui concerne entre autres une taxe sur le chiffre d’affaires pour les établissements de crédit qui sont des entités juridiques roumaines ou des succursales roumaines d’entités juridiques étrangères ; (4) une loi slovaque visant à introduire une taxe spéciale sur les entreprises dans les secteurs réglementés par (a) l’extension du champ d’application des personnes réglementées assujetties à une taxe spéciale afin d’inclure les établissements de crédit opérant en Slovaquie et (b) l’imposition d’un taux de prélèvement spécifique sur lesdits établissements de crédit ; et (5) une loi lettonne amendant la loi sur la protection des consommateurs, qui stipule que, durant l’année 2024, les établissements de crédit seront soumis à l’obligation de payer une redevance de protection des emprunteurs hypothécaires au bénéfice des emprunteurs qui remplissent certaines conditions. Ces cas ont été considérés comme évidents et importants, dans la mesure où ces lois soulèvent des considérations de stabilité financière, de surveillance prudentielle et, dans les cas letton, portugais et slovaque, également de politique monétaire.

Le dernier cas national de non-respect est un cas espagnol portant sur une loi qui demande à la Banque d’Espagne (Banco de España) d’adopter les mesures nécessaires pour permettre aux entreprises d’investissement d’ouvrir des comptes auprès de la banque centrale afin de déposer les fonds qu’elles reçoivent de leurs clients. Ce cas a été considéré comme évident et important au motif qu’outre son incidence directe sur le fonctionnement des systèmes de paiement, il pourrait soulever des problèmes liés à la politique monétaire et à la stabilité financière.

En 2023, la BCE a adopté douze avis sur des propositions d’acte juridique de l’UE.

La BCE a adopté douze avis sur des propositions législatives de l’UE, couvrant des sujets tels qu’un euro numérique ; le cours légal des billets et des pièces en euros ; la réforme de la gouvernance économique dans l’Union ; les cadres européens de gestion de crise et de garantie des dépôts ; les mesures visant à réduire les expositions excessives à des contreparties centrales de pays tiers, à renforcer l’efficacité des marchés de compensation de l’Union et à gérer le traitement du risque de concentration par rapport aux contreparties centrales ainsi que du risque de contrepartie sur les opérations sur produits dérivés faisant l’objet d’une compensation centrale ; les virements instantanés en euros ; les questions climatiques, y compris la performance énergétique des bâtiments, le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité, ainsi que la transparence et l’intégrité des activités de notation sur les plans environnemental, social et de gouvernance ; les statistiques de l’Union européenne du marché du travail relatives aux entreprises ; et la nomination d’un nouveau membre du directoire de la BCE.

La BCE a adopté 35 avis sur des projets de législation nationale

S’agissant des avis sur les réglementations nationales, avis qui couvrent souvent plus d’un thème, la BCE a adopté 19 avis concernant les BCN ; 15 avis relatifs à la stabilité du système financier ; 13 avis concernant la surveillance prudentielle des établissements de crédit ; sept avis sur des questions monétaires et les moyens de paiement ; cinq avis concernant des instruments et opérations de politique monétaire et la mise en œuvre de la politique monétaire ; et trois avis concernant les systèmes de paiement et/ou de règlement de titres. Le thème des taxes et prélèvements bancaires à usage spécifique mis en place en réponse à la hausse de l’inflation et des taux d’intérêt a fait l’objet de sept avis au cours de l’année 2023.

9.3 Le respect des interdictions relatives au financement monétaire et à l’accès privilégié

En vertu de l’article 271, point d, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, la BCE a pour mission de vérifier le respect par les banques centrales nationales (BCN) de l’UE des interdictions prévues par les articles 123 et 124 du Traité et des règlements (CE) no 3603/93 et 3604/93. L’article 123 interdit à la BCE et aux BCN d’accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux autorités publiques et aux institutions et organes de l’UE, de même que d’acquérir sur le marché primaire des instruments de dette émis par ces institutions. L’article 124 proscrit toute mesure ne reposant pas sur des considérations d’ordre prudentiel qui établirait un accès privilégié des autorités publiques et des institutions ou organes de l’UE aux établissements financiers. Parallèlement au Conseil des gouverneurs de la BCE, la Commission européenne vérifie le respect, par les États membres, des dispositions susvisées.

La BCE procède par ailleurs à l’examen des achats par les banques centrales nationales de l’UE, sur le marché secondaire, d’instruments de dette émis par le secteur public national, par le secteur public d’autres États membres et par les institutions et organes de l’UE. En vertu des considérants du règlement (CE) no 3603/93, l’acquisition d’instruments de dette du secteur public sur le marché secondaire ne peut servir à contourner l’objectif poursuivi par l’article 123 du Traité.

Les interdictions découlant des articles 123 et 124 du Traité ont en général été respectées

L’exercice de surveillance réalisé pour 2023 confirme que les articles 123 et 124 du Traité ont en général été respectés.

La BCE continuera de surveiller le rôle de la Banque centrale de Hongrie (Magyar Nemzeti Bank) dans la Bourse de Budapest vu que l’acquisition par la Banque centrale de Hongrie, en 2015, d’une participation majoritaire dans la Bourse de Budapest peut toujours être considérée comme soulevant des préoccupations en matière de financement monétaire.

En 2023, la cession définitive par la Banque centrale d’Irlande (Central Bank of Ireland/Banc Ceannais na hÉireann) d’actifs liés à l’Irish Bank Resolution Corporation, par la vente d’obligations à taux variable à long terme, a mis fin aux inquiétudes sérieuses en matière de financement monétaire qui persistaient depuis 2013.

Le financement par les BCN d’obligations incombant au secteur public à l’égard du Fonds monétaire international (FMI) n’est pas considéré comme un financement monétaire pour autant que les créances étrangères qui en découlent présentent toutes les caractéristiques d’avoirs de réserve. Or, les donations financières telles que celles fournies les années précédentes par la Banque nationale de Belgique et la Banque de France par le biais du FMI dans le cadre de l’allègement de la dette des pays lourdement endettés n’ont débouché sur aucune créance étrangère et n’ont dès lors pas nécessité de mesures de correction.

10 La BCE dans un contexte européen et international

En 2023, la BCE a continué d’interagir étroitement avec ses interlocuteurs européens et internationaux. Les rapports entre la BCE et le Parlement européen font partie intégrante du cadre de responsabilité de la BCE. La BCE a participé à des auditions régulières de la commission des affaires économiques et monétaires du Parlement européen (ECON) et a échangé des courriers avec elle. Elle a également entretenu des contacts avec la commission ECON dans le contexte de ses travaux en cours sur l’euro numérique. À l’échelle internationale, la BCE s’est engagée dans un dialogue constructif avec ses partenaires du G20. Elle a notamment soutenu les initiatives de la présidence indienne en matière de réglementation du secteur financier, de paiements transfrontière et de crypto-actifs. La BCE a par ailleurs continué de nouer des discussions pertinentes pour les banques centrales sur divers dossiers liés au fonctionnement du Fonds monétaire international (FMI), notamment la révision des quotes-parts du FMI, les modifications apportées aux politiques de prêt et à la boîte à outils du FMI, ainsi que les questions relatives aux droits de tirage spéciaux (DTS) et à leur acheminement.

10.1 L’obligation de rendre compte de la BCE

L’obligation de rendre compte est une contrepartie essentielle de l’indépendance

L’indépendance de la BCE est consacrée dans le traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (TFUE). Cette indépendance signifie que la BCE peut prendre des décisions à l’abri de toute influence politique en vue d’atteindre son objectif premier de maintenir la stabilité des prix. Cependant, l’obligation de rendre compte est une contrepartie essentielle de cette indépendance. La BCE rend compte de ses actions au Parlement européen, qui représente les citoyens de l’UE. Le respect de l’obligation de rendre compte constitue un pan primordial des responsabilités de la BCE. Le dialogue bilatéral entre la BCE et le Parlement européen permet à la BCE d’expliquer ses actions et ses politiques aux représentants des citoyens de l’UE et d’écouter leurs préoccupations. Ce dialogue a évolué au fil du temps pour aller au‑delà des exigences définies à l’article 284, paragraphe 3, du TFUE. Afin de continuer de promouvoir une vision commune et une coopération efficace, la présidente de la BCE et la présidente du Parlement européen ont procédé, en juin 2023, à un échange de lettres clarifiant les dispositions en matière d’obligation de rendre compte fixées entre la BCE et le Parlement européen dans le domaine des activités de banque centrale.

La BCE a poursuivi ses interactions avec les représentants élus des citoyens de l’UE

En 2023, la présidente de la BCE a participé à quatre auditions régulières de la commission ECON, ainsi qu’au débat en séance plénière consacré au Rapport annuel 2021 de la BCE en février, à la suite duquel le Parlement européen a adopté une résolution. En mai, le vice-président a ensuite présenté le Rapport annuel 2022 de la BCE à la Commission ECON. Le même jour, la BCE a publié ses commentaires sur la contribution apportée par le Parlement européen dans le cadre de sa résolution sur le Rapport annuel 2021. En outre, la BCE a reçu en mai la visite annuelle d’une délégation de membres de la commission ECON. Enfin, la BCE a répondu à 27 questions écrites de membres du Parlement européen dans le courant de l’année.

Par ailleurs, la BCE a interagi étroitement avec la commission ECON dans le cadre de ses travaux sur l’euro numérique. En 2023, M. Panetta, qui était à l’époque membre du directoire, a participé à trois auditions de la commission ECON spécialement consacrées à ce thème afin de discuter des progrès réalisés durant la phase d’étude de l’euro numérique, y compris des questions liées à l’expérience des utilisateurs, au cours légal et au processus législatif relatif à l’euro numérique [78]. La BCE a également organisé des séminaires techniques pour le personnel avec le Parlement européen et a pris part à des événements organisés par des membres du Parlement européen sur le thème de l’euro numérique.

Le soutien à l’euro a avoisiné un niveau record en 2023

La dernière enquête Eurobaromètre, menée en octobre et en novembre 2023, indique que 79 % des personnes interrogées dans la zone euro soutiennent l’euro et que 43 % d’entre elles font généralement confiance à la BCE. Le niveau élevé de soutien en faveur de l’euro est un signal très positif, mais le niveau de confiance relativement plus faible envers la BCE montre que celle-ci doit poursuivre ses efforts de communication envers le public et les représentants élus des citoyens. À l’avenir, la BCE continuera aussi de mettre tout en œuvre pour susciter la confiance du public. À cet effet, la BCE reste déterminée à dialoguer activement et de manière constructive avec le Parlement européen et les citoyens de la zone euro.

10.2 Les relations internationales

G20

Le G20 a mené ses activités dans un contexte de tensions géopolitiques accrues et dans un environnement international difficile, s’efforçant de préserver le multilatéralisme

Durant la présidence indienne du G20 en 2023, l’économie mondiale a continué de subir l’influence négative de la guerre menée par la Russie contre l’Ukraine et, au dernier trimestre, de la montée de l’incertitude liée au conflit au Moyen-Orient. Les ministres des Finances et les gouverneurs des banques centrales du G20 ont dû faire face à un ralentissement de la croissance mondiale, à de fortes tensions inflationnistes et à la volatilité des prix de l’énergie. Si les divergences entre les membres sur des questions géopolitiques ont empêché l’adoption de communiqués lors des réunions de février et de juillet 2023, la déclaration commune des dirigeants du G20 à New Delhi et la décision d’admettre l’Union africaine comme futur membre permanent du G20 ont souligné les efforts déployés par les membres pour préserver l’efficacité et le caractère inclusif du forum. La BCE a approuvé et appuyé les initiatives de la présidence indienne visant à améliorer le cadre réglementaire applicable aux secteurs bancaire et non bancaire, à faciliter les paiements transfrontières et à parvenir à un accord sur une feuille de route du G20 destinée à contenir les risques liés aux écosystèmes de crypto-actifs. La BCE a également soutenu les efforts du G20 pour développer la finance durable issue de sources privées et publiques au profit de la transition mondiale vers la neutralité carbone. Compte tenu du projet d’euro numérique, la BCE a également accordé une priorité élevée aux discussions du G20 sur les choix de conception et sur les garanties des monnaies numériques de banque centrale.

Les questions de politique liées au FMI et à l’architecture financière internationale

La BCE a contribué activement aux discussions au sein du FMI. En 2023, le FMI a décidé d’augmenter ses ressources en quotes-parts, a continué d’adapter sa panoplie d’instruments et a poursuivi son soutien à l’Ukraine

La BCE a continué de jouer un rôle actif dans les débats relatifs au système monétaire et financier international menés au sein du Fonds monétaire international (FMI) et d’autres enceintes, promouvant le point de vue de la banque centrale dans les positions européennes communes [79]. En 2023, les principaux thèmes abordés comprenaient la révision des quotes-parts du FMI, les modifications apportées aux politiques et instruments de prêt du FMI, ainsi que les questions relatives aux droits de tirage spéciaux (DTS) et à leur acheminement.

Le 15 décembre 2023, le conseil des gouverneurs du FMI a achevé la 16e révision générale des quotes-parts et approuvé une augmentation de 50 % des quotes-parts des pays membres, ce qui portera le total des quotes-parts du FMI à 715,7 milliards de DTS [80]. L’augmentation des quotes-parts sera répartie entre les membres proportionnellement à leurs quotes-parts actuelles. Des modifications ont été apportées aux instruments du FMI, ce qui a également permis au Fonds de poursuivre son soutien à l’Ukraine [81]. Un accord de 48 mois au titre du mécanisme élargi de crédit pour l’Ukraine a été approuvé fin mars 2023 [82]. Le FMI a par ailleurs continué de renforcer le rôle préventif et la flexibilité de ses instruments en achevant l’examen des instruments de précaution en octobre 2023. Fin 2023, les prêts octroyés par le FMI demeuraient proches de leurs sommets historiques : l’encours total des crédits du Compte des ressources générales s’élevait à quelque 92 milliards de DTS, l’exposition au plus grand emprunteur du Fonds représentant un tiers de ce montant.

Des ressources ont été mobilisées pour aider les pays en difficulté

Dans le prolongement de l’allocation de DTS d’un montant de 650 milliards de dollars en 2021 afin de répondre à un besoin global à long terme de compléter les réserves existantes, ce qui a également aidé les pays à faire face à la pandémie, les efforts consentis pour acheminer les DTS ou des ressources équivalentes de manière à continuer d’aider les économies de marché émergentes et les pays à faibles revenus ont franchi une étape importante en juin 2023, lorsque l’ambition de mobiliser 100 milliards de dollars au niveau mondial s’est concrétisée. Les États membres de l’UE ont largement contribué à cet effort, à hauteur de plus de 31 % des engagements. Pour l’essentiel, ces moyens seront affectés au fonds fiduciaire pour la résilience et la durabilité et au fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et la croissance du FMI. La BCE a également continué de soutenir les initiatives internationales visant à aider les pays vulnérables à remédier aux fragilités croissantes liées à la dette, en particulier la mise en œuvre du cadre commun du G20 pour le traitement de la dette.

Encadré 8
L’objectif secondaire de la politique monétaire de la BCE

L’objectif principal de la BCE, le maintien de la stabilité des prix, est inscrit à l’article 127, paragraphe 1, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne. Le Traité dispose en outre que « sans préjudice de l’objectif de stabilité des prix », la BCE apporte son soutien aux politiques économiques générales dans l’UE, en vue de contribuer à la réalisation des objectifs de l’Union, tels que définis à l’article 3 du traité sur l’Union européenne [83]. Cet encadré explique comment l’objectif secondaire est pris en compte dans la conduite de la politique monétaire et des activités de reporting de la BCE [84].

Comment la BCE poursuit-elle son objectif secondaire au travers de ses décisions de politique monétaire ?

Dans ses décisions de politique monétaire, la BCE évalue la proportionnalité de chaque mesure [85]. Cette évaluation comprend une analyse des bénéfices et des possibles effets secondaires des mesures de politique monétaire, y compris, s’il y a lieu, de leur incidence sur l’objectif secondaire de la BCE. L’analyse examine comment ces mesures interagissent et s’équilibrent au fil du temps. Concrètement, en ajustant ses instruments de politique monétaire – sous réserve que deux configurations d’un instrument donné soient également propices et non préjudiciables à la stabilité des prix –, le Conseil des gouverneurs choisit la configuration qui soutient le mieux les politiques économiques générales de l’Union en termes de croissance, d’emploi et d’inclusion sociale, et qui préserve la stabilité financière et contribue à réduire l’impact du changement climatique, contribuant ainsi aux objectifs plus larges de l’Union [86]. Par exemple, la BCE réoriente ses réinvestissements de titres du secteur des entreprises vers les émetteurs qui affichent de meilleures performances climatiques depuis octobre 2022. Cette décision a été prise afin de mieux prendre en compte le risque financier lié au climat dans le bilan de l’Eurosystème et, eu égard à l’objectif secondaire de la BCE, de soutenir la transition verte de l’économie conformément aux objectifs de neutralité climatique de l’UE [87].

Comment la BCE présente-t-elle l’incidence de ses actions sur son objectif secondaire ?

La BCE communique sur la manière dont elle poursuit son objectif secondaire dans le cadre de son reporting sur la politique monétaire. Durant les conférences de presse relatives à la politique monétaire et dans les comptes rendus détaillés de ses réunions de politique monétaire, la BCE apporte un éclairage sur les facteurs qui influencent ses décisions de politique monétaire, y compris des considérations liées à son objectif secondaire. En outre, des articles publiés régulièrement dans le Bulletin économique et dans le Bulletin de recherche, ainsi que des articles thématiques occasionnels (Occasional Papers), proposent des analyses approfondies de la manière dont la politique monétaire interagit avec des domaines essentiels tels que le marché du travail, la stabilité financière et le changement climatique [88]. Enfin, lorsqu’elle s’acquitte de ses obligations de rendre compte et de transparence vis-à-vis du Parlement européen et du public, la BCE fournit des précisions sur la manière dont elle aborde certains aspects de son objectif secondaire, tels que les interactions entre la stabilité des prix et la stabilité financière ou l’intégration de considérations liées au changement climatique dans ses opérations de politique monétaire [89].

Le reporting sur les décisions de politique monétaire et les analyses sous-jacentes pertinentes pour l’objectif secondaire sont abordés dans différents chapitres des rapports annuels de la BCE. Le Rapport annuel 2023 fournit notamment : a) un état des lieux des progrès apportés en 2023 aux capacités analytiques de la BCE en matière de changement climatique dans le domaine des statistiques, y compris les nouveaux indicateurs statistiques liés au climat relatifs à la finance durable, aux émissions de carbone et aux risques physiques (section 7.2) ; b) un rappel du fait que l’orientation à moyen terme de la politique monétaire de la BCE a permis une influence graduelle sur la croissance et sur l’emploi, qui sont des éléments de l’objectif secondaire de la BCE (section 1.2) ; c) un rappel du fait que la BCE a continué de réorienter ses achats d’obligations d’entreprises vers des émetteurs affichant de meilleures performances climatiques (sections 2.1, 2.2 et 2.3) et a publié des informations financières relatives au climat concernant les titres d’entreprises détenus dans le cadre du programme d’achats de titres du secteur des entreprises et du programme d’achats d’urgence face à la pandémie (section 2.2) ; d) une évaluation récapitulative de la situation des banques et du système financier ainsi que des précisions sur les sources de résilience et de fragilité pour la stabilité financière (chapitre 3), de même qu’un inventaire des recherches menées récemment par la BCE sur la quantification des arbitrages en matière de stabilité financière pour la politique monétaire en périodes d’inflation élevée (encadré 7) ; et e) une synthèse des efforts déployés par la BCE face aux enjeux climatiques et environnementaux ainsi qu’un état d’avancement de ses travaux en la matière (section 11.5).

11 La promotion de la bonne gouvernance et de la durabilité sociale et environnementale

La BCE mène des travaux essentiels sur les questions environnementales, sociales et de gouvernance (ESG). Pour une institution publique telle la BCE, ces activités incluent son obligation de rendre compte aux citoyens de l’UE et à leurs représentants élus, la communication et le dialogue avec différents publics, le respect des normes d’éthique et de transparence les plus élevées, la mise à disposition de moyens d’action pour le personnel et la promotion de son bien-être, ainsi que l’étude des incidences et des risques en matière de climat et d’environnement.

11.1 Le point sur les questions environnementales, sociales et de gouvernance

En 2023, la BCE a poursuivi ses travaux sur les questions environnementales, sociales et de gouvernance

Cette vue d’ensemble des principales évolutions dans les domaines ESG en 2023 est complétée par d’autres sections du présent rapport annuel et par des informations supplémentaires disponibles sur le site internet de la BCE (tableau 11.1).

Les sections 11.2 et 11.3 décrivent comment la BCE, en tant qu’institution européenne, s’est appliquée à renforcer constamment ses cadres de gouvernance et à favoriser la transparence et la proximité avec les citoyens en 2023. La section 11.2 revient sur les actions menées par la BCE pour consolider la coopération européenne et internationale sur les questions d’éthique, d’intégrité et de bonne conduite, afin de répondre également à l’intérêt croissant du public pour ces matières [90]. La section 11.3 détaille les efforts concertés de la BCE pour expliquer clairement ses politiques en période de forte inflation, en ciblant différents publics et en réagissant aux préoccupations des citoyens quant à l’avenir de notre monnaie. La section 11.4 retrace les principales évolutions dans la gestion des ressources humaines de la BCE en 2023 et fournit des informations sur la nomination d’un agent chargé de la diversité et de l’inclusion et d’un médiateur. Enfin, la section 11.5 présente les travaux de la BCE sur les sujets liés au climat et à l’environnement et apporte des précisions sur des publications plus spécialisées dans ces domaines.

Les risques liés au climat sont progressivement intégrés dans le cadre global des risques

La BCE traite des risques ESG dans ses cadres de gestion des risques financiers et non financiers, comme l’explique le chapitre sur la gestion des risques des comptes annuels 2023 de la BCE.

Les tests de résistance climatique ont débuté en 2022 et sont depuis lors devenus un exercice régulier. Ils font partie des mesures visant à intégrer progressivement les risques liés au climat dans le cadre global des risques. À la faveur du premier test de résistance au risque climatique du bilan de l’Eurosystème, la BCE a évalué la sensibilité du profil de risque financier de l’Eurosystème au changement climatique et amélioré ainsi les capacités de celui-ci à évaluer les risques liés au climat. Les résultats ont fourni une première estimation de l’incidence du risque climatique sur le bilan de la BCE.

11.2 Le renforcement de l’éthique et de l’intégrité

La sensibilisation à l’éthique et à l’intégrité est restée une priorité essentielle en 2023

Le bureau de conformité et de gouvernance (Compliance and Governance Office, CGO) de la BCE est chargé d’établir les règles d’éthique et de gouvernance appropriées et d’en contrôler le respect. En 2023, les nouvelles initiatives ont porté sur l’amélioration de l’offre de formations pour le personnel, allant des cours d’introduction et des programmes de formation en ligne pour les nouveaux engagés aux remises à niveau pour le personnel en poste depuis plus longtemps, en passant par des formations sur mesure pour répondre aux besoins de fonctions opérationnelles spécifiques. Divers projets de sensibilisation ont également été organisés sur une période de six à huit semaines autour de la Journée mondiale de l’éthique pour attirer l’attention du personnel de la BCE sur la nécessité de respecter les règles d’éthique professionnelle et pour informer le public des efforts déployés par la BCE en la matière. Le CGO a continué de moderniser et de rationaliser ses processus, de faciliter l’accès du personnel aux conseils en matière d’éthique et de se conformer aux normes d’éthique de la BCE.

La prise de conscience accrue dans les domaines de l’éthique et de l’intégrité ainsi que la facilité d’accès aux conseils en matière d’éthique ont donné lieu à une forte augmentation du nombre de requêtes, qui est passé de 1 690 en 2022 à 2 767 en 2023 (graphique 11.1).

Les contrôles de conformité, qui ont été menés avec l’aide d’un cabinet d’audit externe, ont confirmé que les membres du personnel comme les membres des organes de haut niveau de la BCE respectaient globalement les règles relatives aux transactions financières privées.

Graphique 11.1

Vue d’ensemble des requêtes reçues des membres du personnel de la BCE en 2023

Source : BCE.

Le comité d’éthique professionnelle indépendant complète la structure de gouvernance de la BCE. Il conseille les responsables de haut niveau de la BCE sur les questions d’éthique, principalement en ce qui concerne les activités privées et les activités rémunérées exercées après la cessation des fonctions, et évalue leurs déclarations d’intérêts. En outre, le comité d’éthique professionnelle suit les évolutions européennes et internationales en matière d’éthique et de bonne conduite. Il remet également des avis sur des modifications souhaitables du cadre d’éthique professionnelle de la BCE pour les responsables de haut niveau de l’institution, comme le renforcement récent des règles relatives aux transactions financières privées.

Le comité d’éthique et de conformité a continué d’apporter son soutien aux banques centrales nationales et aux autorités compétentes nationales quant à la mise en œuvre des orientations en matière d’éthique professionnelle adoptées en 2021 et de fournir des indications en vue d’une interprétation cohérente et uniforme des normes d’éthique dans l’ensemble de l’Eurosystème. En outre, afin de tirer le meilleur parti de la diversité des points de vue, le comité a organisé des sessions sur des sujets d’intérêt mutuel, auxquelles ont participé plus de 50 institutions et organisations publiques différentes.

Au niveau européen, la BCE a continué de jouer un rôle actif en 2023 dans les négociations interinstitutionnelles en cours sur la création d’un organe indépendant de l’UE chargé des questions d’éthique.

Au niveau international, la BCE a été étroitement associée au partage de connaissances et à l’élaboration de normes au sein du Réseau Déontologie des organisations multilatérales, dont elle assure la vice-présidence, au travers de ses contributions aux réunions et à la conférence annuelle du réseau. La BCE a également contribué au premier examen par l’UE de la mise en œuvre de la convention des Nations unies contre la corruption.

11.3 La communication et la transparence de la politique de la BCE

La BCE a été confrontée à un environnement de communication complexe

L’inflation en recul, bien que toujours beaucoup trop élevée, et les effets de plus en plus tangibles du resserrement de la politique de la BCE sur l’économie ont créé en 2023 un environnement délicat pour la communication de la BCE. En cette période d’incertitude exceptionnelle et de crise du coût de la vie, la BCE a dû s’efforcer de réaffirmer auprès des citoyens et des entreprises son engagement à ramener l’inflation à son niveau cible et de les convaincre que les principaux outils dont elle dispose lui permettraient d’y parvenir.

Le maître-mot de la communication de la BCE a été « expliquer » encore et encore afin d’aider les citoyens à comprendre ses décisions

Dans cette optique, la BCE a renforcé la communication autour de sa politique monétaire. Lorsque le resserrement de la politique monétaire a commencé à produire l’effet escompté de modération de la demande, il était important d’expliquer les décisions de la BCE et de rappeler que son objectif premier est de lutter contre l’inflation. Parallèlement aux multiples interventions publiques des responsables de la BCE, plusieurs billets publiés sur le Blog de la BCE ont expliqué comment l’inflation influe sur les revenus réels et l’importance des politiques structurelles des pouvoirs publics pour lutter contre l’inflation, et ont fourni des informations analytiques sur les niveaux de participation au marché du travail historiquement élevés. Plusieurs podcasts de la BCE ont décrit les facteurs déterminants de l’inflation et un podcast publié pendant les vacances d’été est revenu sur le rôle de la BCE dans la préservation de la stabilité des prix.

Une communication humble pour restaurer la confiance du public

Dans le même temps, il a fallu apporter des réponses à des questions légitimes sur les raisons pour lesquelles la BCE n’avait pas prévu la hausse de l’inflation et avait fait fausse route dans ses projections macroéconomiques. La clarté et la précision des projections de l’Eurosystème sont particulièrement importantes pour ancrer les anticipations et renforcer la crédibilité de la politique menée par la BCE. De même, il était essentiel d’expliquer les différentes sources d’incertitude et de communiquer avec humilité dans le but de restaurer la confiance.

Les communications de la BCE ont visé à contextualiser les pertes bilancielles de la BCE et des banques centrales de l’Eurosystème

En 2023, dans le sillage de décisions de politique monétaire antérieures, notamment des achats d’actifs de grande ampleur, la BCE et d’autres banques centrales de l’Eurosystème ont dû faire face à des pertes sur leurs bilans. La BCE s’est particulièrement employée à expliquer d’où proviennent les bénéfices et les pertes de la banque centrale, notamment par la voie d’une note explicative spécifique. Cela a également permis à la BCE de replacer ces pertes dans le contexte de bénéfices significatifs enregistrés pendant de nombreuses années et de souligner que son rôle consiste à prendre des décisions de politique monétaire qui servent l’objectif de stabilité des prix sans chercher à réaliser des bénéfices.

En 2023, d’autres efforts de communication extraordinaires ont été consacrés à l’avenir de notre monnaie, que ce soit sous la forme d’espèces ou sous un format numérique.

La BCE a commencé à plancher sur la conception de la prochaine série de billets en euros en associant les citoyens européens

La BCE a décidé que le choix du graphisme de la troisième série de billets en euros devrait inclure un processus participatif impliquant le grand public. À cette fin, les Européens de la zone euro ont été invités à répondre à une enquête en ligne sur les thèmes de la prochaine série de billets et ont eu la possibilité de sélectionner parmi sept options leur thème graphique favori. Plus de 365 000 citoyens issus des quatre coins de la zone euro ont participé et exprimé leurs préférences. Celles-ci ont été prises en compte dans la décision du Conseil des gouverneurs de retenir comme thèmes « la culture européenne » et « les fleuves et oiseaux » pour les futurs billets. La communication et la sensibilisation autour de la prochaine série de billets ont rappelé l’attachement de la BCE et de l’Eurosystème aux espèces.

La BCE a insisté sur le maintien des espèces, complétées potentiellement par un euro numérique

L’affirmation de son engagement envers les espèces en 2023 revêtait une importance d’autant plus grande que la BCE se prépare à éventuellement introduire un euro numérique.

En octobre 2023, le Conseil des gouverneurs a décidé de clôturer la phase d’étude du projet d’euro numérique et de poursuivre avec la phase préparatoire. Cette étape s’est accompagnée d’une campagne de communication multilingue menée sur plusieurs fronts, impliquant divers canaux et produits de communication dans tous les pays de la zone euro, notamment une page officielle LinkedIn sur le projet d’euro numérique et une page internet dédiée au projet d’euro numérique. La campagne s’est concentrée sur les avantages et sur l’importance de l’introduction d’un euro numérique, sur les préoccupations relatives à la protection de la vie privée et sur le rôle des espèces et de la nouvelle monnaie numérique en tant que moyens de paiement ayant cours légal. Au-delà de sa communication destinée aux acteurs du secteur, aux responsables politiques et aux organisations de la société civile, la BCE s’est également tournée vers des créateurs de contenu en ligne, suivant en cela une approche innovante. L’objectif était d’encourager les entrepreneurs numériques opérant dans le domaine de la monnaie et de la finance à exposer la logique qui sous-tend l’introduction d’un euro numérique et à en expliquer les caractéristiques à leur communauté et à leurs abonnés en ligne.

De manière générale, ces efforts conjugués et la large couverture médiatique qui en a résulté ont permis de faire connaître le projet d’euro numérique et d’amener une meilleure compréhension des enjeux. Une analyse a montré que si, dans un premier temps, l’euro numérique suscitait un plus grand intérêt auprès des plus jeunes générations d’Européens, la prise de conscience et la compréhension ont désormais gagné toutes les tranches d’âge.

L’année 2023 a également marqué la célébration du 25e anniversaire de la BCE. À cette occasion, la BCE a organisé un événement auquel ont participé les principaux représentants des institutions de l’Union européenne, de l’Allemagne, pays hôte de la BCE, et d’autres États de la zone euro, ainsi que les anciens présidents de la BCE, Jean-Claude Trichet et Mario Draghi. Par ailleurs, fin 2023 et début 2024, la BCE a commémoré les 25 ans de l’euro conjointement avec d’autres institutions de l’UE. Ces étapes historiques ont permis à la BCE de mettre en lumière le succès de la monnaie unique, de même que ses avantages pour les citoyens européens en tant que modèle de stabilité dans le monde et symbole de l’unité européenne.

Une campagne destinée aux jeunes sur les médias sociaux intitulée « La stabilité, c’est notre métier »

Dans le but de toucher les jeunes tout spécialement, la BCE a mené en 2023 la campagne intitulée « La stabilité, c’est notre métier » sur les médias sociaux. L’idée était d’expliquer, d’une manière interactive et personnalisée, les principaux aspects de la BCE et de ses activités : l’objectif de stabilité des prix, le rôle de la supervision bancaire et comment les décisions de la BCE influencent les citoyens au jour le jour. Les posts de la campagne ont généré 166 millions de vues et touché 43 millions de jeunes.

Les demandes d’accès du public ont grimpé par rapport à 2022, les documents portant sur des sujets institutionnels et de gouvernance ayant suscité un intérêt particulièrement plus marqué

Permettre au public d’accéder à des documents de la BCE fait partie intégrante de la politique de transparence de l’institution. Elle favorise son ouverture et renforce sa légitimité démocratique.

En 2023, la BCE a reçu davantage de demandes d’accès à des documents par rapport à 2022 (73 demandes contre 63). Si les demandes ont continué de couvrir un large éventail de sujets, notamment des questions prudentielles ou des initiatives de premier plan tel le projet d’euro numérique, les demandes d’accès à des documents portant sur des questions institutionnelles et de gouvernance ont sensiblement progressé, reflétant l’attention accrue que le public porte à ces sujets.

Dans le prolongement de l’engagement de la BCE en faveur de la transparence, les documents publiés en réponse aux demandes d’accès du public ont généralement été mis à disposition par l’intermédiaire du Registre public de documents de la BCE. Qui plus est, dans un souci d’amélioration de la transparence, la BCE a établi un relevé des sujets abordés dans les demandes d’accès aux documents qu’elle a reçues depuis 2004.

Aucun constat de mauvaise gestion dans le cadre du traitement par la BCE des demandes d’accès du public n’a été mis au jour par le Médiateur européen.

Les initiatives de la BCE en faveur de la transparence, de l’ouverture et de la proximité vis-à-vis des citoyens ont été reconnues par sa nomination sur la liste restreinte du Prix d’excellence de la bonne administration 2023 du Médiateur européen qui salue son engagement à « aider les citoyens de l’UE à comprendre la politique monétaire en période de forte inflation ».

11.4 Permettre à nos collaborateurs d’exceller pour l’Europe

Dans le contexte du retour progressif au bureau à partir de 2022, la BCE s’est concentrée sur les politiques et les programmes visant à favoriser l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée, le développement de ses collaborateurs et la résilience organisationnelle. Une nouvelle politique en matière de télétravail renforçant la flexibilité pour les membres du personnel et les stagiaires a été instaurée en janvier 2023. La nouvelle plateforme d’apprentissage virtuel, EUREKA, a été mise à la disposition des institutions de l’ensemble du Système européen de banques centrales (SEBC) et du mécanisme de surveillance unique (MSU) en 2023, offrant un accès plus large encore aux possibilités de formation et de mobilité. Conformément à son objectif d’instaurer une culture de l’inclusion, la BCE a nommé un médiateur ainsi qu’un conseiller en ressources humaines pour la diversité et l’inclusion.

Culture de travail

La BCE a lancé sa nouvelle politique de télétravail

À l’issue de la phase de transition menée en 2022, une nouvelle politique de télétravail est entrée en vigueur le 1er janvier 2023. S’appuyant sur les expériences globalement positives rapportées au cours de la période de travail à distance, la nouvelle politique prévoit des possibilités de télétravail flexibles pour le personnel. Elle permet à l’ensemble des membres du personnel et des stagiaires de la BCE de télétravailler jusqu’à 110 jours par an, sous réserve de compatibilité avec les besoins opérationnels.

Figure 11.1

Télétravail effectué par le personnel de la BCE en 2023

Source : BCE.
Note : Données obtenues en janvier 2024.

Une formation a été proposée pour entretenir une culture durable de respect mutuel

Soucieuse d’être à l’écoute des membres de son personnel, la BCE a mené une enquête éclair début 2023. Les résultats de ce sondage ont montré que les collaborateurs demeuraient engagés, investis et dévoués à l’égard des travaux de la BCE. Il reste toutefois du chemin à parcourir pour renforcer la culture de travail. Dans le prolongement de cette enquête, le directoire a défendu une initiative visant à promouvoir une culture organisationnelle dans laquelle les travailleurs apprennent à réagir efficacement à des comportements inappropriés. Des ateliers interactifs ont été mis en place pour stimuler une culture permettant à chacun de s’exprimer et pour améliorer notre façon de collaborer.

Développement des talents

Le personnel de la BCE a profité de possibilités de mobilité

L’année 2023 a constitué un jalon important en matière de mobilité du personnel au sein du SEBC et du MSU. La nouvelle plateforme d’apprentissage de la BCE, EUREKA, a offert pour la première fois un inventaire centralisé des possibilités de formation et de mobilité proposées en collaboration avec les autres institutions du SEBC et du MSU. EUREKA favorise le partage des connaissances et la collaboration, et est accessible au personnel de la BCE ainsi qu’à l’ensemble des collaborateurs du SEBC et du MSU. Au titre de la cinquième édition du programme Schuman lancée en 2023, 41 projets comportant des opportunités de détachement ont été soumis, permettant des échanges de personnel entre la BCE, des autorités compétentes nationales (ACN) et des banques centrales nationales (BCN). La BCE a également continué de procéder à des échanges de personnel avec plusieurs ACN et institutions européennes, dans le cadre d’un programme d’échange dédié au MSU. Fin 2023, neuf échanges étaient en cours avec deux ACN (la Banque d’Espagne (Banco de España) et l’Autorité française de contrôle prudentiel et de résolution) ainsi qu’avec une agence (l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles).

La BCE a continué d’encourager les aptitudes à diriger et le développement professionnel

La BCE a poursuivi son programme visant, d’une part, à améliorer les aptitudes à diriger et, d’autre part, à renforcer l’efficacité du leadership (Leadership Growth Programme). Elle a par ailleurs organisé les sept dernières cohortes du programme de leadership adressé aux femmes (Women’s Leadership Programme), qui a rencontré un franc succès depuis son lancement en 2014 et a pour but d’accroître la représentation des femmes à la BCE. Une autre possibilité de développement importante a été offerte sous la forme du portail de mentorat (Mentoring Portal), qui permet au personnel et aux stagiaires de proposer un mentorat ou de rechercher des mentors. Fin 2023, près de 100 relations de mentor à mentoré étaient enregistrées.

Des initiatives majeures ont été lancées dans le cadre de la stratégie de formation et de développement du SEBC et du MSU

D’autres initiatives clés ont été lancées dans le cadre de la stratégie de formation et de développement du SEBC et du MSU. Les ACN et les BCN ont été intégrées à EUREKA, qui donne accès à un large éventail de possibilités de formations et de développement dans l’ensemble du SEBC et du MSU. Le programme phare de formation des cadres sur les activités de banque centrale et de supervision bancaire (Central Banking & Banking Supervision Executive Education Programme) a été lancé en octobre 2023. Deux marathons de programmation (hackathons) couronnés de succès ont eu lieu durant l’année et ont attiré des participants issus de l’ensemble du SEBC et du MSU. Le premier s’est tenu en février sur le thème de la finance décentralisée, tandis que le second, consacré au changement climatique, a été organisé dans les locaux de la BCE en novembre.

La BCE a revalorisé la bourse de stage

En proposant un programme de stage, la BCE promeut l’intégration européenne des jeunes diplômés et leur donne la possibilité d’acquérir une expérience de terrain et de mettre en pratique les connaissances qu’ils ont acquises pendant leurs études. Dans le même temps, elle bénéficie des connaissances des stagiaires sur l’état actuel de la recherche universitaire ainsi que de leur enthousiasme et de leurs idées novatrices. À dater du 1er décembre 2023, la bourse de stage a été portée à 1 170 euros par mois et à 2 120 euros pour les étudiants ayant achevé au moins deux années d’études de doctorat pour les postes de stage proposés à ce niveau. Les stagiaires bénéficient également d’indemnités de logement.

Diversité et inclusion

La BCE a continué de stimuler la diversité et l’inclusion

Refléter la société européenne et instaurer une culture de l’inclusion est une entreprise de longue haleine. Pour y parvenir, la BCE a renforcé sa base institutionnelle en soutenant ses six réseaux internes de diversité et d’inclusion (D&I) et en déployant son programme de formation sur l’inclusion destiné au personnel, aux équipes et aux dirigeants. Pour permettre une culture fondée sur l’inclusion, le respect mutuel et la sécurité psychologique, deux nouveaux rôles ont été créés : depuis 2023, le nouveau médiateur prévient et traite les tensions sur le lieu de travail en recourant au dialogue assisté, et le nouveau conseiller diversité et inclusion aux ressources humaines (HR D&I Advisor) examine toutes les questions relatives aux personnes et à la culture sous le prisme de la diversité et de l’inclusion.

La diversité des genres et l’intersectionnalité ont constitué des priorités

Tout au long de l’année, la BCE a fait de la diversité des genres l’une de ses priorités, tout en intégrant l’ensemble des aspects de la diversité et en favorisant une culture inclusive. En témoignent la certification EDGE Move & EDGEplus, les progrès engrangés par la BCE par rapport aux objectifs en matière de genre pour la période 2020-2026, l’introduction d’un congé parental rémunéré pour le coparent qui ne donne pas naissance, le pilotage d’un stage pour les talents atteints de troubles du spectre autistique ainsi que les sessions de sensibilisation et les événements sur les questions de race et d’appartenance ethnique, les alliés de la diversité, le handicap et l’inclusion des personnes LGBT+.

La BCE a poursuivi ses actions de sensibilisation ciblée et de recrutement de talents

Dans sa recherche des meilleurs talents d’Europe, la BCE a participé à plusieurs salons de l’emploi s’adressant aux groupes sous-représentés, dont le plus grand salon d’Europe consacré aux personnes noires et de couleur organisé par ADAN (Afro Deutsches Akademiker Netzwerk), le salon Sticks & Stones pour les talents LGBTIQ+ et leurs alliés, ainsi que le salon herCAREER consacré à la promotion de la carrière des femmes. Afin d’attirer des candidats porteurs de handicap, la BCE a publié ses offres d’emploi sur la plateforme myAbility. La BCE a continué de proposer sa bourse d’études destinée aux femmes afin d’étoffer sa population féminine et d’inclure des milieux socioéconomiques différents. En outre, dans un souci constant de solidarité et de soutien, la BCE a lancé une bourse pour 15 étudiants ukrainiens poursuivant un master dans leur pays.

Figure 11.2

Les effectifs de la BCE en chiffres

1 Données au 31 décembre 2023.
2 Y compris 56 participants au Graduate Programme.
3 Collaborateurs détachés d’une banque centrale nationale du Système européen de banques centrales, d’institutions ou d’agences publiques européennes ou d’organisations internationales.
4 Fait uniquement référence aux membres du personnel permanent et aux collaborateurs titulaires d’un contrat à durée déterminée.
5 Renvoie à toute mobilité horizontale permanente ou temporaire entre les divisions ou les entités organisationnelles.
6 Renvoie à toute évolution permanente ou temporaire vers une bande salariale supérieure dans le cadre ou non d’un recrutement.
7 Fait uniquement référence aux membres du personnel permanent et aux membres occupant un poste à durée déterminée convertible.
8 Le tableau montre la proportion de membres du personnel de la BCE et de ses stagiaires par nationalité ; les membres du personnel qui possèdent plusieurs nationalités sont comptabilisés pour chaque nationalité déclarée. Les totaux peuvent excéder 100 % en raison des arrondis et des doubles nationalités. L’énumération suit l’ordre alphabétique des noms des pays dans leurs langues nationales respectives.

11.5 Poursuivre les efforts afin de relever les défis relatifs à l’environnement et au changement climatique

Pour mener à bien son mandat, la BCE se doit de comprendre les implications du changement climatique et les besoins de transition pour l’économie et le secteur financier

Le changement climatique progresse, et plus nous attendons pour réduire nos émissions et passer à une économie plus verte, plus les coûts seront élevés [91], [92]. En dépit des progrès réalisés, la planète n’est toujours pas en bonne voie pour limiter l’élévation de la température mondiale à 1,5° C au-dessus des niveaux préindustriels [93]. De ce fait, les risques liés au changement climatique et à une transition brutale augmentent, ce qui n’est pas sans conséquence pour la politique monétaire et la stabilité des systèmes financiers et bancaires. Aussi est-il essentiel pour la BCE de comprendre les implications pour l’économie et le secteur financier afin qu’elle puisse remplir son mandat.

C’est la raison pour laquelle, sous la conduite du centre du changement climatique, la BCE a poursuivi ses travaux sur son programme d’action pour le climat en y associant les parties prenantes internes et l’Eurosystème par l’intermédiaire de comités compétents et d’instances dédiées au climat. En 2023, la BCE a continué d’intégrer les objectifs et les considérations environnementales de la loi européenne sur le climat dans la définition de sa stratégie, dans ses projets et dans les processus d’élaboration de la politique monétaire.

La BCE a publié son plan sur le climat et la nature 2024-2025

Durant l’année écoulée, la BCE a travaillé à son plan sur le climat et la nature 2024‑2025, qui décrit les activités sur lesquelles elle se concentrera pour atteindre ses objectifs stratégiques en matière de climat. Elle a également défini trois axes d’action prioritaires, à savoir orienter la transition vers une économie verte, comprendre l’incidence physique accrue du changement climatique et poursuivre les travaux sur les risques liés à la nature.

Travaux majeurs liés au climat

Des avancées concrètes ont été réalisées sur plusieurs fronts, couvrant un large éventail de missions de la BCE (figure 11.3).

Dans le cadre de la mise en œuvre de la politique monétaire, la BCE a publié en mars 2023 les premières déclarations financières en matière de climat concernant les avoirs en titres du secteur des entreprises détenus par l’Eurosystème (anglais). L’intensité en carbone des réinvestissements a diminué de plus de 65 % au cours des douze mois qui ont suivi le début de la réorientation des réinvestissements en octobre 2022. Le Conseil des gouverneurs a renforcé le paramètre de réorientation en février, lorsqu’il a décidé de réduire les portefeuilles de titres de l’Eurosystème. Depuis l’interruption des réinvestissements dans le cadre du programme d’achats d’actifs en juillet, la réorientation des obligations d’entreprises au titre du programme d’achats d’urgence face à la pandémie se poursuit. Le premier examen de la méthodologie relative aux notes climatiques mené en octobre 2023 a conclu que le cadre avait atteint les objectifs fixés et que ses principaux éléments constitutifs seraient maintenus. La décarbonation des portefeuilles d’obligations d’entreprises devrait se poursuivre tout au long de 2024 sur une voie favorable à la réalisation des objectifs de l’accord de Paris. En outre, l’Eurosystème a continué ses travaux préparatoires en vue d’intégrer les considérations climatiques dans son dispositif de garanties et d’améliorer son évaluation et sa gestion des risques.

Figure 11.3

Vue d’ensemble des principales actions en faveur du climat

Source : BCE.

La BCE a étudié les retombées économiques et financières du changement climatique et ses implications pour ses missions

Des travaux d’analyse approfondis sont venus soutenir la fonction d’information des responsables politiques, du secteur financier et du public sur l’incidence économique et financière du changement climatique et sur ses implications pour les missions de la BCE [94]. En 2023, la BCE a continué d’évaluer les conséquences macroéconomiques du changement climatique et des politiques d’atténuation et, en particulier, l’incidence des mesures budgétaires vertes sur les projections établies par les services de l’Eurosystème et de la BCE. Une analyse basée sur des modèles examinant les retombées économiques de la tarification du carbone a mis au jour des effets négatifs modestes sur l’économie. Les résultats de l’enquête sur l’accès des entreprises au financement et de l’enquête sur la distribution du crédit bancaire indiquent que les entreprises de la zone euro investissent dans la transition et que les conditions d’octroi des crédits bancaires sont plus restrictives pour les entreprises dont les émissions sont élevées et celles qui ne disposent d’aucun plan de transition crédible. S’agissant des implications pour la politique monétaire, une analyse récente a étudié les effets du changement climatique sur le mécanisme de transmission de la politique monétaire et a conclu que, si la transition alourdit le coût du crédit et réduit les prêts à l’ensemble des entreprises, son effet baissier est plus modéré pour les entreprises à faibles émissions et celles qui s’engagent sur la voie de la décarbonation. Plusieurs études ont observé les liens entre le changement climatique et l’inflation, concluant que si des températures plus élevées peuvent accentuer l’inflation des produits alimentaires, les effets sur la demande induits par des étés plus chauds peuvent freiner l’inflation à long terme et les retombées sur les économies de la zone euro sont asymétriques (cf. encadré 1). La BCE a également progressé dans sa compréhension de l’impact du changement climatique sur la production potentielle.

Afin d’améliorer la disponibilité des données sur le climat, le Système européen de banques centrales a publié des indicateurs liés au changement climatique sur la finance durable, les émissions de gaz à effet de serre et les risques physiques (cf. section 7.2).

La BCE œuvre à une meilleure compréhension des risques liés au climat pesant sur l’économie et les systèmes financiers et à l’élaboration d’une réponse macroprudentielle adéquate

La BCE a continué de développer sa méthodologie en matière de tests de résistance afin d’étudier la capacité de résilience de l’ensemble de l’économie à différents scénarios de transition et le niveau de préparation des banques qu’elle supervise face aux chocs économiques et financiers inhérents au risque climatique. En 2023, la BCE a dirigé le groupe de travail sur la conception et l’analyse de scénarios du réseau pour le verdissement du système financier (Network for Greening the Financial System Working Group, NGFS), qui a publié la quatrième édition de ses scénarios climatiques macrofinanciers à long terme. Ces scénarios constituent une première référence commune pour l’analyse des risques climatiques pesant sur l’économie et le système financier. Le cadre reconnaît l’incertitude et les limites de la modélisation climatique et économique, notamment en ce qui concerne les points de non-retour. En collaboration avec l’Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles, la BCE a élaboré des options stratégiques pour réduire le déficit de protection de l’assurance climatique, étant donné qu’un quart seulement des pertes dues aux catastrophes liées au changement climatique dans l’UE sont assurées à l’heure actuelle. La BCE a également analysé les risques liés au changement climatique pesant sur les États qui sont susceptibles de porter atteinte à la stabilité financière et aux dépenses budgétaires. La BCE et le Comité européen du risque systémique ont publié un rapport qui rassemble des informations sur les indicateurs de stabilité financière les plus importants et établit un cadre macroprudentiel pour faire face au risque climatique. Ce document suggère également qu’une forte dépendance économique à l’égard des écosystèmes naturels pourrait exacerber les risques liés au climat pesant sur la stabilité financière.

S’agissant de la supervision bancaire de la BCE, bien que les établissements de crédit supervisés dans le cadre du mécanisme de surveillance unique aient accompli des avancées significatives à l’égard de leurs pratiques de gestion des risques liés au climat et à l’environnement, un certain nombre d’entre eux n’ont pas concrétisé les progrès attendus pour mars 2023. La BCE continuera de suivre de près les progrès des banques et adoptera des mesures exécutoires le cas échéant [95].

La BCE œuvre à l’amélioration de la sécurité et de la durabilité des billets en euros

Au fil des ans, la BCE n’a cessé de renforcer la sécurité et la durabilité des billets en euros d’un bout à l’autre de la filière fiduciaire [96]. En 2023, elle a publié l’étude sur l’empreinte environnementale des billets en euros en tant qu’instrument de paiement. Les futurs billets en euros sont élaborés conformément aux principes d’éco‑conception, ce qui signifie que les aspects environnementaux sont pris en considération à chaque stade du processus d’élaboration des billets (cf. section 6.2).

La BCE analyse et alimente les débats politiques visant à promouvoir la finance verte au niveau de l’UE et à l’échelle internationale

Depuis 2021, les membres du personnel de la BCE contribuent à des formations et à des ateliers techniques multilatéraux avec des homologues d’autres banques centrales et des parties prenantes à l’extérieur de l’Union européenne. La BCE a également participé à de nombreux groupes de travail et événements en compagnie de banques centrales ainsi que d’autres institutions et instances afin de faire avancer l’agenda climatique et de tirer parti d’échanges réguliers. Il s’agit notamment du réseau pour le verdissement du système financier (Network for Greening the Financial System, NGFS), du Conseil de stabilité financière, du Comité de Bâle sur le contrôle bancaire, des autorités européennes de surveillance et du Comité européen du risque systémique, de la Banque des règlements internationaux, du G7, du G20 ainsi que du Fonds monétaire international.

Des recherches innovantes menées par la BCE ont porté sur les risques liés à la nature, le lien entre le climat et la nature et leur incidence sur l’économie

Des recherches innovantes sur les risques liés à la nature ont montré que la dégradation des écosystèmes constituera un défi pour les entreprises et potentiellement pour les banques, puisque pour ainsi dire 75 % des prêts aux entreprises dans la zone euro (près de 3 240 milliards d’euros) sont accordés à des emprunteurs fortement dépendants des services écosystémiques. Par ailleurs, la BCE a étudié pour la première fois les risques de transition et le lien entre le climat et la nature. Considérant que le changement climatique et le changement d’affectation des sols sont les principaux facteurs de la perte de biodiversité, l’influence des entreprises de la zone euro sur la nature équivaut à la disparition de 582 millions d’hectares d’habitats « vierges » dans le monde. Les recherches soulignent l’importance d’intégrer le changement climatique et la perte de nature dans les dispositifs d’évaluation des risques, sachant qu’ils sont inextricablement liés.

Des travaux sont en cours pour améliorer les performances environnementales des opérations de la BCE pour compte propre et des portefeuilles autres que ceux détenus à des fins de politique monétaire

En mars 2023, la BCE a commencé à publier ses déclarations financières annuelles en matière de climat pour ses portefeuilles ne relevant pas de la politique monétaire parallèlement à sa déclaration environnementale annuelle, qui fournissent conjointement une vue d’ensemble de ses propres incidences environnementales opérationnelles et de l’empreinte carbone [97] de ses émissions financées ainsi que des objectifs correspondants. Des données actualisées sur les performances environnementales de la BCE en 2023 seront mises à disposition dans le courant de 2024.

Encadré 9
La BCE suit l’innovation

En 2023, la BCE a continué de progresser dans le développement et la mise en œuvre de solutions innovantes qui améliorent l’efficacité de ses processus. Des solutions numériques, parmi lesquelles l’intelligence artificielle (IA), l’apprentissage automatique, les robots et les agents conversationnels, ont été déployées dans l’ensemble de l’organisation.

Au niveau des activités de banque centrale, l’IA a été déployée à la BCE pour mieux comprendre les mécanismes de fixation des prix et la dynamique de l’inflation dans l’Union européenne (UE). Le web scraping et l’apprentissage automatique ont été appliqués pour réunir une quantité considérable de données en temps réel sur les prix des produits individuels [98]. Dans le cadre de la supervision bancaire, le programme SupTech lancé en 2019 a fourni 14 outils qui aident les autorités de surveillance à collecter et à analyser d’importants volumes de données quantitatives et qualitatives, à automatiser les processus, à mieux collaborer et à utiliser l’IA pour accélérer et affiner l’analyse prudentielle [99].

Le déploiement de projets numériques à la BCE repose sur un écosystème propice à l’innovation. Au-delà des solutions technologiques, l’innovation nécessite une mentalité de progression, de la curiosité et une coopération étroite entre toutes les parties prenantes de la BCE. À cette fin, des équipes d’innovation interdisciplinaires associant les technologies de l’information, la gestion des connaissances, les activités de banque centrale et la supervision bancaire ont développé des approches innovantes par rapport au travail qui facilitent la gestion de projets, la recherche de l’innovation, l’incubation et le partage des connaissances. Dans le cadre de cet écosystème, le système de documents numériques et la politique de gouvernance de l’information de la BCE constituent une base solide pour le développement de l’IA en fournissant une vaste source de documentation numérisée structurée. En outre, la coopération avec les responsables mondiaux de l’innovation au sein des autorités publiques, des universités, des start-up et des principaux acteurs du secteur contribue à stimuler l’innovation au sein de la BCE, de l’Eurosystème et au-delà. Plus particulièrement, la BCE coordonne les actions de l’Eurosystème au travers de l’Eurosystem Innov8 Forum avec le BIS Innovation Hub Eurosystem Centre. ’’Ce dernier est une coentreprise de la Banque des règlements internationaux (Bank for International Settlements, BIS) et de toutes les banques centrales de l’Eurosystème. Des bureaux ont été ouverts à Francfort et à Paris en mars 2023, sous la houlette et avec le soutien, respectivement, de la Banque fédérale d’Allemagne (Deutsche Bundesbank) et de la Banque de France. Tous les membres de l’Eurosystem Innov8 Forum contribuent à cet espace d’innovation et y partagent leurs connaissances.

Enfin, l’innovation est largement encouragée par le directoire. En février 2023, les membres du directoire ont participé pour la première fois à un Forum de l’innovation doté d’un format « de marché » physique et présentant des démonstrations en direct et interactives d’un échantillon de grands projets innovants de la BCE.

12 Faisons connaissance

Le 1er juin 1998, la Banque centrale européenne (BCE) a commencé à opérer en tant que banque centrale pour la zone euro, avec un mandat clairement défini : maintenir la stabilité des prix. En 2023, à l’occasion de son vingt-cinquième anniversaire, la BCE a célébré les nombreuses réalisations accomplies depuis sa création. Vous trouverez ci-dessous les témoignages de collègues qui étaient déjà là du temps de l’Institut monétaire européen, le précurseur de la BCE. Ces derniers expliquent notamment comment ils ont vécu de l’intérieur la mise en place de cette nouvelle institution et comment ils ont aidé la BCE à franchir d’importantes étapes pour lui permettre de s’imposer immédiatement parmi ses pairs et continuer à évoluer avec le temps.

Rita Choudhury, économiste-statisticienne cheffe d’équipe senior, Direction générale Statistiques

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Mon parcours professionnel au sein de la BCE a été particulièrement enrichissant. Tout a commencé pour moi par un véritable saut dans l’inconnu, avec un nouveau travail dans un nouveau pays. J’ai rejoint la BCE à ses débuts, en tant que jeune chargée d’études au sein de la fonction Statistiques, encore en pleine phase de développement. Avec seulement quelques centaines d’employés, la Banque avait alors besoin de tout le monde sur le pont, et nous devions donc tous combiner plusieurs tâches à la fois. Entre discuter des besoins dans différents domaines, concevoir des cadres statistiques, faire de la programmation et, parfois, rédiger des discours, mes journées de travail étaient particulièrement variées. Alors que la définition des politiques institutionnelles avait à peine été entamée, le fait de souvent voir mes solutions créatives rapidement mises en œuvre était pour moi une grande source de satisfaction.

Au fil du temps et de l’évolution de la BCE, les possibilités de développement professionnel se sont multipliées. J’ai travaillé dans différents domaines des statistiques, ce qui m’a permis de renforcer mon expertise en acquérant de plus en plus d’expérience. Parmi mes souvenirs les plus marquants, je me rappelle des visites que j’ai dirigées auprès de différentes banques centrales nationales et autres autorités compétentes nationales, dans le but de faciliter nos relations et de les aider à se préparer à leurs obligations de déclaration en tant que nouveaux membres de la zone euro.

Je travaille aujourd’hui au Bureau des données, qui vient d’être créé sous la houlette du responsable principal des données (chief data officer) et dont l’objectif est d’optimiser la gestion des données institutionnelles (dans des domaines comme l’intelligence artificielle, par exemple). Je participe aussi au forum sur la diversité et l’inclusion. Ces fonctions transversales me permettent de travailler avec beaucoup d’unités organisationnelles et de participer activement à l’élaboration de diverses politiques de la BCE, ce que je trouve très satisfaisant.

Il y a évidemment eu des moments difficiles, comme le Brexit et les incertitudes que cela a fait peser sur mon travail ici. Mais, au final, je retiens surtout ce que j’ai pu réaliser grâce à notre environnement de travail dynamique, à l’enthousiasme de mes collègues et aux perspectives de développement qu’offre la BCE.

Dimitrios Koukidis, spécialiste principal en gestion des fournisseurs, Direction générale Communication

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Je me rappelle très bien des préparatifs de la cérémonie d’inauguration de la BCE, en juin 1998. À l’époque, je faisais partie d’une petite équipe chargée d’organiser cet événement majeur. Je me souviens de l’enthousiasme et de l’esprit de camaraderie qui régnaient en son sein, malgré les défis organisationnels allant de pair avec la mise en place d’une institution devant rapidement prendre ses marques. Par la suite, j’ai travaillé pendant plusieurs années à l’organisation des événements conçus par la BCE tant pour le public que pour les membres du personnel. Ils n’ont cessé de prendre de l’ampleur et sont devenus de plus en plus variés.

Aujourd’hui, après avoir saisi une offre de mobilité interne en 2016, je travaille au sein de la Division Services linguistiques. Je m’occupe de la budgétisation, de la passation de marchés et de la gestion des fournisseurs pour tout ce qui concerne les traductions et les révisions dans les vingt-quatre langues officielles de l’Union européenne. Les fonctions de support de ce type jouent un rôle essentiel dans la communication de la BCE, qui doit être claire et efficace vers des publics d’experts et de non-experts. Comme partout ailleurs à la BCE, nous nous efforçons de nous adapter aux nouvelles technologies. Avec mes collègues, nous utilisons par exemple des techniques relevant de l’intelligence artificielle pour améliorer l’efficacité de nos processus.

Quand je repense à tout ce chemin exaltant parcouru, je suis fier d’avoir, à mon échelle, aidé la BCE à devenir cette institution d’envergure internationale qui maintient la stabilité des prix et assure la sécurité du système financier pour les quelque 350 millions d’habitants de la zone euro. Je suis aussi reconnaissant d’avoir eu la possibilité de m’épanouir professionnellement et personnellement tout au long de ma carrière ici.

Francesco Mazzaferro, chef du secrétariat du Comité européen du risque systémique

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À l’époque jeune cadre travaillant pour le « Comité de transition », qui était chargé, sous la direction de Tommaso Padoa-Schioppa, de superviser le passage sur les marchés de dix monnaies nationales à l’euro, je me revois encore ce 31 décembre 1998 à minuit. Ce jour-là, qui devait marquer l’aboutissement de tout ce pour quoi j’avais travaillé depuis mon arrivée à l’Institut monétaire européen au milieu de 1995, j’étais naïvement persuadé que le travail était terminé. Et je craignais de me retrouver coincé dans une routine après plusieurs années passionnantes. La décennie que j’ai passée ensuite à la nouvelle Direction générale Relations internationales et européennes m’a prouvé le contraire. Grâce à l’intérêt croissant suscité par notre intégration monétaire, j’ai été amené à mettre sur pied des programmes d’assistance technique conjoints de l’Eurosystème à destination des banques centrales et des superviseurs de certains pays voisins de l’Union européenne.

Dix années plus tard, lorsque la BCE est devenue l’hôte du Comité européen du risque systémique (CERS), une instance indépendante fondée au lendemain de la crise financière, un nouveau défi s’est présenté à moi. Début 2010, on m’a en effet proposé de m’occuper de la mise sur pied de ce comité, en qualité de chef de projet. Un an plus tard, j’étais nommé chef du secrétariat du CERS. Depuis, j’ai véritablement savouré chaque journée passée à préserver la résilience du secteur financier dans un vaste cadre institutionnel, aux côtés des banques centrales et des autorités de surveillance, européennes et nationales, ainsi que d’un groupe exceptionnel de collègues de la BCE et des institutions membres du CERS.

Emily Witt, cheffe de division, Direction générale Opérations de marché

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Lorsque j’ai rejoint l’Institut monétaire européen en 1995, j’ai fait partie des cent premiers collègues chargés des travaux préparatoires en vue de l’introduction de l’euro comme monnaie unique européenne. À partir de 1998, j’ai rapidement appris comment la BCE coopère avec les banques centrales nationales. Ce fut un plaisir pour moi de participer à la coordination de tests holistiques et de constater à quel point les nouveaux systèmes fonctionnaient bien, que ce soit pour la conduite des opérations de politique monétaire, l’exécution des paiements ou la collecte des statistiques à l’échelle européenne.

Encouragée par la volonté de la BCE de promouvoir la mobilité interne, j’ai travaillé dans six domaines d’activité différents (paiements, IT, RH, secrétariat, statistiques et marchés). J’ai pu ainsi mieux cerner les principaux métiers d’une banque centrale et perfectionner mes compétences en gestion de projets, gestion d’équipes et mes aptitudes à diriger. J’ai non seulement pu me confronter à différents points de vue et modes de pensée mais j’ai aussi réussi à tisser des réseaux et des amitiés durables à travers toute l’Europe.

La mission de la BCE est une source d’inspiration pour moi et je suis fière d’avoir contribué à la réussite, au bénéfice de l’Europe, de plusieurs initiatives en matière de gestion du changement. Je pense, par exemple, au déploiement de notre système de gestion des documents et des archives, un élément-clé pour le partage efficace de l’information entre les collègues des banques centrales nationales et la conservation de la mémoire institutionnelle de la BCE.

Aujourd’hui, je suis très heureuse d’être à la tête de la Division Services des opérations financières. J’aime la proximité avec les marchés et j’apprécie de pouvoir combiner mes tâches quotidiennes avec des projets intéressants qui m’amènent à collaborer avec beaucoup de domaines d’activité différents de la BCE, les banques centrales nationales et des partenaires extérieurs. Il y a peu, nous avons ainsi mis en place des services d’agent financier et d’organisme payeur pour la Commission européenne.

Dans mes temps libres, j’aime lire, cuisiner et faire de la randonnée. Je suis d’ailleurs membre active du club de randonnée de la BCE. Cette activité me permet de côtoyer des collègues en dehors du travail et de découvrir de jolis coins de nature un peu partout en Europe.

Comptes annuels

https://www.ecb.europa.eu/press/annual-reports-financial-statements/annual/annual-accounts/html/ecb.annualaccounts2023~f5a98cb02b.fr.html

Bilan consolidé de l’Eurosystème au 31 décembre 2023

https://www.ecb.europa.eu/press/annual-reports-financial-statements/annual/balance/html/ecb.eurosystembalancesheet2023~ca350ad75e.fr.html

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La traduction de ce Rapport a été effectuée par la Banque centrale européenne, la Banque de France et la Banque nationale de Belgique. En cas de divergence d’interprétation, seul le texte original fait foi.

La date d’arrêté des données figurant dans le présent Rapport est le 22 mars 2024 (les exceptions sont explicitement indiquées).

Pour la terminologie spécifique, veuillez consulter le glossaire de la BCE.

PDF ISBN 978-92-899-6721-1, ISSN 1725-289X, doi :10.2866/066647, QB-AA-24-001-FR-N
HTML ISBN 978-92-899-6694-8, ISSN 1725-289X, doi :10.2866/973130, QB-AA-24-001-FR-Q


  1. L’économie mondiale, telle qu’elle est mentionnée dans cette section du Rapport annuel, exclut la zone euro.

  2. Les projections macroéconomiques de décembre 2022 établies par les services de l’Eurosystème prévoyaient un ralentissement de la croissance mondiale à 2,6 % en 2023.

  3. La moyenne pré-pandémique est mesurée sur la période allant de 2012 à 2019.

  4. Cf. l’encadré intitulé « Les actifs incorporels des entreprises multinationales en Irlande et leur impact sur le PIB de la zone euro », Bulletin économique, no 3, BCE, 2023.

  5. Après la date d’arrêté pour le présent Rapport, les résultats budgétaires officiels pour 2023 ont été publiés et ils font état, dans certains pays, de déficits budgétaires nettement plus élevés qu’estimé précédemment.

  6. L’orientation budgétaire reflète la direction et l’ampleur de la relance de l’économie par la voie des politiques budgétaires, au-delà de la réaction automatique des finances publiques au cycle conjoncturel. Pour plus de détails sur ce concept, cf. l’article intitulé « L’orientation budgétaire de la zone euro », Bulletin économique, no 4, BCE, 2016.

  7. Dans un avis publié en juillet 2023, la BCE salue les propositions de la Commission européenne concernant la réforme et formule quelques observations et suggestions techniques en vue d’améliorer encore le nouveau cadre et de le rendre plus transparent et plus prévisible. Cf. l’avis de la Banque centrale européenne du 5 juillet 2023 sur une proposition de réforme de la gouvernance économique dans l’Union (CON/2023/20) (JO C 290 du 18.08.2023, p. 17).

  8. Pour plus d’informations sur l’inflation sous-jacente, cf. l’encadré intitulé « Les mesures de l’inflation sous-jacente : un guide d’analyse pour la zone euro », Bulletin économique, no 5, BCE, 2023.

  9. Le glissement des salaires mesure les écarts entre les évolutions des salaires effectifs et les évolutions des salaires négociés, reflétant les variations des heures supplémentaires, les primes, les tensions sur le marché du travail et d’autres facteurs.

  10. Pour plus d’informations sur les perceptions d’inflation et l’incertitude des consommateurs, cf. l’encadré intitulé « Un examen plus détaillé des anticipations d’inflation des consommateurs : éléments tirés de l’enquête de la BCE sur les anticipations des consommateurs », Bulletin économique, no 7, BCE, 2022. Pour les résultats récents de l’enquête sur les anticipations des consommateurs concernant les anticipations de croissance économique, cf. « Economic growth and labour markets », BCE, 2024. Pour plus d’informations sur la perception par les consommateurs de la relation entre l’inflation et les conditions économiques, cf. Candia (B.), Coibion (O.) et Gorodnichenko (Y.), « Communication and the Beliefs of Economic Agents », NBER Working Paper Series, no 27800, National Bureau of Economic Research, 2020.

  11. Cf. « La Banque centrale européenne présente un plan d’action visant à inscrire les questions liées au changement climatique dans sa stratégie de politique monétaire », communiqué de presse, BCE, 8 juillet 2021.

  12. Cf. Kotz (M.), Kuik (F.), Lis (E.) et Nickel (C.), « The impact of global warming on inflation: averages, seasonality and extremes », Working Paper Series, no 2821, BCE, mai 2023.

  13. Cf. Ciccarelli (M.), Kuik (F.) et Martínez Hernández (C.), « The asymmetric effects of weather shocks on euro area inflation », Working Paper Series, no 2798, BCE, mars 2023.

  14. Cf. l’article intitulé « L’impact du changement climatique sur la production potentielle », Bulletin économique, no 6, BCE, 2023.

  15. Cf. « The climate change challenge and fiscal instruments and policies in the EU », Occasional Paper Series, no 315, BCE, version révisée en juin 2023.

  16. Cf. Christophersen (C.) et al., « What to do about Europe’s climate insurance gap », The ECB Blog, BCE, 24 avril 2023.

  17. Cf. l’encadré intitulé « Les politiques liées au climat dans les projections macroéconomiques établies par les services de l’Eurosystème et de la BCE pour la zone euro et l’impact macroéconomique des mesures budgétaires vertes », Bulletin économique, no 1, BCE, 2023.

  18. Cf. l’article intitulé « Les conséquences macroéconomiques de la transition vers une économie bas carbone », Bulletin économique, no 5, BCE, 2023.

  19. Ces questions sont explorées dans les scénarios climatiques publiés par le Réseau pour le verdissement du système financier, un groupe de 134 banques centrales et superviseurs et de 21 observateurs, auquel la BCE et le Système européen de banques centrales contribuent activement.

  20. Cf. Benatti (N.), Groiss (M.), Kelly (P.), Lopez-Garcia (P.), « Environmental regulation and productivity growth in the euro area: testing the Porter hypothesis », Working Paper Series, no 2820, BCE, 2023.

  21. Cf. Böning (J.), Di Nino (V.) et Folger (T.), « Benefits and costs of the ETS in the EU, a lesson learned for the CBAM design », Working Paper Series, no 2764, BCE, janvier 2023.

  22. Les profits unitaires sont calculés comme l’excédent brut d’exploitation et le revenu mixte divisés par le PIB en volume et incluent une correction pour le revenu des travailleurs indépendants. Rapporter l’excédent brut d’exploitation et le revenu mixte à la production en volume, qui inclut la consommation intermédiaire en plus du PIB, permettrait d’obtenir un indicateur plus exhaustif. Toutefois, la production en volume n’est pas disponible en raison du manque d’informations relatives à la consommation intermédiaire.

  23. Les principales différences conceptuelles entre le déflateur du PIB et l’IPCHX résultent du fait que l’IPCHX est fondé sur les prix de vente des biens et services consommés par les ménages dans les catégories concernées, qu’ils soient produits au niveau national ou importés, tandis que le déflateur du PIB prend en compte les prix de la valeur ajoutée de tous les produits fabriqués par l’économie nationale et n’inclut pas la contribution de la consommation intermédiaire aux prix finaux. Cf. l’encadré intitulé « Comment les profits unitaires ont-ils contribué à la récente accentuation des tensions sur les prix domestiques de la zone euro ? », Bulletin économique, no 4, BCE, 2023.

  24. See Arce (O.), Hahn (E.) and Koester (G.), « How tit-for-tat inflation can make everyone poorer », The ECB Blog, BCE, 30 mars 2023 et l’encadré intitulé « Comment les profits unitaires ont-ils contribué à la récente accentuation des tensions sur les prix domestiques de la zone euro ? », Bulletin économique, no 4, BCE, 2023.

  25. La dérogation a été accordée au lancement du PEPP et est restée en place jusqu’en septembre 2023. Ce même mois, la notation de crédit pertinente ayant été relevée au niveau bien noté (investment grade), la dérogation n’était donc plus nécessaire.

  26. Le total dépasse 100 % en raison des arrondis.

  27. La date d’entrée en vigueur tient compte de la date de l’opération TLTRO III arrivée à échéance en juin.

  28. L’impact sur les garanties de la suppression de certains éléments des dispositifs ACC a été particulièrement notable pour l’Espagne, la France et le Portugal.

  29. Orientation de la Banque centrale européenne du 9 juillet 2014 relative à des mesures temporaires supplémentaires concernant les opérations de refinancement de l’Eurosystème et l’éligibilité des garanties et modifiant l’orientation BCE/2007/9 (BCE/2014/31) (JO L 240 du 13.08.2014, p. 28)

  30. Pour une évaluation des effets financiers et économiques attendus du relèvement au niveau investment grade (bien noté) sur l’économie grecque, cf. Anastasatou (M.), Balfoussia (H.), Bragoudakis (Z.), Malliaropulos (D.), Migiakis (P.), Papageorgiou (D.) et Petroulas (P.), « Effects of a sovereign credit rating upgrade to investment grade on the Greek economy », Economic Bulletin, no 58, Banque de Grèce, 2023, p. 7-28.

  31. Cf. « The financial risk management of the Eurosystem’s monetary policy operations », BCE, juillet 2015.

  32. Cf. la note explicative « D’où proviennent les bénéfices et les pertes de la BCE et des banques centrales nationales de la zone euro ? », BCE, actualisé le 19 mai 2023.

  33. Seuls 25 % des dommages liés à des catastrophes climatiques sont actuellement assurés dans l’UE. Pour plus de détails, cf. « Policy options to reduce the climate insurance protection gap », Discussion Paper, BCE et Autorité européenne des assurances et des pensions professionnelles, avril 2023.

  34. Fin 2023, sept pays avaient introduit ou annoncé un coussin de risque systémique sectoriel pour remédier aux risques pesant sur le secteur de l’immobilier résidentiel (Belgique, Allemagne, Lituanie, Malte, Portugal et Slovénie) et sur le secteur des entreprises (France).

  35. Cf. « Governing Council statement on macroprudential policies », BCE, décembre 2022. De plus, en lien avec les nouveaux taux planchers, des coussins de fonds propres plus élevés pour les autres EIS sont devenus applicables au 1er janvier 2024 pour les banques de trois pays (Grèce, Espagne et Italie) et le deviendront dans un autre pays à compter du 1er janvier 2025 (Slovénie).

  36. Cf. Financial Stability Review, BCE, mai 2023 et Financial Stability Review, BCE, novembre 2023.

  37. Cf. a) Lituanie : Avis de la Banque centrale européenne du 4 avril 2023 sur la mise en place d’une contribution temporaire de solidarité (CON/2023/9) ; b) Italie : Avis de la Banque centrale européenne du 12 septembre 2023 sur l’instauration d’une taxe exceptionnelle à l’égard des établissements de crédit (CON/2023/26) ; c) Slovénie : Avis de la Banque centrale européenne du 2 novembre 2023 sur la mise en place d’une taxe temporaire sur les banques (CON/2023/35) ; d) Lettonie : Avis de la Banque centrale européenne du 11 décembre 2023 sur une commission temporaire prélevée auprès des établissements de crédit aux fins de la protection de l’emprunteur d’un prêt hypothécaire (CON/2023/42) ; et e) Pays-Bas : Avis de la Banque centrale européenne du 15 décembre 2023 sur la mise en place d’une taxe sur les établissements de crédit (CON/2023/45).

  38. Fin 2023, les pays suivants ont introduit ou annoncé un taux neutre positif pour le coussin contracyclique : Irlande (1,5 %), Chypre (0,5 %), Lettonie (1 %), Lituanie (1 %), Pays-Bas (2 %) et Slovénie (1 %).

  39. Cf. « Advancing macroprudential tools for cyber resilience », CERS, février 2023.

  40. Cf. « Crypto-assets and decentralised finance », CERS, mai 2023.

  41. Cf. « NBFI Monitor », CERS, juin 2023.

  42. Cf. « Issues note on policy options to address risks in corporate debt and real estate investment funds from a financial stability perspective », CERS, septembre 2023.

  43. Cf. « ESRB issues a recommendation on vulnerabilities in the commercial real estate sector in the European Economic Area », communiqué de presse, CERS, 25 janvier 2023.

  44. Cf. « Towards macroprudential frameworks for managing climate risk », BCE, CERS, décembre 2023.

  45. Cf. « Powers, ability and willingness to act – the mainstay of effective banking supervision », discours de Frank Elderson, membre du Directoire de la BCE et vice-président du conseil de surveillance prudentielle de la BCE, à la Maison de l’euro, Bruxelles, 7 décembre 2023.

  46. Faisant usage de son pouvoir de sanction à l’égard des établissements de crédit soumis à la surveillance prudentielle, la BCE a sanctionné Landesbank Hessen-Thüringen Girozentrale et Goldman Sachs Bank Europe pour déclaration erronée de leurs besoins en fonds propres, en février 2023 et en mai 2023 respectivement. En août 2023, elle a sanctionné de Volksbank pour avoir mal calculé ses besoins en fonds propres.

  47. Règlement (UE) no 575/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant les exigences prudentielles applicables aux établissements de crédit et modifiant le règlement (UE) no 648/2012 (JO L 176 du 27.06.2013, p. 1).

  48. Directive 2013/36/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 concernant l’accès à l’activité des établissements de crédit et la surveillance prudentielle des établissements de crédit, modifiant la directive 2002/87/CE et abrogeant les directives 2006/48/CE et 2006/49/CE (JO L 176 du 27.06.2013, p. 338).

  49. Pour une évaluation détaillée du paquet bancaire de l’UE et de l’orientation de la BCE, cf. « Des règles strictes, des banques solides – le paquet bancaire », Rapport annuel 2022, BCE, mai 2023.

  50. Cf. l’avis de la banque centrale européenne du 6 juin 2023 sur la proposition de directive sur le devoir de vigilance des entreprises en matière de durabilité (CON/2023/15) (JO C, 249, du 14.07.2023, p. 3) et l’avis de la Banque centrale européenne du 4 octobre 2023 sur la transparence et l’intégrité des activités de notation environnementale, sociale et de gouvernance (ESG) (CON/2023/30) (JO C, C/2023/1354, du 01.12.2023).

  51. Cf. l’avis de la Banque centrale européenne du 5 juillet 2023 sur les modifications du cadre de l’Union pour la gestion des crises et l’assurance des dépôts (CON/2023/19) (JO C 307 du 31.01.2023, p.19).

  52. Règlement (UE) 2023/1114 du Parlement européen et du Conseil du 31 mai 2023 sur les marchés de crypto-actifs, et modifiant les règlements (UE) no 1093/2010 et (UE) no 1095/2010 et les directives 2013/36/UE et (UE) 2019/1937 (JO L 150, du 09.06.2023, p. 40).

  53. Cf. 1) Avis de la Banque centrale européenne du 16 février 2022 sur une proposition de règlement instituant l’Autorité de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme (CON/2022/4) (JO C 210 du 25.05.2022, p. 5) ; 2) Avis de la Banque centrale européenne du 16 février 2022 sur une proposition de directive et de règlement relatifs à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme (CON/2022/5) (JO C 210 du 25.05.2022, p.15) ; et 3) Avis de la Banque centrale européenne du 30 novembre 2021 sur une proposition de règlement visant à élargir les exigences de traçabilité aux transferts de crypto-actifs (CON/2021/37) (JO C 68 du 09.02.2022, p.2).

  54. Cf. Panetta (F.), « Europe needs to think bigger to build its capital markets union », The ECB Blog, BCE, 30 août 2023 ; « Une révolution kantienne pour l’union des marchés de capitaux », discours de Christine Lagarde, présidente de la BCE, lors du Congrès bancaire européen, Francfort-sur-le-Main, 17 novembre 2023 ; et « Banking Union and Capital Markets Union: high time to move on », discours de Luis de Guindos, vice-président de la BCE, lors de la conférence annuelle conjointe de la Commission européenne et de la Banque centrale européenne sur l’intégration financière européenne, Bruxelles, 7 juin 2023.

  55. Cf. le chapitre 4 pour plus de détails sur le règlement sur l’infrastructure du marché européen.

  56. Cf. « Non-banks’ liquidity preparedness and leverage: insights and policy implications from recent stress events », Financial Stability Review, BCE, mai 2023 ; et « The growing role of investment funds in euro area real estate markets: risks and policy considerations », Macroprudential Bulletin, BCE, 3 avril 2023.

  57. Cf. « The Financial Stability Implications of Leverage in Non-Bank Financial Intermediation », CSF, 6 septembre 2023 ; et « Enhancing the Resilience of Non-Bank Financial Intermediation, Progress Report, CSF, 6 septembre 2023.

  58. Cf. « Revised Policy Recommendations to Address Structural Vulnerabilities from Liquidity Mismatch in Open-Ended Funds », CSF, 20 décembre 2023, et « The growing role of investment funds in euro area real estate markets: risks and policy considerations », Macroprudential Bulletin, no 20, BCE, avril 2023.

  59. Pour plus d’informations, cf. les conclusions des groupes de réflexion dans l’étude sur les nouvelles méthodes de paiement numérique de mars 2022 et dans l’étude sur les caractéristiques des portefeuilles numériques de mars 2023 réalisées dans le cadre du projet d’euro numérique.

  60. Conformément à l’article 141, paragraphe 2, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (JO C 326 du 26.10.2012), p. 47, aux articles 17, 21.2, 43.1 et 46.1 des statuts du SEBC et à l’article 9 du règlement (CE) no 332/2002 du Conseil du 18 février 2002 établissant un mécanisme de soutien financier à moyen terme des balances des paiements des États membres(JO L 53 du 23.02.2002, p. 1).

  61. Conformément aux articles 122, paragraphe 2 et 132, paragraphe 1 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, aux articles 17 et 21 des statuts du SEBC, et à l’article 8 du règlement (UE) no 407/2010 du Conseil du 11 mai 2010 établissant un mécanisme européen de stabilisation financière. (JO L 118 du 12.05.2010, p. 1).

  62. Conformément aux articles 17 et 21 des statuts du SEBC conjointement avec l’article 10 du règlement (UE) no 2020/672 du Conseil du 19 mai 2020 portant création d’un instrument européen de soutien temporaire à l’atténuation des risques de chômage en situation d’urgence (SURE) engendrée par la propagation de la COVID-19 (JO L 159 du 20.05.2020, p. 1).

  63. Conformément aux articles 17 et 21 des statuts du SEBC conjointement avec le règlement (UE) no 2021/241 du Parlement européen et du Conseil du 12 février 2021 établissant la facilité pour la reprise et la résilience (JO L 57 du 18.02.2021, p. 17).

  64. Conformément aux articles 17 et 21 des statuts du SEBC conjointement avec le règlement (UE) 2022/2463 du Parlement européen et du Conseil du 14 décembre 2022 établissant un instrument de soutien à l’Ukraine pour 2023 (assistance macrofinancière +) (JO L 322 du 16.12.2022, p. 1)

  65. Conformément aux articles 17 et 21 des statuts du SEBC conjointement avec l’article 3.5 de l’accord-cadre régissant le FESF.

  66. Conformément aux articles 17 et 21 des statuts du SEBC conjointement avec l’article 5.12.1 des conditions générales du MES relatives aux conventions d’assistance financière.

  67. Dans le contexte de l’accord de prêt entre les États membres ayant l’euro comme monnaie (autres que la Grèce et l’Allemagne) et le Kreditanstalt für Wiederaufbau (agissant dans l’intérêt public, dans le respect des instructions de la République fédérale d’Allemagne et sous le bénéfice de la garantie de la République fédérale d’Allemagne) en qualité de prêteurs, la République hellénique en qualité d’emprunteur et la Banque de Grèce en qualité d’agent de l’emprunteur, et en vertu des articles 17 et 21.2 des statuts du SEBC et de l’article 2 de la décision de la Banque centrale européenne du 10 mai 2010 relative à la gestion des prêts bilatéraux coordonnés en faveur de la République hellénique et modifiant la décision BCE/2007/7 (BCE/2010/4) (JO L 119 du 13.05.2010, p. 24).

  68. Cf. Pallotti (F.), Paz-Pardo (G.), Slacalek (J.), Tristani (O.) et Violante (G. L.), « Who Bears the Costs of Inflation? Euro Area Households and the 2021-2022 Shock », Working Paper Series, no 2877, BCE, 2023.

  69. Cf. Ehrmann (M.), Georgarakos (D.) et Kenny (G.), « Credibility gains from communicating with the public: evidence from the ECB’s new monetary policy strategy », Working Paper Series, no 2785, BCE, février 2023.

  70. Cf. Giannetti (M.), Jasova (M.), Loumioti (M.) et Mendicino (C.), « Glossy green banks: the disconnect between environmental disclosures and lending activities », Working Paper Series, no 2882, BCE, 2023.

  71. Cf. Nakov (A.) et Thomas (C.), « Climate-conscious monetary policy », Working Paper Series, no 2845, BCE, 2023.

  72. Cf. Bustamante (M. C.) et Zucchi (F.), « Carbon trade-offs: how firms respond to emission controls », Research Bulletin, no 109, BCE, 17 juillet 2023.

  73. Cf. également Karadi (P.) et Nakov (A.), « Effectiveness and addictiveness of quantitative easing », Journal of Monetary Economics, Vol. 117, 2021, p. 1096-1117, et Van der Ghote (A)., « Interactions and Coordination between Monetary and Macroprudential Policies », American Economic Journal: Macroeconomics, Vol. 13(1), 2021, p. 1-34.

  74. Cf. également Chavleishvili (S.) et Manganelli (S.), « Forecasting and stress testing with quantile vector autoregression », Journal of Applied Econometrics, à paraître, et Chavleishvili (S.), Kremer (M.) et Lund-Thomsen (F.), « Quantifying financial stability trade-offs for monetary policy: a quantile VAR approach », Working Paper Series, no 2833, BCE, 2023.

  75. Affaire C-262/22 P, EU:C:2023:714.

  76. Affaire T-868/16, EU:T:2022:58.

  77. Affaire C-803/21 P.

  78. La BCE a également tenu la commission ECON informée de l’évolution du projet d’euro numérique par le biais de quatre lettres adressées par M. Panetta à la présidente de la commission ECON.

  79. La BCE a un statut d’observateur auprès du FMI. Un représentant permanent de la BCE est détaché au siège du FMI à Washington D. C. et participe à certaines réunions du conseil d’administration.

  80. Les quotes-parts sont libellées en droits de tirage spéciaux (DTS), l’unité de compte du FMI, et font l’objet d’un réexamen à intervalles réguliers.

  81. Ces modifications comprenaient le relèvement temporaire des limites d’accès (tant au Compte des ressources générales qu’au fonds fiduciaire pour la réduction de la pauvreté et la croissance) et l’introduction d’un nouveau cadre de financement couvert par la tranche supérieure de crédit dans les situations d’incertitude exceptionnellement élevée.

  82. Deux examens postérieurs du programme ont été finalisés en juillet et en décembre 2023.

  83. L’article 3, paragraphe 3, du traité sur l’Union européenne dispose, entre autres, que l’Union œuvre pour « le développement durable de l’Europe fondé sur une croissance économique équilibrée et sur la stabilité des prix, une économie sociale de marché hautement compétitive, qui tend au plein emploi et au progrès social, et un niveau élevé de protection et d’amélioration de la qualité de l’environnement ».

  84. Cf. également la résolution du Parlement européen sur le rapport annuel 2021 de la BCE et les commentaires de la BCE sur cette résolution.

  85. La proportionnalité implique que les actions de la BCE doivent, d’une part, être propres à garantir la réalisation des objectifs légitimes qu’elles poursuivent et, d’autre part, ne pas aller manifestement au-delà de ce qui est nécessaire pour les atteindre. Pour plus d’informations, cf. l’affaire C-62/14, Peter Gauweiler e.a.(EU:C:2015:400), et l’affaire C-493/17, Heinrich Weiss e.a. (EU:C:2018:1000).

  86. Pour plus d’informations, cf. la section 3.3 de la revue de la stratégie de politique monétaire de la BCE.

  87. Pour plus d’informations sur le repositionnement de l’Eurosystème en matière de climat depuis octobre 2022, cf. la section 11.5.1.

  88. Cf. les articles thématiques qui ont contribué à l’évaluation stratégique de la BCE.

  89. Les coordinateurs des groupes politiques au sein de la commission des affaires économiques et monétaires (ECON) du Parlement européen sélectionnent deux thèmes pour chaque audition de la présidente de la BCE, qui peuvent être consultés sur le site internet de la commission ECON. Ces sujets sont abordés par la présidente de la BCE dans son discours d’introduction.

  90. La section 10.1 explique également comment la BCE s’acquitte des missions qui lui incombent en tant qu’institution publique dans le cadre de son obligation de rendre compte et de sa communication envers le public.

  91. Cf. « Une transition verte plus rapide profiterait aux entreprises, aux ménages et aux banques, selon les résultats du test de résistance climatique réalisé par la BCE à l’échelle de l’ensemble de l’économie », communiqué de presse, BCE, 6 septembre 2023.

  92. Pour des informations plus détaillées, cf. Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, « Climate change 2023 : Synthesis Report », 2023 et Organisation météorologique mondiale, « The Global Climate 2011-2020 : A Decade of Acceleration », 5 décembre 2023.

  93. Cf. Programme des Nations Unies pour l’environnement, « Emissions Gap Report 2023 » pour de plus amples détails sur l’estimation selon laquelle, compte tenu des niveaux actuels des contributions déterminées au niveau national, le réchauffement de la planète atteindra pour ce siècle 2,9°C au‑dessus des niveaux préindustriels.

  94. Cf. la liste des publications de la BCE sur le changement climatique. Par ailleurs, certains articles de recherche de la BCE ont été relayés dans de prestigieuses revues scientifiques.

  95. Des informations plus détaillées sont disponibles sur le site internet de la BCE consacré à la supervision bancaire et dans le Rapport annuel 2023 de la BCE sur ses activités prudentielles.

  96. Pour plus d’informations, cf. la page internet de la BCE intitulée « La stratégie fiduciaire de l’Eurosystème » et les déclarations environnementales de la BCE.

  97. Depuis 2010, la BCE a mis en place un système certifié de gestion environnementale pour gérer l’empreinte environnementale de ses opérations pour compte propre, ce qui a récemment permis de réaliser des progrès considérables en matière d’économie d’énergie.

  98. Pour plus d’informations, cf. la page internet du réseau PRISMA (Price-setting Microdata Analysis Network) (PRISMA) et Moufakkir (M,), « Careful embrace : AI and the ECB », The ECB Blog, 28 septembre 2023.

  99. Cf. « Technology, data and innovation – shaping the future of supervision », discours prononcé par Elizabeth McCaul, membre du conseil de surveillance prudentielle de la BCE, lors de la Supervision Innovators Conference 2023, Francfort-sur-le-Main, 20 septembre 2023 et « How tech is shaping banking supervision », The ECB Podcast, 28 septembre 2023.